Les relations homosexuelles sont déjà passibles de prison à vie en Ouganda, mais cette législation, adoptée à une écrasante majorité le 20 décembre par le Parlement, interdit notamment toute « promotion » de l’homosexualité et rend obligatoire la dénonciation de quiconque s’affichant homosexuel(le).
En conséquence, les Pays-Bas ont décidé de suspendre une aide à l’Ouganda. Premier pays au monde à légaliser le mariage homosexuel, en 2001, les Pays-Bas ont gelé le versement d’une aide annuelle de 7 millions d’euros destinée au renforcement du système judiciaire ougandais.
L’OUGANDA REJETTE « L’IMPÉRIALISME » OCCIDENTAL
Les dispositions les plus controversées, prévoyant la peine de mort en cas de récidive, de rapport avec un mineur ou de rapport en se sachant porteur du virus du sida, ont été abandonnées, mais la loi reste très critiquée.
Elle a suscité des critiques virulentes, notamment de la part des Etats-Unis, allié-clé de Kampala, qui avaient récemment averti que l’entrée en vigueur de cette loi « compliquerait [ses] relations » avec Kampala. « Le projet de loi antihomosexualité en Ouganda, une fois promulgué, sera plus qu’un affront et un danger pour la communauté gay d’Ouganda. Ce sera un pas en arrière pour tous les Ougandais », avait souligné le président Barack Obama. « Personne ne devrait subir des discriminations, ou être puni pour qui on est ou qui on aime », a aujourd’hui déploré la conseillère de sécurité nationale du président américain, Susan Rice, sur son compte Twitter, ajoutant qu’il s’agit d’un « triste jour » pour ce pays et le monde entier.
Mais le président ougandais a assuré ne pas se laisser impressionner. « Les étrangers ne peuvent pas nous donner des ordres. C’est notre pays. [...] Ils doivent être avec nous, s’ils ne le veulent pas qu’ils gardent leur aide », a-t-il martelé après avoir paraphé la loi : « Je conseille aux amis occidentaux de ne pas faire [du sujet] un problème » car « ils ont beaucoup à perdre ».
« Imposer des valeurs sociales d’un groupe à notre société, c’est de l’impérialisme social. Maintenant, vous nous dites que nous devrions vivre comme vous. Pas du tout ! » a poursuivi M. Museveni, dont le gouvernement fait déjà l’objet de sévères critiques occidentales pour sa corruption endémique et le sort réservé aux homosexuels.
HOMOSEXUALITÉ « COMPORTEMENTALE, PAS GÉNÉTIQUE »
Le président ougandais, un chrétien évangélique au pouvoir depuis 1986, avait initialement indiqué qu’il ne promulguerait pas la loi antihomosexualité car il est « mal de punir une personne parce qu’elle est anormale », qualifiant les homosexuels de « malades ».
Il avait ensuite annoncé avoir changé d’avis après consultation d’un groupe de « scientifiques » qui lui ont assuré que l’homosexualité était « comportementale, pas génétique ». Lundi, il a également fustigé le sexe oral, pratique selon lui encouragée par le monde occidental. « La bouche sert à manger, elle n’est pas faite pour le sexe. Je veux mettre en garde nos enfants », a-t-il lancé.
M. Museveni avait déjà, au début de février, promulgué une loi antipornographie, interdisant notamment certaines manières de s’habiller « provocatrices », bannissant les artistes légèrement vêtus de la télévision ougandaise et surveillant de près les sites consultés par les internautes.
Les homosexuels sont l’objet de persécutions et de violences pouvant aller jusqu’au meurtre en Ouganda, pays où l’homophobie est largement propagée par les très influentes Eglises évangéliques. Le Prix Nobel de la paix sud-africain Desmond Tutu a jugé que cette loi rappelait les tentatives des nazis et du régime d’apartheid de « légiférer contre l’amour ».