L’afflux de nouveaux abonnés est tel que la plateforme rencontre des difficultés techniques. “Aujourd’hui nous avons eu 1 000 nouveaux abonnés par minute”, se réjouissait peu après l’élection présidentielle l’équipe de Parler, “le premier réseau social de la liberté d’expression”. Parler, MeWe, Rumble, Newsmax… Autant de médias qui ont le vent en poupe, rapporte le New York Times :
“Ce week-end, Parler était numéro un des téléchargements dans l’App Store. Lundi, il comptait huit millions de membres, soit près du double des 4,5 millions de la semaine dernière. Selon les prévisions de [la plateforme de vidéos] Rumble, 75 à 90 millions de personnes vont regarder une vidéo sur le site ce mois-ci alors qu’ils n’étaient que 60,5 millions le mois dernier. Et d’après [la chaîne] Newsmax, plus de 3 millions de personnes ont regardé ses programmes le soir des élections, et son application a récemment fait partie du top 10 des applications quotidiennes les plus téléchargées sur l’App Store d’Apple.”
Créé en 2018, Parler est “très peu regardant sur ce que les gens peuvent poster sur le site, poursuit le quotidien sur son site Internet. […] Sur Parler, les internautes peuvent lire des posts à la gloire de leur président et sur QAnon, cette théorie du complot qui affirme que certains dirigeants démocrates sont des pédophiles et des satanistes. Et les théories antisémites ne manquent pas.”
“Des millions de gens ont quitté Facebook et Twitter depuis l’élection”, selon le New York Times. À plusieurs reprises durant la fin de la campagne électorale et depuis le scrutin, les deux réseaux sociaux ont signalé des messages publiés par le président américain, les qualifiant de trompeurs. Mi-octobre, les deux géants avaient déjà fait face à une flopée de critiques pour avoir limité la diffusion de révélations “douteuses” du New York Post sur Hunter Biden, le fils du candidat démocrate.
“Ils ont oublié la poule aux œufs d’or”
Jeudi 12 novembre, sur Twitter, Donald Trump attribuait sa défaite à Fox News, la chaîne conservatrice qui l’a pourtant soutenu contre vents et marées pendant son mandat. Son tort : avoir annoncé, dès le 3 novembre au soir, le succès de Joe Biden dans l’État clé d’Arizona, une victoire qui n’a été confirmée par les autres grandes chaînes américaines que dix jours plus tard.
Ils ont oublié qui a fait leur succès et grâce à qui ils en sont là. Ils ont oublié la poule aux œufs d’or. La plus grande différence entre les élections de 2016 et celles de 2020, c’est @FoxNews !
“Certains partisans de Trump sont furieux contre la Fox et se tournent vers Newsmax à la place”, résume le spécialiste médias de CNN dans un article intitulé “Les électeurs de Trump se ruent sur une chaîne de télé qui affirme que Biden n’est pas le président élu”.
“Une nouvelle rupture dans le monde des médias”
Si les audiences de Fox News, jusqu’ici en position de “quasi-monopole” parmi les médias conservateurs, ne semblent pas pâtir du divorce annoncé, Newsmax et OAN (One America News, une autre chaîne conservatrice promue par le président américain) s’engouffrent dans l’espace laissé vacant, analyse CNN :
“Le succès de Newsmax doit beaucoup au fait qu’ils répondent à la demande. Il y a une très forte demande de contenus affirmant que Trump n’a pas perdu […]. Nous assistons à une nouvelle rupture dans le monde des médias, créée par les conservateurs qui n’arrivent pas à croire ou refusent de croire qu’il y a plus d’Américains qui ont voté pour Biden que pour Trump.”
“Sentant l’odeur du sang”, les présentateurs de la petite chaîne qui monte ne retiennent plus leurs coups, raconte le Washington Post, et n’hésitent pas à critiquer leurs confrères de Fox News à l’antenne. Certains des commentateurs les plus conservateurs de la Fox ont d’ailleurs été débauchés par Newsmax, précise le quotidien.
Les supporters de Trump supporteront-ils plus longtemps cet entre-soi ? “S’il n’y a plus personne pour débattre, plus de journalistes ou de médias à critiquer, combien de temps cela va-t-il durer ?” s’interroge Shannon McGregor, une spécialiste des médias à l’université de Caroline du Nord. À moins que le président américain ne réponde lui-même à la demande : selon Axios, Donald Trump aurait confié à des proches son intention de créer un média en ligne.
Courrier International
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