La série noire a commencé le 27 mars avec l’arrestation du journaliste Yayesew Shimelis. La veille, celui qui anime une émission politique avait posté un message sur les réseaux sociaux affirmant que le gouvernement se préparait à enterrer 200 000 personnes dans le cadre de la pandémie de Covid-19. Fermement démenti par les autorités, le message est rapidement retiré et le journaliste présente ses excuses, mais il est arrêté dans la foulée et détenu trois semaines sans qu’aucune charge ne soit retenue contre lui.
Le 21 avril,l’Addis Standard rapporte que les tribunaux ont ordonné sa libération par trois fois, sans effet. Déboutées par la justice alors qu’elles tentaient de l’inculper pour terrorisme, les autorités l’accusent désormais d’avoir enfreint une récente loi contre “les discours de haine” et la “désinformation”. Dans un long billet publié sur le site Ethiopia Insight, le spécialiste du droit des médias Yohannes Eneyew Ayalew s’interroge sur le bien-fondé de l’utilisation de cette loi dans le contexte de la pandémie de Covid-19.
Multiples atteintes à la liberté d’expression
Plus tranchés, le Committee to Protect Journalists et Human Rights Watch (HRW) dénoncent les charges et mettent en garde contre l’instrumentalisation de l’arsenal juridique à des fins politiques. HRW dénonce également l’arrestation, début avril, de l’avocate Elizabeth Kebede. Relâchée depuis, elle était accusée d’avoir “disséminé des fake news” susceptibles de “susciter des violences” après avoir dévoilé le nom de personnes présumées infectées par le coronavirus sur Facebook, selon l’Ethiopian Women Lawyer Association, dont elle est membre.
Le 25 avril, l’ancien journaliste devenu leader du parti d’opposition Balderas for True Democracy Eskinder Nega est détenu à son tour alors qu’il rend visite à des habitants de la capitale, Addis-Abeba, mis à la rue après la destruction de leurs habitations jugées illégales par les autorités. Accusé d’avoir enfreint l’état d’urgence, qui interdit les rassemblements de plus de quatre personnes, d’après l’Addis Standard, il est relâché au bout de douze heures.
Instrumentalisation de la pandémie
En février 2018, Eskinder Nega était l’un des quelque 700 prisonniers politiques relâchés au début de la “détente” poursuivie depuis par l’actuel Premier ministre,, Abiy Ahmed. Récompensé par un prix Nobel de la paix en 2019 2019 pour son travail de réconciliation avec l’Érythrée, il est à l’initiative d’une série de réformes politiques et économiques visant à ouvrir le pays et à apaiser les tensions ethniques. Deux ans après son arrivée au pouvoir et alors que des affrontements ont fait 86 morts à l’automne dernier, la stabilité politique semble à nouveau menacée.
“Le laxisme dont le gouvernement fait preuve dans la mise en œuvre de l’état d’urgence décrété par ses soins […] trouve ses limites quand il s’agit de s’attaquer aux critiques”, écrivait ainsi l’Addis Standard le 11 mai. En plus de la détention de figures connues, le journal s’inquiète de la multiplication des arrestations arbitraires à travers le pays, sur fond de tensions politico-ethniques.. Le 8 mai, Ethiopia Insight signalait ainsi une vague de répression à l’œuvre dans la zone Sidama, dans le sud du pays.
Annoncé fin mars, le report des élections générales, initialement prévues en août, pour raisons sanitaires, ajoute à la tension en ouvrant la voie à une crise constitutionnelle. En l’état, aucune base légale ne légitime en effet la prolongation du mandat de l’actuelle législature, qui expire à l’automne. Dans ce contexte tendu, “l’opposition et le Premier ministre s’accusent mutuellement d’instrumentaliser la pandémie pour s’arroger le pouvoir”, résume Voice of America.
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Mathilde Boussion
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