“Dehors ! Dehors !” criaient certains participants à la séance du MAS, le parti de gauche au pouvoir, lundi 14 décembre lors d’une séance plénière dans la région de Cochabamba, fief des cocaleros et de la formation politique de l’ancien président bolivien (2006-2019).
Ces mots s’adressaient à Evo Morales, désormais président du MAS (Mouvement vers le socialisme) après son retour d’exil en Argentine le 9 novembre dernier, lorsque la victoire de son dauphin Luis Arce à l’élection présidentielle lui a permis de revenir au pays.
Mais la colère des cadres du parti ne s’est pas arrêtée là, raconte le quotidien El Deber qui publie une vidéo d’une scène étonnante où l’on voit voler une chaise vers la tribune où se tenait Evo Morales, ainsi que des bouteilles, un parapluie, puis d’autres chaises en plastique. Fort heureusement, les projectiles n’ont occasionné aucune blessure.
“Les partisans, fâchés de la façon dont se déroulait la rencontre, ont commencé à se lever et à crier ‘Rénovation ! Rénovation !’” poursuit Página Siete.
Geste autoritaire
La rencontre avait pour objet de désigner les futurs candidats du MAS aux élections régionales et locales du 7 mars 2021, qui devront renouveler les mandats de gouverneurs de sept départements ainsi que les maires. Selon le ressenti de certains, le geste unilatéral d’Evo Morales validant ou invalidant du doigt, depuis la tribune, les noms de candidats a été vécu comme un abus d’autorité.
Le parti MAS a été durement éprouvé après les péripéties qui ont succédé à l’élection présidentielle d’octobre 2019 où Evo Morales s’était déclaré vainqueur, suscitant des affrontements violents entre ses partisans et ses détracteurs et forçant Morales à démissionner, sur le “conseil” de l’armée.
Et plus d’un an après, “ce bloc [des partisans] du MAS, qui en quatorze ans de pouvoir géré par le haut n’avait aucune visibilité et dont les divergences étaient éliminées”, a bien l’intention de s’exprimer, note une politologue interrogée par Los Tiempos.
Ce n’est pas la première fois qu’un malaise se fait jour au sein du parti, commente le correspondant en Bolivie de Deutsche Welle. Le journaliste explique combien la prise de distance relative du nouveau président Luis Arce avec son mentor Evo Morales aiguise les esprits et fait couver les conflits.
Désormais, poursuit de son côté Los Tiempos, les représentants du parti issus de divers secteurs de la société civile exigent plus de démocratie et de débat, d’autant que les enjeux de ces prochaines élections sont locaux et les concernent au premier chef.
Pour sa part, Evo Morales a accusé “la presse de droite” d’avoir infiltré la réunion pour semer la zizanie et provoquer de la violence.
Sabine Grandadam
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