“Dans une Bolivie convulsive, Evo Morales à nouveau accusé” par la justice, titre le quotidien argentin de gauche Página12.
Le ministère bolivien de la Justice du pouvoir intérimaire, en place depuis novembre 2019, après le départ de l’ancien président Evo Morales (2006-2019), accuse ce dernier et quatre autres responsables politiques de “génocide, terrorisme, sédition, délits contre le système de santé” ainsi que d’autres chefs d’accusation, comme l’atteinte au service public, précise le journal bolivien El Deber.
Selon le ministère de la Justice, des organisations sociales adossées aux partisans d’Evo Morales “maintiennent leurs manifestations en bloquant au moins 60 accès routiers aux principales villes du pays”, poursuit El Deber.
Mais, cité par Página12, un militant du parti MAS d’Evo Morales gronde :
“Cette accusation est un écran de fumée pour masquer l’incompétence du gouvernement et l’insatisfaction du peuple qui ne le supporte plus et demande le départ de cette équipe.”
Parmi les accusés figure notamment Luis Arce, le candidat désigné par Evo Morales pour la prochaine élection présidentielle, dont la date a tout récemment été fixée au 18 octobre par le tribunal électoral, après avoir été reportée deux fois en raison de la pandémie de coronavirus, selon le gouvernement.
Manque d’oxygène en pleine crise de coronavirus
Ce nouveau report, qui n’a pas été validé par le Parlement, a déclenché depuis plus d’une semaine une vague de protestations des mouvements sociaux et politiques de gauche qui soutiennent le parti d’Evo Morales.
Mais le blocage de routes orchestré par les manifestants a engendré de fâcheuses conséquences qui prêtent le flanc à ces accusations renforcées du gouvernement.
Des camions transportant de l’oxygène et du matériel n’ont pu accéder aux hôpitaux des principales villes, où se trouvent des patients atteints de Covid-19 sous assistance respiratoire ainsi que des nouveau-nés nécessitant une intubation.
La situation “en est au point où le système public de santé a annoncé un ‘état de catastrophe’ imminent si les dotations en oxygène des hôpitaux ne se renouvellent pas”, mentionne BBC Mundo.
Selon le gouvernement, ce défaut d’approvisionnement aurait occasionné en une semaine la mort de 31 patients.
Il a motivé la ministre bolivienne des Affaires étrangères, Karen Longaric, à réclamer devant l’OEA, l’Organisation des États américains, le 7 août dernier, l’intervention de la communauté internationale “contre les blocages ‘incités’ par Evo Morales”, selon elle, après le report de la date de l’élection présidentielle, rapporte le journal bolivien Los Tiempos.
Pourtant, rappelle El País, Evo Morales a bien demandé que soient levés les blocages de routes. “Mais ses mots, jusqu’à présent, n’ont pas suffi à calmer la base de son mouvement.”
Conséquences tragiques pour la Bolivie
Dans cette affaire, le quotidien bolivien PáginaSiete renvoie dos à dos les partisans d’Evo Morales et le gouvernement intérimaire. “La violence est des deux côtés”, dénonce le journal :
“Les deux camps ont la même mentalité autoritaire et antidémocratique, qui se traduit dans leurs actions comme dans leurs déclarations.”
Et, par conséquent, “les deux extrêmes du spectre politique sont les deux faces de la même monnaie.” Celle de la “politicaillerie” au détriment de la démocratie, conclut le journal.
Sabine Grandadam
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