Décryptage du plan pour l’élevage : Trois milliards sans véritables solutions
04.09.2015 De nouvelles mesures ont été annoncées hier par Manuel Valls, sur commande de Xavier Beulin, patron de multinationale agro-alimentaire. Les milliers de paysans venus manifester à Paris n’ont d’ailleurs pas été dupes de ce tour de passe-passe qui ne sauvera que ce système qui les broie, pas eux. Décryptage.
• La « modernisation », sorte d’incantation permanente déconnectée des réalités, représente un tiers de ce plan : investir à tout prix, quels que soient les risques de surendettement et les conséquences sur l’emploi agricole et agro-alimentaire.
• On notera que cette partie du plan a été confiée à Pierre Pringuet, membre du Conseil d’administration du groupe Avril (ex-Sofiprotéol), et ancien président du comité Sully (cercle de promotion de l’industrie agro-alimentaire) dont il a transmis les manettes à Xavier Beulin en janvier.
• L’appel à des « prix rémunérateurs » n’est encore qu’une accumulation de vœux pieux sans mesure concrète qui permette réellement de faire remonter les prix.
• Allègements et baisses de charges ne sont que des mesures d’urgence dont il faut espérer qu’elles ne remettent pas en cause les mécanismes essentiels de solidarité sociale.
• Les mesures de désendettement sont utiles pour les trésoreries mais ne résolvent rien tant que le système et les pouvoirs publics encouragent encore à l’investissement comme c’est le cas ici. Il ne s’agit que de désendetter pour réendetter !
• Sans aller jusqu’au moratoire demandé, la simplification des normes environnementales est tout de même à l’ordre du jour. Même si la règlementation n’est pas toujours bien faite, il ne faudrait tout de même pas perdre de vue que la nature est le socle de travail des paysans et doit être préservée pour les générations à venir !
Il n’y a donc rien ici pour redonner un avenir aux paysans. Pour sortir les éleveurs de la crise, la balle est désormais entre les mains des ministres de l’Agriculture de l’Union européenne qui se réunissent lundi. Le relèvement des prix d’intervention est indispensable et pourrait être obtenu mais il doit s’accompagner de mesures de régulation, qui n’ont pas été évoquées hier…
La Confédération paysanne manifestera avec la Coordination européenne Via Campesina et aux côtés de l’European Milk Board devant le Conseil européen lundi à 11h.
Crise de l’élevage : Le gouvernement à la botte de la FNSEA
03.09.2015 A l’issue d’un rendez-vous avec Xavier Beulin, alors que la FNSEA* a sorti l’artillerie lourde, Manuel Valls vient d’offrir les 3 milliards demandés pour un véritable plan de licenciement des éleveurs. Le gouvernement fait donc d’une pierre deux coups, balayant le pluralisme syndical en même temps que l’avenir des paysans.
Globalement, ces mesures sont une (grosse) rallonge du plan de cet été. Plus d’argent donc, mais toujours pas pour les paysans. Modernisation et investissement sont au cœur de la mise sous perfusion d’un système périmé et destructeur où les exploitations doivent être de plus en plus grosses et avec de moins en moins de paysans. Il serait pourtant temps de parler régulation, relocalisation, mise en adéquation de la production avec la demande… Et cela ne nécessite pas d’invoquer des milliards, juste de réorienter les aides !
Aujourd’hui, les paysans ont été invités à un marché de dupes. Pendant qu’ils se battent face à la crise, leur président, accessoirement patron d’agro-industrie, négocie leur licenciement massif ! Ils réclament du revenu, on leur offre un plan qui, sous prétexte de compétitivité, fait tout pour faire baisser les prix !
Cependant, alors que le gouvernement français reste bloqué sur la ligne FNSEA*, le vent tourne dans nombre de pays d’Europe. Même le ministre libéral anglais de l’Agriculture réclame des mesures de régulation de la production ! Le 7 septembre, les ministres de l’Agriculture de l’Union européenne auront donc la possibilité de prendre de véritables mesures d’urgence. Mais le relèvement des prix d’intervention et les mesures de stockage doivent s’accompagner d’une maîtrise de la production pour ne pas continuer à laisser saturer le marché.