D’après l’Unicef, un enfant meurt toutes les dix minutes au Yémen. De faim, de soif, du choléra, mais aussi sous les bombes de la coalition conduite depuis 2015 par l’Arabie saoudite. Onze millions de petits Yémenites ont besoin d’une aide humanitaire d’urgence.
Le prince Mohammed Ben Salman, nouvel homme fort du royaume wahhabite, voulait à travers la guerre au Yémen réaffirmer l’importance stratégique de l’Arabie saoudite face au terrorisme, face à l’Iran, face aux révolutions, dans cette région riche en pétrole et qui contrôle à travers le canal de Suez 30 % du commerce mondial. Mais la guerre s’embourbe, Daech et al Qaïda prospèrent, le blocus étrangle le pays, la catastrophe humanitaire se prolonge. Et la France en est l’un des fournisseurs officiels [1].
Arsenal français
Fournisseur des super canons Caesar de l’entreprise française Nexter, qui pilonnent le Yémen depuis sa frontière. Fournisseur en 2016 de 276 blindés légers de type Renault Sherpa light et Vab Mark 3 du groupe Renault Trucks Defense. Fournisseur, pour les avions de chasse saoudiens, des nacelles Thalès Damocles XF de désignation de cible et de guidage de bombes, qui ont servi entre autres à bombarder les hôpitaux de Médecins sans frontières, ce qui vaut à la coalition des accusations de crime de guerre ! Fournisseur trois mois après le début du conflit d’un avion ravitailleur en vol Airbus 330-200 MRTT. Fournisseur pendant le conflit d’hélicoptères de transport Cougar du groupe européen EADS et de drones de renseignement militaires SDTI de l’entreprise SAGEM. Fournisseur aux Émirats, alliés de Ryad dans la salle guerre du Yémen, de blindés Leclerc du français Nexter et de Mirages 2000-9 de Dassault. Les corvettes émiraties Baynunah, qui assurent le blocus, ont été construites en partenariat avec les Constructions mécaniques de Normandie. Et lorsque ces navires ont été en maintenance en mars 2016, ce sont les navires français qui ont directement, selon la Lettre de l’Océan indien, assuré la continuité du blocus.
Soutien logistique
Pour contourner les pressions contre la vente d’armes aux belligérants, selon la revue Orient XXI, « le gouvernement français aurait détourné un contrat destiné au Liban pour préparer la guerre au Yémen ». Le contrat Donas de vente d’armes françaises au Liban, d’un montant de 3 milliards d’euros, financé par l’Arabie saoudite, aurait ainsi servi à armer Ryad.
Et la France ne joue pas seulement un rôle de marchand d’armes. Dès le début de la guerre, les avions français ont fait des vols de reconnaissance au dessus des positions des rebelles houthis. La Direction du renseignement militaire a fourni à Ryad les images de très haute qualité de ses satellites espions Pléiades et Hélios, là où les images étatsuniennes sont fournies en qualité dégradée. La lettre Intelligence Online nous en donne la raison : Paris veut faire de ces images satellites une vitrine commerciale « pour des satellites qu’ils espèrent vendre à l’état-major saoudien ». La base française de Djibouti, avec ses 1 700 militaires, qui n’est qu’à 30 km des côtes du Yémen, joue un rôle important dans ce dispositif.
L’État français est complice de crimes de guerre au Yémen, pour vendre ses machines de mort, protéger les intérêts gaziers de Total, dans l’espoir illusoire d’y faire régner l’ordre impérial.
Frank Cantaloup