Ce soir dans sa ville du Blanc-Mesnil (Seine-Saint-Denis), Marie-Georg Buffet lance sa campagne pour la présidentielle. Le prochain grand rendez-vous sera au Zénith de Paris, pour un meeting, le 23 janvier. Dan Libération, la candidate, qui s’est mise en congé de ses fonctions de secrétaire nationale du PCF remplacée par un collectif de cinq dirigeants , explique comment elle entend œuvrer à « une majorité neuve à gauche ».
Les conditions de votre désignation font que vous n’êtes pas la candidate des collectifs unitaires. Comment espérez-vous rassembler la gauche antilibérale ?
Il n’y aura pas d’OPA sur les collectifs. Tout le monde fait le constat qu’il n’y a pas eu d’accord politique sur une candidature commune. Je pars donc en campagne pour faire exister cette gauche populaire et antilibérale, et créer une dynamique permettant une nouvelle majorité à gauche avec une ambition gouvernementale. On ne peut pas entrer en campagne au mois de mars ! J’ai pris mes responsabilités à partir du choix des collectifs locaux en faveur de ma candidature. J’ai tenu ma promesse : [depuis hier] je ne suis plus la secrétaire nationale du PCF. Je vais mettre en place un conseil de campagne avec tous ceux et celles qui veulent participer à cette bataille, quelle que soit leur sensibilité à gauche. Ensuite les collectifs locaux décideront chacun de la façon dont ils veulent s’inscrire ou non dans la campagne. Et partout nous créerons des comités de soutien pour ma candidature qui n’est pas la candidature du rassemblement antilibéral, mais une candidature de rassemblement.
Reprendrez-vous à votre compte les 125 propositions du programme antilibéral ?
Ces propositions sont un bien commun. Beaucoup sont d’ailleurs dans le programme du PCF. Je compte accorder une importance particulière sur quatre axes : relever les défis de la planète ; garantir les droits qui permettent de vivre ; promouvoir une société solidaire d’échange et de coopération et éradiquer toutes les discriminations. Pour cela, je propose des moyens pour les réaliser, parmi lesquels une réforme de la fiscalité, des moyens démocratiques la VIe République , ou encore la reconquête d’un grand secteur démocratisé des services publics. Ce point nécessite d’appliquer enfin le vote des Français du 29 mai 2005, et d’entrer en conflit avec l’orientation actuelle de l’Union européenne.
Les militants unitaires du PCF très déçus ne vont-ils pas vous manquer pour porter votre candidature ?
Tous les communistes sont unitaires et tous sont déçus ! Moi la première parce que je pense qu’on aurait pu aboutir. Mais je n’ai pas fait une croix dessus, on peut encore se mettre d’accord pour les législatives.
Redoutez-vous une candidature de José Bové ?
Ce n’est pas à moi de la redouter, mais toute la gauche antilibérale pourrait redouter plus de divisions encore.
N’êtes-vous pas passés d’un rassemblement avec le PCF comme force principale à un rassemblement autour du PCF ?
Non, ce n’est pas notre choix. Nous ne voulons pas un rassemblement autour du PCF mais continuer à être dans ce rassemblement. Je ne ferai rien dans cette campagne qui porte atteinte à ce qui s’est construit, j’y tiens comme à la prunelle de mes yeux. Nous n’avons jamais mis aucun préalable contrairement à d’autres avec cette pétition « tout sauf Buffet ». Car c’est un débat de fond sur la place des partis, sur l’objectif de ce rassemblement : pour moi il s’agit de contribuer à une majorité neuve à gauche, ce n’est pas une recomposition de la gauche de la gauche ou la constitution d’une nouvelle force politique. Il faut qu’on arrête de se regarder tous le nombril ! On est à quatre mois d’une élection présidentielle et pas n’importe laquelle : ou c’est le social-libéralisme qui l’emporte avec Ségolène Royal, ou ce pays est emporté avec la droite de Sarkozy, une droite atlantiste et communautariste. L’urgence, c’est de dire à ceux qui souffrent qu’il y a une perspective nouvelle à gauche pour que, cette fois, elle réussisse.
Vous parlez d’une majorité neuve à gauche. La voyez-vous avec Ségolène Royal ?
Le programme qu’elle porte aujourd’hui n’est pas en capacité de mettre en œuvre les réformes permettant aux gens de vivre mieux dans ce pays. Parce qu’il ne pose pas la question des moyens financiers ni de l’Europe. Il faut donc créer à gauche une nouvelle majorité qui permette de porter un programme antilibéral. Cela ne passe pas par la disparition des forces qui existent. Les hommes et les femmes de gauche n’attendent pas qu’on leur dise : « Mon ambition c’est de faire un score honorable... » Cela ne les intéresse pas. Moi, j’ai l’espoir et l’ambition qu’avec ma candidature les Françaises et les Français bousculent la gauche et se donnent les moyens d’une majorité et d’un gouvernement qui change vraiment les choses.
Pensez-vous qu’il existe deux gauches, l’une de gouvernement, l’autre protestataire ?
On a essayé de nous enfermer dans l’alternative : soit on est avec le PS, soit avec l’extrême gauche. Depuis 2005, nous explorons une autre voie : nous voulons porter au gouvernement une politique radicale qui affronte le libéralisme, qui engage des réformes qui secouent vraiment, sur la redistribution de l’argent, le pouvoir des salariés dans l’entreprise, etc. C’est une gauche radicale de gouvernement que nous voulons.
Quand François Hollande dit que vous êtes la meilleure candidate qu’il puisse rêver, cela ne gêne-t-il pas votre démarche ?
Les petites phrases ne m’intéressent pas. Je crois que l’enjeu dans les semaines qui viennent, c’est d’arriver à donner à voir qu’une autre politique est possible à gauche.
Au second tour, vous vous désisterez pour Ségolène Royal ?
Moi je ne me trompe pas d’adversaire ; le plus grand danger, c’est la droite. Donc sans hésitation pour le candidat de gauche le mieux placé.