En début de semaine, Público publiait un éditorial au vitriol, intitulé “Un thatchérisme à visage socialiste”. La directrice adjointe du quotidien y dénonçait la manière dont le gouvernement venait d’enrayer une grève des transporteurs de carburant.
Invoquant le chaos à venir, l’exécutif socialiste a réquisitionné une partie des grévistes, présentés comme “des monstres”, et même appelé l’armée à la rescousse.
La journaliste concluait :
“La principale victime de tout ce processus aura été le droit de grève. Plus rien ne sera désormais comme avant. Les grèves des secteurs vitaux – médecins, infirmières, transports publics – peuvent être en voie d’extinction.”
Grand favori des législatives, le PS reste inflexible
Depuis, le personnel de bord de Ryanair s’est également mis en grève, jusqu’au dimanche 25 août. La réponse gouvernementale n’a pas tardé : des services minimaux ont été décrétés, des grévistes peuvent donc de nouveau être réquisitionnés. Les infirmiers avaient déjà connu le même sort en février dernier.
Jamais un gouvernement n’avait autant eu recours à ce procédé. Annoncé grand favori des prochaines élections législatives du 6 octobre, le gouvernement PS d’António Costa, accusé aujourd’hui de défendre les intérêts des patrons, reste impassible. Aussi la presse s’interroge-t-elle : le droit de grève est-il menacé ?
“Bien sûr que non”, répond le directeur d’Expresso. Même si sa gestion des mouvements sociaux est critiquable, le Premier ministre Costa ne peut être comparé à la Dame de fer Margaret Thatcher face aux mineurs britanniques :
“Les grèves resteront ce qu’elles ont été, et les évocations historiques qui surgissent actuellement sont aussi tirées par les cheveux qu’elles sont fausses.”
“Une offrande pour l’opposition”
Pour Sebastião Bugalho, éditorialiste du site libéral Observador, le Premier ministre s’enhardit de “la complaisance des médias” pour s’autoriser “une telle démonstration d’autoritarisme et d’audace” face aux grévistes. La législature socialiste, finalement, serait du pain bénit pour l’opposition :
“Au cours de ces quatre années, Costa s’est permis tout ce que la droite n’aurait jamais osé faire, ce qui soulève une question simple : qu’est-ce que le PS pourra bien dire contre un futur gouvernement de centre droit ?”
Sa consœur Helena Pereira abonde ce matin dans un autre article de Público. Lorsqu’ils reviendront au pouvoir, les sociaux-démocrates du PSD, principal parti d’opposition, ne manqueront pas d’“invoquer ce qui s’est passé ces derniers jours […] pour saboter de nouvelles grèves. On prend les paris ?”
Vincent Barros
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