Cette fois, les pourparlers de paix sur le Yémen devraient bien avoir lieu. “Trois mois seulement après l’échec spectaculaire d’un précédent cycle en septembre, lorsque les houthistes avaient refusé de se présenter”, rappelle Al-Jazira, une délégation de la rébellion est arrivée à Stockholm, tard mardi 4 décembre, aux côtés du médiateur de l’ONU Martin Griffiths. Ils ont été rejoints mercredi dans la capitale suédoise par une délégation du gouvernement yéménite, pour des négociations qui doivent débuter jeudi sous l’égide des Nations unies. L’Arabie Saoudite, les Émirats arabes unis – qui soutiennent le pouvoir yéménite – et l’Iran – qui appuie l’opposition houthiste – “ne sont pas invités”, précise la chaîne.
Les dernières discussions entre les belligérants ont eu lieu en 2016. L’année précédente, Riyad et Abou Dhabi avaient lancé une offensive au Yémen pour rétablir le président Abd Rabbo Mansour Hadi après la prise de contrôle de la capitale Sanaa par les houthistes. “Depuis, le conflit a fait des dizaines de milliers de morts et plus de 8 millions de personnes ont été victimes de la famine. Les Nations unies ont prévenu que ce chiffre pourrait s’élever à 14 millions”, inventorie la télévision qatarie dans un autre article.
“Une lueur d’espoir”
La paix est-elle aujourd’hui “à portée de main ?” se demande Al-Jazira. La chaîne fait le choix d’y croire : “Après près de quatre ans de combats, les deux camps paraissent prêts à mettre fin au conflit. Ce pourrait être la meilleure chance de paix jusqu’ici”, estime-t-elle, ajoutant que “l’assassinat du journaliste saoudien Jamal Khashoggi a accru la pression sur le royaume pour mettre fin à sa campagne militaire au Yémen.” L’observateur permanent du Comité international de la Croix-Rouge auprès des Nations unies, Robert Mardini, se veut lui aussi optimiste. “Les pourparlers de paix sont une lueur d’espoir que nous n’avons pas vue depuis très longtemps dans cette guerre”, déclare-t-il auTelegraph.
La correspondante au Moyen-Orient du quotidien britannique est plus circonspecte. “L’une des suggestions les plus épineuses que l’ONU proposera est que les rebelles remettent Hodeïda – qui gère 80 % de toutes les importations et de l’aide alimentaire – à une sorte d’administration des Nations unies.” Mais, écrit-elle, “les analystes ont dit qu’il était peu probable que les houthistes acceptent de se retirer du territoire ou de déposer les armes dans cette ville donnant sur la mer Rouge, prix pour lequel les rebelles combattent durement. Et l’administration du président en exil Abd Rabbo Mansour Hadi est tout aussi peu susceptible d’accepter un accord de partage du pouvoir qui accorderait aux houthistes un rôle plus important dans le gouvernement, ce qui était l’un des objectifs originaux de la rébellion.”
“Les enfants continueront à mourir et mourir de faim”
Le Guardian est lui franchement pessimiste. Le Yémen est, pour les marchands d’armes, “un souk rentable”. Et pour les Saoudiens voisins, “un champ de bataille dans une guerre régionale par procuration avec l’Iran”, liste-t-il. Or, “pour le prince Mohammed ben Salmane, un arrêt forcé et non concluant de la guerre qu’il a lancée en 2015 serait un autre revers personnel majeur, s’ajoutant à la catastrophe de Khashoggi, à l’échec stratégique en Syrie (où l’Iran et ses alliés triomphent) et à la dégringolade récente des relations avec la Turquie, le Liban et l’UE. À l’intérieur du pays, sa place, déjà affaiblie, pourrait être fatalement compromise”.
“La guerre d’usure obsessionnelle (du président américain Donald) Trump contre l’Iran, qui partage une partie de la responsabilité pour le Yémen, rend également moins probable que Téhéran pousse ses alliés houthistes à faire la paix, poursuit le journal. Conclusion ? Alors que les puissances étrangères encerclent comme des faucons prédateurs les terres anéanties du Yémen, se disputant l’avantage, les enfants continueront à mourir et mourir de faim. Encore une semaine de retard avant un cessez-le-feu ? Ça fait sept fois 77 cadavres. Deux semaines ? Le double. Faites le calcul.”
Courrier International
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