La crise épidémique qui frappe durement le territoire calédonien depuis septembre 2021 avait conduit la totalité des partis indépendantistes à demander le report du scrutin, l’accord de Nouméa permettant d’organiser la dernière consultation jusqu’en septembre 2022. En effet, les différentes mesures de confinement et de restriction des déplacements, mais aussi les deuils qui touchent particulièrement les communautés kanak et océaniennes, ne permettent pas de mener campagne, et se rendre aux urnes constituerait un risque de reprise de l’épidémie. Seul le report à septembre 2022 permettrait le déroulement de la dernière consultation référendaire prévue par l’accord de Nouméa de manière sereine, démocratique et indiscutable. [1]
En maintenant cette date, le gouvernement, qui s’oppose de plus en plus ouvertement à l’indépendance [2], privilégie son propre agenda. D’une part, il espère ainsi enterrer le processus de décolonisation à l’œuvre depuis 30 ans et l’inscrire au bilan de sa mandature dans la perspective des présidentielles de mai 2022. D’autre part, resserrer le calendrier pourrait empêcher que la progression du vote indépendantiste ne permette une victoire du oui à l’indépendance. [3]
Organisé en pleine crise sanitaire et sans la participation du peuple premier, représenté par le mouvement indépendantiste, le 3e référendum d’autodétermination de Kanaky-Nouvelle Calédonie ne pourra en aucun cas être considéré comme valide et crédible. L’État français piétine ainsi les engagements pris depuis 1988 et inscrits dans la Constitution en 1998 au titre de l’accord de Nouméa.
L’État français devra donc assumer l’intégralité des conséquences : la crise politique dans laquelle est désormais plongé le territoire, la rupture totale du dialogue avec le mouvement indépendantiste, les manifestations et mobilisations éventuelles, car la patience du peuple colonisé, qui réclame son indépendance depuis plus de 40 ans et a déjà accepté de nombreux compromis, va peut-être atteindre ses limites avec ce nouveau coup de massue. Car c’est bien l’État, en refusant la conciliation et en décuplant ses forces armées [4], qui est en train de préparer une confrontation violente, et non le mouvement indépendantiste.
Survie réitère son soutien à l’indépendance de Kanaky Nouvelle-Calédonie et à la lutte du peuple Kanak et appelle l’ensemble des organisations politiques, syndicales et associatives à se positionner en ce sens et à dénoncer l’attitude coloniale de l’État français.
Survie
Contact presse : contact survie.org
[1] Voir le communiqué de Survie du 25 octobre 2021
[2] Le Premier ministre Jean Castex affirmait au Sénat le 20 octobre 2021 « le souhait fort que le choix des Calédoniens soit celui de la France. »
[3] Le vote favorable à l’indépendance est passé de 43,3 % en novembre 2018 à 46,7 % en octobre 2020.
[4] 2000 gendarmes et policiers, 130 véhicules, 30 blindés, 2 hélicoptères puma... voir https://www.dnc.nc/un-referendum-sous-haute-securite/ et http://www.opex360.com/2021/10/07/la-gendarmerie-se-prepare-a-tenir-laeroport-de-noumea-en-cas-de-troubles-apres-le-referendum/
• Publié le 13 novembre 2021 - Survie :
https://survie.org/pays/kanaky-nouvelle-caledonie/article/kanaky-nouvelle-caledonie-le-gouvernement-francais-organise-une-consultation-d
Survie appuie la demande de report du troisième référendum d’autodétermination
Au vu de la situation sanitaire, qui touche durement les communautés océaniennes, la France doit reporter la date du troisième référendum d’indépendance en Kanaky Nouvelle Calédonie, conformément aux demandes du mouvement indépendantiste.
Le choix de la date du 12 décembre 2021 était déjà une décision arbitraire. Le mouvement indépendantiste demandait une date plus proche de la fin 2022, pour laisser s’écouler deux ans depuis le référendum précédent et mener une campagne sereine. L’État français s’était finalement aligné sur les franges les plus dures des partisans de la Calédonie française et avait imposé cette date sans faire mine de chercher un consensus comme c’est pourtant l’usage entre les différents courants politiques du pays.
La Kanaky Nouvelle Calédonie se trouve à plus de 17 000km de la France et la situation sanitaire liée au Covid 19 est donc tout autre. Le pays avait été jusque là relativement épargné, grâce à un contrôle strict des entrées des personnes. Mais depuis septembre, le coronavirus frappe fort. Et il frappe tout particulièrement les populations océaniennes, souffrant de facteurs de comorbidités (obésité, diabète, conditions de vies précaires [1]).
D’une part, les restrictions de circulation (confinements, couvre-feu) ne permettent pas le déroulement d’une campagne politique autour du référendum d’indépendance. D’autre part, bien des familles kanak sont en deuil. Le FLNKS [2], comme toutes les autres organisations indépendantistes, exige donc logiquement le report de la date du 12 décembre [3]. La coalition indépendantiste a appelé à la « non-participation » au référendum en cas de maintien de cette date. Le FLNKS est soutenu dans sa position par le groupe du Fer de lance Mélanésien, à travers l’ambassadeur de Papouasie-Nouvelle Guinée aux Nations Unies [4]. Ce troisième référendum ne peut en aucun cas être considéré comme crédible et ses résultats acceptés sans la participation du camp indépendantiste.
La France a jugé nécessaire de reporter de plusieurs mois le second tour des élections municipales en 2020 sur son territoire au vu de la situation sanitaire d’alors. Ce troisième référendum revêt une importance cruciale pour l’avenir de la Kanaky Nouvelle Calédonie. Sauf à considérer que les vies des Océaniens valent moins que les vies françaises, ou à insulter des familles en deuil, la France doit impérativement repousser la date de ce référendum.
L’association Survie soutient donc l’exigence du mouvement indépendantiste de Kanaky Nouvelle Calédonie de report de la date du 12 décembre pour le troisième référendum d’indépendance.
Ce mercredi 27 octobre à 19h, l’association Survie animera un webinaire où seront présentés et analysés les différents enjeux du référendum. Pour en savoir plus sur cet événement : https://fb.me/e/mdZIEseFs
Contact presse : mehdi.derradji survie.org
En complément :
• Le communiqué du Bureau politique du FLNKS du 20/10/2021 demandant le report du référendum.
• L’intervention de l’ambassadeur de Papouasie Nouvelle-Guinée devant la Commission politiques spéciales et décolonisation de l’ONU du 19/10/2021.
• Le communiqué du Collectif Solidarité Kanaky dont Survie fait partie
• La dernière brochure de l’association Survie :« Kanaky Nouvelle Calédonie. Une colonie en lutte pour son indépendance ».
• La note de l’association Survie : « Vers l’indépendance de la Kanaky Nouvelle Calédonie : éviter les pièges de la Françafrique »
Survie
Notes
[1] Autant de facteurs liés à la colonisation et aux discriminations.
[2] Front de Libération Nationale Kanak et Socialiste, principale coalition de partis indépendantistes du pays.
[3] Même le parti pro-France « Calédonie ensemble » s’est prononcé pour conditionner la tenue du référendum aux indicateurs sanitaires.
[4] « ne pas [reporter cette date] pourrait avoir de graves conséquences sur la participation significative des électeurs éligibles au processus référendaire, et notamment sur les communautés vulnérables qui souffrent déjà de manière disproportionnée de la pandémie de Covid-19. Cela pourrait également soulever de sérieuses questions sur la crédibilité et l’intégralité des résultats du référendum. Cela doit être évité. »
• Publié le 25 octobre 2021 - Survie :
https://survie.org/pays/kanaky-nouvelle-caledonie/article/kanaky-nouvelle-caledonie-survie-appuie-la-demande-de-report-du-troisieme