Fort-de-France,
Olivier Besancenot a répondu à l’adresse aux candidats de la gauche anticolonialiste de Guadeloupe et de Martini-que. Sur la base de ses réponses, le Groupe révolution socialiste (GRS) en Martinique et, en Guadeloupe, un comité de soutien à Olivier Besancenot, se sont engagés dans la campagne présidentielle. La question des dernières colonies de la France occupe peu de place dans le débat électoral. Cela ne surprend pas. Pour la majorité des candidats, les Antilles et les autres colonies ne forment qu’un prolongement « ultramarin », « exotique » de la « métropole ». La campagne d’Olivier Besancenot tranche sur ce point, et elle doit servir à faire entrer ces questions dans le débat politique.
Le préambule de la Constitution française reconnaissait, de façon implicite, l’existence de peuples colonisés, que la France avait le devoir de conduire à la libre administration de leurs propres affaires. Or, une révision de cette Constitution a ravalé les « peuples d’Outre-mer » au rang de simples « populations ». Il ne s’agit pas d’un détail anodin. Notre engagement est de tout faire pour que la reconnaissance des peuples colonisés par la France soit explicitement inscrite dans la Constitution.
Les peuples de la Guadeloupe, de la Martinique et de la Guyane, comme tout peuple, ont droit à leur autodétermination, c’est-à-dire à rompre les liens coloniaux qui les mutilent, et de choisir le destin qui leur convient. Il s’agit, pour les révolutionnaires français, d’accompagner et de soutenir la lutte des peuples concernés. Pour la Guyane, la Martinique et la Guadeloupe, nous soutenons l’exigence forte qui s’exprime aujourd’hui pour une transformation des institutions politiques permettant aux peuples de prendre en main librement le développement économique, social et culturel !
Il faut que le changement en la matière résulte d’un choix démocratique des peuples à travers, par exemple, la mise en place d’assemblées élues au suffrage universel à la proportionnelle intégrale. Ces assemblées seraient chargées de rédiger les projets institutionnels. Les peuples concernés auraient le dernier mot dans un scrutin référendaire propre.
Notre candidat soutient également le combat contre le scandale du chloredécone. Après le sang contaminé en France, la terre contaminée en Guadeloupe et en Martinique ! Le chloredécone est un pesticide utilisé par les gros planteurs (Békés), eux-mêmes importateurs, dans la lutte contre le charançon des bananeraies. Ce produit a été interdit aux États-Unis, après de graves déboires, puis en France (1990), mais il a continué à être utilisé aux Antilles jusqu’en 1993, grâce à une dérogation.
Des organisations paysannes, écologistes, syndicales ont dénoncé les conséquences pour les ouvriers - qui répandaient le produit sans être équipés de protections minimales -, les petits agriculteurs - terres contaminées par proximité -, la population consommatrice de légumes, de poissons, etc. - contamination de la chaîne alimentaire. On estime la rémanence du produit dans les sols à des dizaines, voire des centaines d’années. Certaines sources d’eaux, jusque-là potables, sont contaminées. Aujourd’hui, les résultats d’une enquête officielle déclare qu’environ 11 % des produits alimentaires en vente dans les grandes surfaces sont contaminés ! Il faut relayer la protestation guadeloupéenne et martiniquaise qui s’amplifie. Elle a commencé dès le forum social caribéen qui s’est tenu en Martinique contre le chloredécone et autres pesticides, en juin 2005, à l’appel de syndicats ouvriers, d’une organisation paysanne et d’un mouvement écologiste, avec 200 personnes. Elle continue.
En Guadeloupe, un collectif d’avocats, soutenu par la population, a porté plainte contre l’État pour empoisonnement et mobilise fortement. Une mission parlementaire a rendu son rapport, mais ce n’était pas une commission d’enquête (c’est-à-dire qu’elle n’a pas le pouvoir de mise en cause des personnes responsables). Notre candidat soutient les exigences du mouvement social guadeloupéen et martiniquais : enquête épidémiologique sé-rieuse (on parle d’augmentation des cancers, d’augmentation de la stérilité) ; condamnation des responsables (publics et privés) ; étude scientifique sur les moyens de décontamination du sol et des nappes phréatiques.
Ère nouvelle
Le devoir des révolutionnaires, en France, est de veiller à ce que toutes les avancées sociales conquises (en termes de droits des salariés, loi contre les licenciements, développement des services publics, conquêtes sociales, protection environnementale) s’appliquent, après approbation par les assemblées élues du pays. Mais certaines mesures spécifiques sont nécessaires, compte tenu de la fragilité économique et sociale de ces pays : contrôle ouvrier et populaire sur l’installation et les activités des multinationales ; priorité effective d’embauche pour les ressortissants de chaque territoire pour tous les emplois qu’ils sont susceptibles d’occuper dans leur pays ; définition d’un statut foncier spécifique permettant d’empêcher la dépossession des peuples de la terre de leur pays ; reconnaissance aux collectivités élues des pays concernés de droits économiques face aux prérogatives exorbitantes du droit commun français (droit d’intervention dans le domaine économique, droit de définir une fiscalité propre, droit d’intervenir de façon négociée dans les règles du commerce extérieure et la coopération) ; totale liberté et attribution de moyens pour l’expression et le développement des cultures de tous les peuples ; soutien aux revendications et aux luttes des peuples et des organisations populaires des pays, en particulier les syndicats de travailleurs, les organisations féministes, les associations écologistes, les mouvements culturels progressistes ; reconnaissance immédiate, pleine et entière, des droits des organisations syndicales de travailleurs jusqu’à ce jour discriminées par rapport aux organisations syndicales françaises.
Il s’agit, en soutenant ce programme d’urgence, d’ouvrir une ère nouvelle dans les relations entre le peuple français et ceux des dernières colonies, préfigurant la fin nécessaire des rapports de domination d’aujourd’hui.