Alors qu’Albert Ho et d’autres se préparent à aller en prison, le plus ancien parti hongkongais d’opposition doit maintenant décider si il participe à des élections que la plupart de ses partisan.es considèrent désormais comme dénuées de sens, suite à la répression de Pékin :
– boycotter les élections plairait aux partisans du Democratic Party, mais le camp démocrate pourrait ne pas y survivre ;
– y participer pourrait permettre au parti de survivre, mais il n’en irait pas de même de sa base.
Albert Ho Chun-yan, 69 ans, démocrate hongkongais chevronné, a du mal à s’habituer à sa nouvelle paire de lunettes à monture en plastique noir qui lui donne un air étrange de rat de bibliothèque. Il ne porte plus ses lunettes à monture métallique. Les prisons de Hong Kong interdisent en effet les objets personnels comportant des pièces métalliques et Tang Suk-yee, sa femme depuis plus de trente ans, lui a dit de s’habituer rapidement à porter la nouvelle paire. C’est par un dimanche après-midi brûlant que ’This Week in Asia’ a rencontré Albert Ho dans son appartement de Tin Hau, près de Causeway Bay.
Le lendemain, lui et neuf autres personnalités de l’opposition devaient comparaître devant le tribunal pour des accusations liées à leur rôle dans une manifestation non autorisée au plus fort des troubles sociaux de 2019. Il a déclaré avoir l’intention de plaider coupable, et il était possible qu’on lui refuse la liberté sous caution en attendant la sentence.
Sur la table à manger de son logement s’entassait une pile de livres qu’il prévoyait de lire en prison. Parmi les nombreux livres rangés sur des étagères tapissant, du sol au plafond, les murs de son bureau, il avait choisi une biographie du philosophe allemand Emmanuel Kant, un livre de Jeffrey C. Isaac (Arendt, Camus et la rébellion moderne), un de Wayne Morrison (Jurisprudence : des Grecs anciens à la post-modernité), Conversations avec moi-même de Nelson Mandela, et un classique chinois (Le rêve de la chambre rouge).
Ho se préparait à passer du temps derrière les barreaux à un moment critique de la vie politique de Hong Kong, suite à l’imposition par Pékin de la loi sur la sécurité nationale de juin 2020, l’arrestation massive de militant.es de l’opposition, ainsi que le bouleversement des règles régissant le système électoral de Hong Kong avant les élections du Conseil législatif de décembre 2021.
Alors que nous parlions cet après-midi-là, une cage dans laquelle deux hamsters faisaient la course à tour de rôle sur une roue nous servait de distraction. Ils couraient en faisant du sur place, comme s’ils en rajoutaient au sort du Democratic Party qu’Albert Ho avait autrefois dirigé. Alors que nous observions tous les deux les animaux, Albert Ho s’est laissé aller : « Mes petits-enfants veulent les garder, mais c’est moi qui m’en occupe. »
La répression de Pékin à la suite des manifestations antigouvernementales de 2019 a décimé les rangs de l’opposition, laissant le Democratic Party, le plus ancien et le plus important parti de Hong Kong, être pratiquement le dernier grand parti debout.
Le Democratic Party est confronté à un dilemme existentiel : celui de décider si il participe ou pas à des élections organisées dans le cadre d’un système remanié qui laisse dans les faits le sort des candidat.es de l’opposition à la merci d’un comité tout-puissant dominé par des personnalités pro-establishment.
Présenter des candidat.es, permettrait au parti de tester la nouvelle structure, et forcerait le gouvernement à répondre d’un minimum de ses actes. Mais cela risquerait également d’attirer sur le Democratic Party les foudres de ses partisan.es qui lui ont fait comprendre qu’ils/elles préféraient boycotter des « élections non libres ».
Pour Albert Ho, aller à l’encontre du consensus public pourrait constituer un suicide politique. Toutes les personnes qui, ces derniers mois, ont acheté des tickets de tombola aux stands que le parti tenait dans les rues ont exhorté celui-ci à boycotter les élections. « Si toute le monde s’oppose à ce que le parti se présente et que celui-ci continue à le faire, le parti trahira toutes les personnes lui faisant confiance », a-t-il déclaré.
Il a révélé que l’establishment avait fait des démarches pour persuader le parti de se présenter aux élections et assurer ainsi sa survie. « Mais que signifie la survie ? » a demandé Albert Ho. « Le parti survivra-t-il s’il parvient à obtenir deux sièges au Conseil législatif ? Non, car si le parti abandonne ses principes fondamentaux, il est déjà mort. »
RECOMMENCER COMME EN 2010 ?
Mais existe-t-il de la place pour une forme de compromis ? Albert Ho et le Democratic Party connaissent bien l’art et les risques d’une telle voie. Albert Ho en était le chef de file en 2010, lorsque le parti avait pris part à des négociations à huis clos avec des responsables de Pékin et avait conclu avec eux un compromis sur un processus de réforme politique.
Des allié.es et des partisan.es avaient qualifié ces négociations secrètes de trahison, et Albert Ho avait porté le poids de leurs critiques. Certain.es avaient exprimé leur volonté de faire barrage à l’élection de candidat.es du Democratic Party lors des élections des conseils de district de l’année suivante. Le parti a survécu et a prospéré, même si de jeunes figures de l’opposition et des nouveaux partis ont fait pression pour une plus grande démocratie avec des manifestations en 2014, et à nouveau en 2019.
Aujourd’hui, 11 ans après que des représentants de Pékin se soient assis autour d’une table avec les démocrates modéré.es de Hong Kong, le gouvernement central a clairement indiqué qu’il adoptait une approche complètement différente vis-à-vis du camp de l’opposition. Les militant.es de l’opposition ont compris que la situation était grave après l’imposition, en juin 2020, de la loi sur la sécurité nationale, qui interdit les actes de sécession, de subversion, de terrorisme et de collusion avec des forces étrangères. Mais peu étaient préparé.es à la répression qui a suivi.
Au début de 2021, cinq figures clés du Democratic Party - dont quatre ancien.nes législateurs/trices (Andrew Wan Siu-kin, Lam Cheuk-ting, Helena Wong Pik-wan et Wu Chi-wai) - figuraient parmi les 47 militant.es de l’opposition accusé.es de subversion pour avoir participé à des primaires non officielles destinées à présélectionner des candidat.es pour les élections au Conseil législatif.
Les procureurs ont décrit ces scrutins organisés en juillet 2020 comme un « plan massif et bien organisé » visant à paralyser le gouvernement en obtenant une majorité de contrôle au sein du Conseil législatif.
Seul.es 11 des accusé.es ont été libéré.es sous caution dans l’attente de leur procès. Sept des dix-huit président.es et député.es actuel.les ou passé.es du Democratic Party sont actuellement en détention provisoire pour une série d’accusations liées aux troubles sociaux de 2019, et deux personnes ont été condamnées à des peines avec sursis. Les arrestations massives ont porté un coup dur à l’opposition, en particulier aux petits partis qui ont perdu, du jour au lendemain, la plupart de leurs membres de base et de leurs étoiles montantes.
Mais le régime de Pékin n’en avait pas encore fini. En mars 2021, il a bouleversé le système électoral afin de garantir que seul.es les « patriotes » gouvernent Hong Kong. Il a réduit le nombre de sièges élus au suffrage direct au sein du Conseil législatif (LegCo). Il a également donné de nouveaux pouvoirs à un Comité électoral élargi, contrôlé par Pékin, pour valider les candidatures aux LegCo et y envoyer certain.es de ses propres membres. Auparavant, la principale tâche de ce comité était de choisir le/la chef.fe de l’Exécutif de Hong Kong. Un comité de vérification a également été créé pour filtrer les candidat.es avec l’aide de la police de sécurité nationale.
Dans ce contexte, Albert Ho estime qu’un nouveau cycle de dialogue avec Pékin est devenu maintenant nécessaire. Une sorte de réconciliation est nécessaire, a-t-il dit, sans préciser ce qu’il avait en tête.
DÉGRADANT ET HUMILIANT
Pour l’opposition hongkongaise, ces bouleversements ont constitué un séisme politique. Ce n’est qu’en novembre 2019, après un raz-de-marée en faveur de leurs candidat.es aux élections des conseils de district organisées dans le contexte des troubles sociaux, que l’opposition avait semblé en passe de devenir majoritaire pour la première fois au Legco, lors des élections législatives initialement prévues le 6 septembre 2020). Ces élections avaient été reportées au motif de la pandémie de Covid-19, et sont désormais prévues pour décembre 2021.
Mais après la refonte du système électoral, les candidat.es de l’opposition peuvent s’attendre à n’obtenir, au maximum, qu’environ 16 des 90 sièges (soit moins de 18 %) de la législature élargie, selon les estimations de politologues.
L’ancienne présidente du Democratic Party, Emily Lau Wai-hing, a immédiatement dit à ses collègues de ne pas se présenter à des élections « dénuées de sens », car les nouvelles règles sont « trop dégradantes et humiliantes » pour l’opposition. Elle faisait ainsi référence à la nouvelle exigence selon laquelle toute candidat.e au Legco doit obtenir au moins deux parrainages de chacun des cinq secteurs de la commission électorale. Avec la création d’un cinquième secteur composé d’ultra-loyalistes, obtenir un ticket d’entrée serait pour un candidat de l’opposition une tâche herculéenne. Les remarques d’Emily Lau ont incité la dirigeante de Hong Kong, Carrie Lam Cheng Yuet-ngor, à déclarer que toute personne faisant un tel commentaire « ne comprenait rien à l’esprit des élections et à la démocratie ».
Le politicien Anthony Wu Ting-yuk favorable à Pékin et délégué au Comité permanent de la Conférence consultative politique du peuple chinois, a également indiqué sa volonté d’accepter des candidat.es du Democratic Party, les félicitant de leur capacité de voir « la situation dans son ensemble ». Certains y ont vu un signal envoyé par Pékin par le biais de cet intermédiaire.
Mais Albert Ho a déclaré que ce n’était pas seulement le processus de validation des candidatures qui était humiliant pour l’opposition. « Ce qui est vraiment humiliant, c’est que vous devez rechercher le soutien de partisan.es de Pékin pour survivre, alors que les autorités ont déjà jeté nombre de vos allié.es derrière les barreaux », a-t-il déclaré. « Il est tout à fait naturel que les gens pensent que nous vendons nos ami.es au profit de nos propres intérêts ».
Albert Ho a déclaré que la situation actuelle n’avait rien à voir avec ce qu’elle était lorsque le Democratic Party avait été attaqué pour avoir tenu des pourparlers secrets avec Pékin il y a 11 ans.
« Bien que le camp pro-démocratie ait été divisé en 2010, nous avions encore beaucoup de partisans. Nous étions convaincu.es que ce que nous avions fait était juste et étions persuadé.es que nous avions effectivement arraché quelque chose à Pékin », a-t-il déclaré. « Mais cette fois, on a du mal à se convaincre soi-même que participer à des élections est le bon choix. »
BOYCOTT OU CHOC EN RETOUR
Dans un sondage en ligne réalisé en avril 2011 par l’Institut de recherche sur l’opinion publique de Hong Kong (HKPORI), 68 % des 7 119 personnes interrogées ont déclaré qu’elles pensaient que la refonte du système électoral avait éloigné Hong Kong de la démocratie. Une analyse plus approfondie a montré que presque toutes les personnes ayant répondu s’étant identifié.es comme partisanes de la démocratie étaient d’accord avec cette affirmation, et s’opposaient également au nouveau mécanisme de tri préalable des candidatures.
Selon le Democratic Party, sur la base des réactions recueillies sur le terrain et en ligne, une proportion significative des personnes pro-démocratie estiment que les partis d’opposition ne devraient pas prendre part aux prochaines élections au Legco, car cela ne ferait que renforcer la légitimité du scrutin.
D’autre part, selon elles, une faiblesse record du taux de participation enverrait un signal fort à la communauté internationale, à savoir que les Hongkongais.es désapprouvent la réforme électorale. Conscient de la tendance croissante à tourner le dos aux élections, le gouvernement de Hong Kong a présenté un projet de loi au Legco, considérant comme un délit le fait d’inciter d’autres personnes à déposer des bulletins blancs ou nuls, ou à ne pas voter du tout, avec une peine pouvant aller jusqu’à trois ans de prison pour ceux qui enfreignent la loi.
Tous les membres du Democratic Party ne sont pas à l’aise avec le boycott des élections, même si les règles édictées contre eux s’accumulent et qu’ils n’obtiendront probablement pas grand-chose au Legco. « Ce qui me dérange le plus, c’est que je ne vois pas d’alternative bénéfique au mouvement si nous nous détournons des élections », a déclaré un membre du parti qui a préféré rester anonyme. Celui-ci estime que le parti doit présenter des candidat.es, même au risque d’une réaction négative de ses partisan.es.
Formé en 1994, le Democratic Party a conservé une approche relativement modérée, avec pour objectif déclaré d’instaurer la démocratie en Chine continentale plutôt que de prôner l’indépendance de Hong Kong. Pendant longtemps, il a entretenu de bonnes relations de travail avec les autorités de Pékin et de Hong Kong. Certains de membres fondateurs, comme Anthony Cheung Bing-leung et Law Chi-kwong, ont même rejoint le gouvernement, bien qu’ils aient dû pour cela renoncer à leur appartenance au parti. Ses liens avec les autorités ne se sont détériorés qu’au cours de la dernière décennie, notamment après que le combatif Leung Chun-ying soit devenu chef de l’Executif hongkongais en 2012.
Pour certains membres du Democratic Party, la position particulière du parti et ses ressources relativement abondantes lui imposent de ne pas céder de terrain au sein de l’espace politique aussi facilement.
« Pékin veut bien sûr que nous nous présentions, mais ce n’est pas pour eux la fin du monde si nous ne le faisons pas », a déclaré une autre source du parti. « Si nous tournons le dos aux élections, ils se contenteront de soutenir des »pseudo-démocrates« et n’auront plus besoin de notre participation la prochaine fois. » Cette source a déclaré que ces candidatures alternatives à celles du Democratic party comprenaient des groupes à mi-chemin entre le pouvoir et le Democratic Party, comme Third Side (Troisième voie), cofondé par l’ex-démocrate Tik Chi-yuen, et Path of Democracy (Chemin de la démocratie), le groupe de réflexion formé par Ronny Tong Ka-wah, ancien législateur du Civic Party et membre de l’équipe de la cheffe de l’Exécutif Carrie Lam.
La source a estimé que si une personne telle que Lo Kin-hei, l’actuel président du Democratic Party, arrivait à passer à travers les mailles des nouvelles procédures d’invalidation et parvenait à se présenter aux élections, cela créerait un précédent important. « Serions-nous alors en mesure d’ouvrir plus largement la porte pour nos alliés soient plus nombreux à se présenter quatre ans plus tard ? ». Reconnaissant que se présenter aux élections serait une décision impopulaire, et qu’un faible taux de participation pourrait nuire à ses candidat.es, la source a déclaré : « Si nous perdons cette épreuve, tant pis - au moins nous aurons essayé. J’espère également que la population comprendra que nous ne faisons pas cela pour nous-mêmes. »
OUVRIR UNE PORTE ?
Le professeur de science politique William Case, anciennement membre de la City University de Hong Kong, a déclaré que les boycotts électoraux étaient rares dans la région, malgré l’absence de liberté politique dans de nombreux pays d’Asie du Sud-Est. Les candidat.es qui ont remporté les élections dans des pays comme la Malaisie, la Thaïlande et le Cambodge ont versé une grande partie de leur rémunération à leurs partis. Leur programme a servi à « exprimer les griefs de leurs électeurs/trices », « obliger les pouvoirs en place à rendre un minimum de comptes », « et, malgré la futilité totale de leur rôle, faire avancer la cause de la démocratie ».
Selon lui, s’il est facile de comprendre les sentiments de l’opinion publique en faveur d’un boycott, l’opposition a également de bonnes raisons d’envisager de se présenter aux élections législatives, malgré les risques de s’aliéner des partisan.es ou d’entrer en conflit avec les autorités.
« Les perspectives d’ouverture politique sont nulles », a déclaré William Case, aujourd’hui directeur de l’école de politique, d’histoire et de relations internationales de l’université de Nottingham en Malaisie. « Mais au moins, en ayant testé la nouvelle structure, sa nature précise deviendrait plus claire. Les différences entre les systèmes de Hong Kong et du continent seraient également plus visibles. Et la diversité, voire les rivalités, qui se développent déjà parmi les candidats et les partis pro-établissement, seraient mis en évidence. »
Yeung Sum, qui a été président du Democratic Party de 2002 à 2004, ne voyait pas l’intérêt de tester les nouvelles règles alors que le sentiment de l’électorat en faveur d’un boycott était évident. Rappelant à ses collègues la nécessité de rester fidèles à leurs valeurs, cet universitaire de 73 ans spécialisé dans l’administration sociale a déclaré : « Pourquoi devrions-nous nous soucier de savoir si nous avons la bénédiction de Pékin pour nous présenter aux élections, et si nous pourrions toujours y participer la prochaine fois ? ».
« Les seules personnes au services desquelles nous sommes sont les Hongkongais.es. Pourquoi ne demanderions-nous pas simplement aux Hongkongais ce qui les intéresse et ce qu’ils/elles attendent de nous ? Le Democratic Party ne doit pas se présenter aux élections pour le plaisir de se présenter », a-t-il dit, ajoutant que les élections ne sont qu’un moyen parmi d’autres de faire avancer la cause de la démocratie.
« Même si boycotter les élections signifiait que le Democratic Party pourrait être réduit à un groupe de pression », a-t-il dit, « ce ne pourrait pas être pire qu’à l’époque coloniale où il n’existait aucune culture politique, même dans les années 1970. » Le plus important, selon Yeung Sum, est de rassembler les partisans de la démocratie par le biais de structures locales.
Albert Ho a convenu que les élections n’étaient pas tout, mais a fait valoir que la participation du parti pouvait servir de base à un début de dialogue avec Pékin.
« Si Pékin veut que nous nous présentions, il doit nous convaincre par des changements concernant les questions de droits humains. Et nous avons besoin de discuter de ce sujet autour d’une table », a-t-il déclaré, ajoutant que tout dialogue en vue d’une réconciliation devrait inclure d’autres membres du camp de l’opposition. « Le pire moment est le meilleur moment », a-t-il dit. « C’est aussi dans l’intérêt de Pékin. Hong Kong est dans une impasse, et le dialogue permettra peut-être d’alléger les sanctions que d’autres pays lui ont imposées. »
Albert Ho n’a pas craint que sa proposition de dialogue entraîne des critiques au sein de l’opposition, comme cela avait été le cas pour son parti en 2010. « Il est facile d’opter pour une politique puriste ou de conviction politique sans tenir compte du résultat possible », a-t-il déclaré.
« Mais le Democratic Party, ces dernières années, a été très cohérent en adoptant la politique de la responsabilité, dans laquelle nous nous soucions des conséquences de nos actions et devons procéder à des évaluations des risques. Nous ne tenons jamais de propos extrêmes, nous ne revendiquons jamais une position morale élevée et certaines personnes pourraient ne jamais nous admirer. Mais le grand public, qui finira par en bénéficier, comprendra. »
LE SENS DE L’HISTOIRE
Le travailleur social Lo Kin-hei, 36 ans, a pris la présidence du Democratic Party en décembre 2020, juste avant les arrestations massives de militant.es de l’opposition et la refonte du système électoral.
Ce protégé de Yeung Sum, a qualifié ces changements de « rétrogrades », mais s’est abstenu de claquer la porte à la participation aux élections. Il a toutefois déclaré que les événements récents - comme le fait que les autorités pénitentiaires aient interdit à l’ancien président du parti Wu Chi-wai d’assister aux funérailles de son père - avaient rendu plus difficile pour les membres du parti d’accepter de participer aux élections. Wu Chi-wai, l’un des 47 militant.es accusé.es de subversion et actuellement en détention provisoire, a finalement bénéficié d’une mise en liberté provisoire sous caution.
Lo Kin-hei est conscient que les allié.es pro-démocratie et même les candidat.es à des sièges au Legco dans des circonscriptions fonctionnelles du secteur commercial attendaient de connaître la position du parti. « Ce sera très difficile pour tout parti fait cavalier seul. C’est également vrai pour le Democratic party », a-t-il déclaré. « Le parti a organisé des discussions collectives en interne et prendra une décision lors d’une assemblée générale en septembre », a-t-il ajouté.
Le 18 mai, deux jours après qu’Albert Ho se soit entretenu avec « This Week In Asia » à son domicile, il s’est rendu au tribunal et a plaidé coupable, avec neuf de ses co-accusé.es, à propos des charges concernant un rassemblement non autorisé en 2019. Parmi les autres figuraient Yeung Sum, qui porte également des lunettes à monture en plastique noir, et Sin Chung-kai, ancien vice-président du parti. Tous et toutes ont été placés en détention provisoire dans l’attente de leur condamnation.
À son domicile, Albert Ho s’était montré optimiste et avait déclaré que ceux qui ont abandonné la lutte en raison des cruelles réalités politiques n’avaient pas le sens de l’histoire.
« Nous devons poursuivre notre lutte persistante malgré une défaite persistante. C’est le minimum que nous puissions faire », avait-t-il déclaré.
S’inspirant du mythe grec de Sisyphe, contraint de faire rouler un rocher en haut d’une colline pour qu’il redescende chaque fois qu’il s’approchait du sommet, Albert Ho avait ajouté : « Nous devrions également croire qu’un jour, nous n’aurons plus besoin de faire rouler l’énorme rocher en haut d’une colline escarpée comme Sisyphe. L’histoire ne s’arrêtera pas à un âge sombre. Je ne crois pas que les dictatures prévaudront éternellement. J’ai foi en l’humanité et en l’action humaine. Nous sommes du bon côté de l’histoire, et la justice est de notre côté. »
Alors que je prenais congé, les hamsters de Ho étaient toujours à l’œuvre, restant au même endroit tout en courant sur la roue. Sisyphe aurait pu comprendre.