L’annonce ne pouvait guère tomber à un pire moment. Toute la Thaïlande s’apprête à fêter la semaine prochaine l’entrée dans la nouvelle année. Une semaine de réjouissances, de retrouvailles familiales et d’agapes. Or le couperet est tombé le 8 avril, rapporte The Bangkok Post : “Dans 41 provinces, dont Bangkok, les lieux de divertissement jugés à risques devront fermer leurs portes pour quinze jours”, à compter de ce vendredi 9 avril minuit. Par “lieux jugés à risques”, le gouvernement entend notamment “les pubs, bars, karaokés et salons de massage”.
C’est d’un de ces lieux que semble être partie la nouvelle vague de contamination, “qui se répand rapidement à travers le pays”. Plus précisément, du quartier de Thong Lor, à Bangkok. Entre le 3 et le 8 avril, explique le journal, sur un peu plus de 3 000 tests effectués auprès de clients “de pubs, bars et clubs” de ce quartier, 399 étaient positifs. “Et on attend toujours le résultat pour 1 075 autres.” Le variant britannique a été détecté dans ce foyer de contamination. Au total, depuis le début de la pandémie, la Thaïlande a enregistré 30 000 cas et 95 décès.
Le ministre des Transports pointé du doigt
Cette “troisième vague”, s’inquiète le Bangkok Post dans son éditorial ce vendredi 9 avril, “va mettre à l’arrêt une économie nationale déjà fragile”. Et “qui va en être tenu responsable ?” lance le journal, qui appelle à “punir les contrevenants aux règles sanitaires”.
Et par “contrevenants”, il entend ces puissants qui, au mépris de tout geste barrière, ont fréquenté des clubs de Thong Lor. Le ministre des Transports en particulier est visé. Saksayam Chidchob, aujourd’hui positif et hospitalisé, se serait rendu “avec plusieurs gros bonnets” dans un de ces lieux de divertissement. Le ministre, souligne le quotidien, est resté très évasif sur son emploi du temps fin mars, début avril.
“Ce qui s’est passé à Thong Lor montre la face sombre de nombreux lieux de divertissement de luxe”, reprend l’éditorialiste. Sur une vidéo, on voit notamment que “l’un des clubs de Thong Lor, à la clientèle riche et puissante, a enfreint toutes les règles sanitaires”.
Certaines images montrent de jolies mannequins qui boivent toutes dans le même verre, sous les encouragements de clients masculins qui ont sans doute, eux aussi, utilisé ce verre. Une nouvelle vague était donc inévitable.
Et c’est sans évoquer les “services plus discrets”, qui, pour les VIP, sont “l’occasion d’une intimité encore plus étroite”.
En Thaïlande, un état d’urgence est toujours en vigueur. Si la “police applique rigoureusement les réglementations draconiennes pour se débarrasser des militants prodémocratie depuis plusieurs mois”, déplore le Bangkok Post, les puissants continuent de jouir d’une impunité sans limite. Et de la complicité des autorités :
“Cette transgression des règles n’aurait pas été possible si les autorités n’avaient pas fait mine de regarder ailleurs.”
Aujourd’hui, assène le journal, si le gouvernement est sincère dans sa volonté de lutter contre la pandémie, il “doit faire en sorte que la loi s’applique à tous ceux qui ne respectent pas les règles, quel que soit leur statut social ou politique”. Sans quoi, “ils n’apprendront jamais de leurs erreurs”.
Bangkok Post
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