Etablie à Cotabato City, TRIPOD, une association partenaire d’Entraide et Fraternité, développe des activités dans le contexte des conflits entre, d’une part, les trois communautés (les Lumads, les Moros et les migrants chrétiens) qui peuplent l’île et les forces gouvernementales et le Front moro islamique de libération (MILF), d’autre part. Elle prend en charge l’accueil des populations déplacées suite aux conflits armés, résoud les conflits locaux de longue durée entre les trois communautés habitant l’île et forme les paysans à l’agriculture paysanne.
La pauvreté, une menace pour la paix
Bien sûr, faire rimer paix avec justice et développement est une tâche complexe, explique Yennah Torres, la directrice de cette ONG. Notre travail consiste à créer des ponts entre les communautés, à négocier des arrangements pacifiques aux conflits locaux grâce au dialogue et à la médiation. Un accord de paix, c’est bien plus qu’une simple signature au bas d’un bout de papier. Cela signifie le début de nouvelles relations intercommunautaires. Cela permet, par exemple, à des femmes Lumads de descendre au point d’eau à travers un village musulman sans crainte réciproque, d’acheter ou de vendre sur un marché qui est en zone chrétienne, de trouver du travail dans une autre zone que celle de leur communauté d’origine.
Pour garantir la paix, il faut aussi veiller à assurer une vie décente à tous, avec des projets particuliers dans le domaine agricole dans ces provinces pauvres de Mindanao.
Les femmes des trois communautés se rencontrent pour définir avec TRIPOD ce qui pourrait les aider à prendre des responsabilités dans leur vie quotidienne et vis-à-vis de leur famille. Bai Mangcong Palaca est un petit bout de femme. Elle habite Lomoyon, un petit village dans une région musulmane de Mindanao. Au milieu de son potager, elle nous explique comment TRIPOD a changé le cours de son existence, tout en ramassant les haricots qu’elle ira vendre au marché tout à l’heure. J’ai suivi un atelier organisé par TRIPOD dans lequel nous avons pu exprimer tous les problèmes que nous vivions : les conflits armés, nos faibles moyens de subsistance, …etc. Nous leur avons demandé de nous donner les moyens de mettre sur pied un projet pour gagner un peu d’argent.
Parmi la population musulmane, l’élevage des chèvres est très apprécié
Après une série de réunions, les femmes ont créé le PKML : l’Union des Femmes Moro, à Lomoyon. Objectif : créer des potagers et des élevages de chèvres. Cinq groupes de femmes ont été formés. Chaque groupe compte 10 à 15 membres. Des chèvres et des semences ont été réparties de manière égale entre les groupes. Celles qui élèvent des chèvres gardent les chevreaux de la première portée, puis confient la mère aux femmes suivantes selon un ordre établi. Celles qui cultivent doivent redistribuer des semences aux suivantes.
Perçues comme partie prenante de la vie économique de leurs communautés, elles participent aussi de ce fait au dialogue en échangeant entre elles et en faisant tomber les préjugés.