Ces derniers jours ont vu une intensification des combats entre milices kurdes, des comités de protection du peuple kurde (YPG), branche armée du Parti de l’union démocratique (PYD) qui est l’émanation syrienne du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), et des groupes islamistes, du Front al-Nusra et de l’État islamique en Irak et au Levant (EIIL), dans la région du Nord Est de la Syrie, dans laquelle la population Kurde est majoritaire. Cette région de la Syrie est également stratégique care riche en pétrole et sert également de point de passage entre la Syrie et la Turquie où toutes sortes de biens, dont des armes, et hommes transitent. Les forces d’Assad se sont retirées il y a un an, le 19 juillet 2012, de neuf villes à majorité kurde. Le PYD contrôle la plupart des régions kurdes en dehors la ville de Qamishli contrôlée par le régime et quelques villes mixtes dans les provinces de Hasaka et à Alep.
Les sections de l’ASL sont divisées dans ces combats selon les affinités et dynamiques locales. Certains combattent aux côtés des islamistes, mais d’autres se joignent aux milices kurdes et dénoncent les exactions commises par les groupes islamistes contre les populations locales : arabes, kurdes et autres.
Dans la province de Raqqa, la ville de Tall Abiad a d’ailleurs vu naître la formation du bataillon « Chirko Ayoubi » lequel a rejoint la brigade du Front Kurde. Ils ont publié une déclaration commune dénonçant les exactions commises par les groupes islamistes et les tentatives de divisions du peuple syrien sur des bases ethniques et communautaires [1]
L’état-major de l’ASL et l’opposition syrienne ont appelé les différents groupes de l’ASL à ne pas se laisser entraîner dans ces combats secondaires. Dans un communiqué commun publié le 18 juillet, ils condamnent les «combats entre frères » avant de les mettre en garde de ne pas tomber dans le piège des affrontements internes suscités par le régime assassin de Bachar el-Assad.
Quelques jours plus tard, le général Salim Idris, chef du Conseil militaire suprême de l’opposition syrienne, a déclaré à Istanbul que l’opposition ne reconnaîtra jamais un Etat kurde dans le nord de la Syrie – accusant particulièrement le PYD de vouloir une telle chose – et a souligné que lASL se battrait contre tout groupe qui veut diviser la Syrie.
Il ne faut pas oublier également que les tensions entre les groupes de l’ASL et des forces islamistes du Front al-Nusra et EIIL, n’ont cessé de s’intensifier ces derniers mois. Ces derniers sont accusés d’avoir assassiné des membres de l’ALS, dont des Fadi al-Qash, le chef d’un bataillon de l’ALS et ses deux frères.
L’EIIL a aussi expulsé les forces de l’ASL de plusieurs régions libérées par ces dernières et a déclaré l’instauration d’émirats islamiques dans les localités sous son contrôle, tout en refusant d’aller combattre sur les lignes de front à Alep, Homs et Khan al Asal.
Abou Oussama al-Tunisi, le chef de l’EIIL en Syrie, a affiché les noms de membres de l’ASL recherchés par le groupe sur les portes des mosquées à Dana et Dar Azza, près du poste de Bab al-Hawa frontière turque. Al Tunisi a ordonné à tous les membres FSA dans les zones sous son contrôle de déclarer leur allégeance à l’EIIL et de remettre leurs armes.
Les manifestations populaires dans les villes libérées de Syrie se continuent à se multiplier néanmoins contre les groupes islamistes réactionnaires et leurs comportements autoritaires, comme à Dana ou l’EIIL avait une présence par exemple [2]
Pour revenir à la région du Nord Est de la Syrie, les islamistes n’ont pas hésités dans les régions sous leurs contrôles à imposer leur interprétation réactionnaire de l’Islam, comme en imposant le « Jeûne » pendant le ramadan, menaçaient les femmes qui ne portaient pas le foulard islamique et imposaient leur interprétation de la Sharia, sans se soucier à aucun moment de la diversité culturelle et autre des populations locales. Les groupes islamistes ont également enlevés à plusieurs reprises des civils, surtout kurdes comme le 18 juillet ou ils ont enlevés 19 étudiants kurdes.
Ces actions en plus de leur autoritarisme à pousser les populations locales à s’organiser contre leurs présences.
Les évènements se sont accélérés après l’attaque le 16 juillet des membres d’al-Nosra contre une patrouille de combattantes kurdes dans la ville de Ras al Ain.
La réponse des milices Kurdes de l’YPG ne s’est pas fait attendre et plusieurs villes dans cette région ont été maintenant libérées des forces islamistes, après des combats intenses et meurtriers faisant plus d’une cinquantaine de mort.
Les groupes islamistes ont notamment perdu la ville de Sere Kanya dans la province de Hassake, qui était un point de passage important pour la Turquie au profit de l’YPG. Les groupes islamistes n’ont pas hésité de bombarder la ville de manière totalement aveugle à l’aide d’obus de mortier, conduisant à l’exode en masse des locaux et particulièrement parmi les habitants des quartiers de Mahata et Ebra.
Les combats, qui continuent à l’écriture de cet article, se sont poursuivis dans la région à l’est de la ville de Qamichli, où se trouvent de nombreux puits pétroliers et donc d’une importance primordiale. Les groupes islamistes ont d’ailleurs bénéficiés des revenus de champs pétroliers qui s’y trouvent, en vendant même du pétrole au régime d’Assad. Les combats entre le YPG et les groupes islamistes pour le contrôle de ces champs pétroliers se poursuivent.
Ces derniers jours, des combats intenses ont eu lieu dans la ville de Tell Abyad, également un ville trans-frontalière importante entre la Turquie et la Syrie, à la suite de l’enlèvement par les groupes islamistes des centaines de civils kurdes.
Le PYD a proposé la mis en place Conseil indépendant temporaire pour gérer le Kurdistan occidental (Nord Est de la Syrie) jusqu’à la fin de la guerre en Syrie pour répondre aux besoins de la population locale, améliorer l’économie et faire face aux attaques du régime Assad, des islamistes et des Turcs. Les modalités du plan proposent la formation d’une administration intérimaire dans les trois mois, un référendum sur un projet de constitution et des élections législatives dans les six mois, mais cette initiative entreprise sans consultation des autres acteurs de la scène politique kurde ne fait pas encore l’unanimité. L’administration intérimaire remplacerait le Conseil suprême kurde, qui est censé géré entre les diverses parties Kurde les régions sous son contrôle, pour mettre fin à ces différences et suivrait la suggestion de M. Barzani, homme fort du Kurdistan Irakien, d’organiser des élections. Le Conseil populaire de l’Ouest Kurdistan déjà publié un projet de constitution en ligne. Le Conseil Suprême Kurde, qui était censée gérer conjointement les régions kurdes entre le PYD et les différentes parties qui sont membres du Conseil National Kurde, a été un échec et a conduit à des affrontements entre les différents blocs kurdes.
De nombreux points sont néanmoins à débattre avant de trouver un accord, notamment partage du pouvoir politique et du contrôle des forces armées dans la région, le YPG proposant de se charger notamment de la sécurité et d’absorber dans ses rangs des autres miliciens, proposition refusée par les autres groupes.
Le Conseil National Kurde, rassemblement de diverses composantes politiques kurdes et fortement influencé par le clan Barzani du Kurdistan Irakien, a refusé à une seule entité politique kurde de décider du futur du peuple kurde sans aucune consultation des autres partenaires kurdes et en rappelant l’importance de l’unité des rangs kurdes dans cette période.
Le Conseil National Kurde a également réitéré l’importance de la collaboration et l’entente avec les forces révolutionnaires et de l’opposition nationale. Cela dit elle ne ferme pas la porte à une telle initiative si le besoin se ressentirait pour le peuple kurde de Syrie [3].
Il est nécessaire de rappeler que le PYD a fait face à une opposition croissante au sein de la population Kurde de Syrie et des activistes kurdes pro révolution pour leurs politiques autoritaires et collaboration avec le régime Assad à certaines reprises [4]. Le Conseil National Syrien a en effet refusé de condamner par le passé les actions de Jabhat al Nusra, et a même défendu par la voix de George Sabra le groupe, et son idéologie sectaire et réactionnaire.
Mais le lancement de la campagne «le Kurdistan occidentale pour ses enfants » par le PYD contre les attaques des groupes islamistes contre des villes majoritairement habité par des kurdes a néanmoins diminué les critiques envers ce dernier et réuni à nouveau de manière temporaire la scène politique kurde syrienne avec le soutien des autres groupes kurdes à cette campagne, tout en réitérant la nécessité au PYD de collaborer avec eux.
La Turquie n’a pas tardé à réagir aux développement proche de sa frontière par la voie du chef de la diplomatie turque Ahmet Davutoglu a mis en garde les Kurdes de Syrie contre toute velléité autonomiste, qui encouragerait les Kurdes de Turquie dans leurs aspirations nationales. La police turque a d’ailleurs réprimé une manifestation dans une ville kurde au sud de la Turquie qui fêtait la libération de plusieurs villes kurdes en Syrie des islamistes [5]. La Turquie favorise certains pans de l’opposition syrienne, notamment les forces islamistes et les forces bourgeoises opportunistes.
Syria Freedom Forever en tant que membre du Courant de la Gauche Révolutionnaire en Syrie réaffirme son engagement et soutien à l’auto détermination du peuple kurde en Syrie et ailleurs qui a subi les discriminations et répressions de tous les régimes de la région. Le soutien à l’auto-détermination du peuple Kurde ne nous empêche pas de souhaiter qu’il soit un partenaire à part entière dans le combat contre le régime criminel d’Assad, dont ils font partie depuis le début, et les forces réactionnaires islamistes, et dans la construction d’une future Syrie Démocratique, Socialiste et Laïque.
Nous condamnons également le comportement des forces réactionnaires islamistes et autres, et leurs tentatives racistes et communautaires de diviser le peuple syrien. De même le refus d’une partie de l’opposition Syrienne, dont le Conseil National Syrien (CNS), de reconnaître les droits du peuple Kurde en Syrie sont inacceptable et s’inscrivent dans les politiques nationalistes du régime Assad de ces 40 dernières années [6].
L’unité et l’indépendance des classes populaires et travailleuses sans distinction ethnique, communautaires et autres en Syrie et ailleurs est la seule voie pour sa libération et son émancipation.
Vive la révolution Syrienne et les peuples libres de Syrie.
Syria Freedom Forever