Fin décembre, la centrale nucléaire du Blayais, en Gironde, a été touchée par la tempête et les inondations. L’alerte passée, les autorités tentent de minimiser la portée de l’accident. Il confirme pourtant la réalité du risque nucléaire.Dans la nuit du 27 au 28 décembre dernier, la centrale nucléaire du Blayais, près de Bordeaux, a dû arrêter en urgence ses réacteurs, les lignes à très haute tension étant renversées par la tempête, et les eaux de la Gironde inondant les bâtiments. Une semaine plus tard, l’affaire enfin connue, Sud-Ouest jugeait, dans sa livraison du 5 janvier, que l’on était passé « très près de l’accident majeur ». Le lendemain, le même quotidien citait le professeur de physique nucléaire J.-P. Dufour : « Je ne veux pas faire de catastrophisme. Mais un jour ou l’autre, il y aura une fusion d’un cur de centrale en France. Et ce sera autre chose à gérer que la forêt sinistrée. Les arbres, cela repousse ! » Une éventualité à laquelle le maire de Braud-et-Saint-Louis (où est implantée la centrale) répondait benoîtement « être en mesure d’évacuer les populations ». Pas de quoi nous rassurer.
Les autorités nucléaires ont dû admettre la gravité exceptionnelle de l’événement : « C’est la première fois que nous avons eu à gérer une situation dégradée aussi difficile », admet Jean-Louis Charrière, « patron » de la centrale ; de même, pour Jérôme Goellner, directeur adjoint de la DISN, « il s’agit de l’accident le plus grave depuis celui de Civaux (Vienne) » (Le Monde, 7 janvier). Il est vrai que le refroidissement des réacteurs a été menacé ce qui, si des mesures ne sont pas rapidement prises, peut conduire à leur fusion.
Les autorités nucléaires cherchent à minimiser la portée de l’accident. Le pire a été évité : n’est-ce pas la preuve que la situation est restée sous contrôle, que les mesures d’urgence ont pu être prises à temps et que les barrières de sécurité n’ont pas été brisées, bref que le système fonctionne ? Ainsi, Mme Griffon-Foucou (déléguée régionale EDF en Aquitaine) a d’emblée clos tout débat : « le nucléaire continuera de représenter un mode de production indispensable à l’indépendance énergétique française » (Ouest-France, 6 janvier).
Prévisible
Pourtant, l’essentiel n’est-il pas qu’une fois encore, ce qui était considéré impossible s’est bel et bien produit ? Le réseau à très haute tension n’a pas résisté à la vitesse des vents, ce qui a fragilisé le fonctionnement des centrales en plusieurs points du territoire. Celle de Blayais avait été construite pour faire face une crue « millénaire » de la Gironde. Pourtant, la conjonction de l’ouragan, de la marée et des pluies a provoqué une inondation d’ampleur « imprévue ». Les digues de protection ont été franchies par les eaux qui ont envahi l’ensemble du site, noyant les parties basses de nombreux bâtiments, interdisant momentanément toute intervention alors qu’une pompe de refroidissement était bloquée Par ailleurs, le ministère de l’Environnement n’a pas été alerté dans les temps, l’affaire restant entre les mains de la seule nucléocratie. La population attendra une semaine avant d’être informée par la presse régionale.
L’imprévu se reproduira. Un jour, une conjonction « impensable » d’événements ne laissera plus le temps d’intervenir ; l’accident nucléaire majeur ne pourra être évité. Si l’on ne sort pas avant du nucléaire.
* Par ici la sortie du nucléaire : le réseau « Sortir du nucléaire » vient de publier une brochure, fort joliment conçue, revenant sur les raisons et les modalités de l’abandon de l’énergie atomique. Passez commande auprès du réseau : 9, rue Dumenge, 69004 Lyon, tél. : 0478282922, fax : 0472077004, web : < www. sortirdunucleaire. org >