La question qui restera sans aucun doute au centre de l’analyse est de savoir pourquoi ces révélations d’actes violents misogynes ont fait irruption dans l’espace public précisément aujourd’hui : quelle rencontre de facteurs a permis de créer l’un de ces rares moments où des structures sociales patriarcales, – habituellement cachées, normalisées, et dont l’acte de dévoilement expose à l’opprobre, – ont été révélées de manière soudaine et avec force. Certains prétendent que ces processus sont comparables à ceux à l’œuvre dans les années 1960, lorsque les femmes du monde occidental ont réclamé plus de liberté et d’autonomie personnelle, y compris dans le domaine de la sexualité, et gagné des droits dans le domaine de la procréation, tels que l’accès généralisé et gratuit à la contraception ou le droit à un pouvoir de décision sur son propre corps.
#metoo. Le harcèlement sexuel à travers le prisme du néolibéralisme.
Plus qu’auraient jamais pu le faire des hommes en position de pouvoir, le mouvement #metoo a révélé avec succès l’essence même de la structure du patriarcat et de son fonctionnement, ainsi que toutes les inégalités et les antagonismes que celui-ci sous-tend, permet et normalise.
Non à aucun patriarcat : à l’ère du « marché libre » néolibéral mondial, lequel représenterait l’unique voie possible et la nature authentique de la sphère humaine, il y a une forte tendance à mettre aux manettes du pouvoir exécutif des représentants terriblement infantiles et violents de la « masculinité ». Tout le monde, – de quelque genre qu’on soit, – est victime de ce type de patriarcat moderne. Combien d’adultes développés émotionnellement et sexuellement souffrent de la tyrannie de tels « patrons », chefs politiques ou encore chefs religieux ?
Il ne fait aucun doute que les femmes de Slovénie ont traversé toute la gamme d’épreuves auxquelles les femmes du monde anglo-saxon ont réagi en s’exprimant publiquement. La question est de savoir comment les femmes slovènes intériorisent et normalisent cette violence qu’elles subissent du fait simplement qu’elles sont des femmes. Nous pouvons affirmer avec certitude que l’expérience du harcèlement sexuel est universelle, que pratiquement toutes les femmes l’ont vécue d’une manière ou d’une autre, – indépendamment de leur statut social, leur âge, leur type d’emploi, leur affiliation politique ou leurs convictions, et qu’elles soient célibataires ou mariées. Lorsque la Society for Nonviolent Communication et SOS-Phone ont récemment invité publiquement les personnes ayant participé à la consultation sur la violence contre les femmes à lever leurs pancartes #metoo si elles avaient déjà été victimes de harcèlement sexuel, la plupart des participantes ont brandi leur pancarte dans la salle pleine à craquer du hall Kosovel de Cankarjev Dom.
Nika Kovač
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