Pour le gouvernement chinois, le manque de confiance et le non-respect des règles coûtent des centaines de milliards à l’économie. Pour y remédier, il a un plan. Dans un document truffé de jargon publié en 2014, le conseil des affaires d’Etat chinois, qui tient lieu de gouvernement, traçait les grandes lignes d’un projet visant à développer les « crédits sociaux ». En clair, noter les entreprises et les individus, selon une multitude de critères, afin d’améliorer leurs comportements, pour faire régner la confiance dans une société d’honnêtes gens…
Ce plan commence à prendre forme à mesure que les projets pilotes se multiplient à travers la Chine. Il en existe une trentaine actuellement. Que signifie ce concept ? « Pour les entreprises, il s’agit de vérifier, par exemple, si elles remboursent à temps leurs emprunts, si elles respectent telle régulation ou tel objectif fixés par le gouvernement ? », explique Mareike Ohlberg, analyste pour le Mercator Institute for China Studies (Merics), un institut de recherche indépendant sis à Berlin, qui a publié une note sur le sujet le 24 mai.
« Pour les particuliers, c’est un tout autre niveau, avec une foultitude de critères, qui vont de votre comportement dans les transports publics au fait que vous rendiez visite à vos parents. Beaucoup d’indicateurs pouvant influencer la note des individus sont actuellement testés dans différentes villes », poursuit la chercheuse.
Mieux réguler en intervenant moins
De ces notes pourrait dépendre l’accès des Chinois aux transports publics (une liste noire des passagers est déjà en place pour les trains), aux logements sociaux, peut-être aussi aux emplois ou aux contrats publics pour les entreprises.
Globalement, l’objectif est d’améliorer l’application des règles, d’empêcher les fraudeurs de passer à travers les mailles du filet, avec la volonté de mieux réguler en intervenant moins. Le texte de 2014 promet notamment que ce système permettra de « réduire les coûts des transactions et prévenir les risques économiques, un besoin urgent afin de réduire les interférences gouvernementales dans l’économie et de parfaire le système d’économie socialiste de marché ».
Officiellement, le projet prévoit d’unifier le plus d’informations possibles dans une ou plusieurs bases de données d’ici à 2020.
« Personnellement, je doute qu’ils arrivent si loin, explique Mareike Ohlberg. Ils ont mis en place beaucoup de projets, de nouvelles règles localement, mais les problèmes de qualité des données, des statistiques et de travail en commun entre différentes administrations restent importants. »
Simon Leplâtre (Shanghaï, correpondance)