Comme d’habitude, ces textes paraîtront avec un certain retard. Mais à la lecture du projet de décret, pas de quoi être impatient : la France s’apprête à choisir les seuils les moins protecteurs possibles.
« La borne supérieure de l’intervalle »
Citons la CRIIRAD, qui en 2016 avait appelé à se mobiliser contre ce texte : « la directive 2013-59-Euratom a défini des intervalles dans lesquels les États membres doivent choisir leurs niveaux de référence : entre 20 mSv [milliSieverts] et 100 mSv maximum pour la phase d’urgence (qui peut durer typiquement de quelques jours à quelques mois) ; entre 1 mSv/an et 20 mSv/an maximum pour la phase post-accidentelle (qui commence à la fin de la phase d’urgence et peut persister sur des dizaines ou des centaines d’années, voire beaucoup plus). […] Les autorités françaises ont retenu la borne supérieure de l’intervalle : 100 mSv pour la phase d’urgence et 20 mSv pour les 12 mois suivants […] Rappelons qu’en situation normale, la limite maximale de dose applicable au public est de 1 mSv/an et que cette valeur correspond déjà à un niveau de risque élevé […]. Pour 20 % de la population vivant en zone contaminée et recevant une dose moyenne de 20 mSv, l’impact sanitaire attendu est de l’ordre de 30 000 morts ou équivalents. Ces chiffres devraient ensuite être multipliés par le nombre d’années d’exposition ».
Individualiser la gestion du risque
En prenant cette voie, la France ne fait qu’appliquer la stratégie du lobby nucléaire qui, s’attendant à ce que les accidents nucléaires se multiplient, prévoit de nous laisser nous débrouiller pour gérer la situation. La réglementation ne nous protégera pas, les obligations d’indemnisation des victimes par le pollueur seront quasiment inexistantes, il suffira de nous apprendre à vivre en zone contaminée ! C’est pour cette raison que le Centre d’étude sur l’évaluation de la protection dans le domaine nucléaire (CEPN), « association » dont les quatre seuls membres sont les principaux représentants de l’industrie nucléaire française (EDF, AREVA, le CEA et l’IRSN), a développé un programme visant à promouvoir le « développement durable en zone contaminée », expérimenté à Tchernobyl et Fukushima. Il s’agit d’individualiser la gestion du risque, en apprenant à adapter son mode de vie à la présence de la contamination radioactive, par exemple en contrôlant le niveau de rayonnement de son environnement, ou en sélectionnant les aliments les moins contaminés.
La mobilisation lancée par la CRIIRAD en 2016 (plus de 3 000 personnes avaient contribué à l’enquête publique sur le projet de décret) ne suffira pas, seule, à faire reculer le gouvernement.
Pour éviter le pire, battons-nous pour arrêter cette industrie mortifère !
Commission nationale écologie du NPA