Le bilan ne cesse de s’alourdir après le passage, vendredi 8 novembre, du puissant typhon Haiyan sur les Philippines. Alors que les autorités évoquaient jusqu’à présent 10 000 victimes dans l’ensemble du pays, les Nations unies ont annoncé, lundi 11 novembre, qu’en réalité « près de 10 000 personnes ont été tuées » dans la seule ville de Tacloban et qu’il fallait « s’attendre au pire ». Pour l’instant, le bilan officiel est de 1 774 morts.
Si pas moins de 41 provinces ont été touchées par le typhon, cette ville de 220 000 habitants, située directement sur le trajet, est de loin la plus touchée. Les maisons sont totalement détruites et les cadavres en décomposition jonchent les ruelles dévastées.
De nombreux journalistes s’y étaient réfugiés pour couvrir l’arrivée du typhon et ont assisté à l’état de délabrement croissant de la ville, « les bâtiments défoncés et les arbres déracinés, le pillage généralisé et les cadavres qui se décomposent ».
La correspondante du Guardian, Kate Hodal, décrit une scène de chaos :
« Sur le chemin pour Tacloban, juste après un solitaire cercueil blanc aux poignées dorées, s’étend une masse de corps gonflés d’eau. Hommes, femmes, chats, chiens et cochons sont empilés là, contre une maison en pierre surmontée d’un toit de métal courbé vers le haut, comme un point d’interrogation. »
« Tout est détruit », a résumé le général américain Paul Kennedy, arrivé lundi sur l’île de Leyte, dont Tacloban est la capitale, avec environ 90 marines et deux avions C-130 remplis de vivres et de matériel, avant-garde d’une aide américaine qui devrait arriver au large de la zone sinistrée d’ici quarante-huit à soixante-douze heures.
Le Pentagone a ordonné au porte-avions George-Washington – qui transporte 5 000 marins et plus de 80 aéronefs – ainsi qu’à deux croiseurs et un destroyer de se rendre sur la zone. Une armada qui dispose d’une quinzaine d’hélicoptères MH-60 Seahawks.
BLINDÉS ET COUVRE-FEU CONTRE LES PILLAGES
Quelques jours après le passage du typhon, et alors que les survivants étaient livrés à eux-mêmes, des « pillards de la faim » ont commencé à dévaliser les magasins d’alimentation et d’électroménager. Le porte-parole de la défense civile locale, Reynaldo Balido, a indiqué à la chaîne de télévision ABS-CBN que la restauration de l’ordre à Tacloban était « l’une des priorités » des autorités.
« Nous voulons une équipe organisée pour ramasser les cadavres, apporter à manger et mettre fin aux pillages », a expliqué Joan Lumbre-Wilson, 54 ans, l’un des rescapés réunis autour d’un des rares centres d’aide de la ville.
Joan Madejas Opiniano, 40 ans, a survécu au cataclysme en se réfugiant dans un conteneur en plastique flottant sur les eaux. Elle raconte au Guardian :
« Avec mon fils, il ne nous reste plus que trois bidons d’eau. Les gens ont commencé à errer dans les rues, pénétrant dans les maisons pour voler des choses. Cela fait seulement trois jours. D’ici deux semaines, il sera impossible pour quiconque de survivre ici. »
En réaction à ces pillages, le gouvernement a annoncé le déploiement de quatre véhicules blindés et l’imposition d’un couvre-feu. Des centaines de soldats et de policiers ont déjà été envoyés sur place. « Nous les faisons circuler dans la ville pour montrer aux gens, en particulier ceux avec de mauvaises intentions, que les autorités sont de retour », a déclaré le ministre de l’intérieur, Mar Roxas.
CATASTROPHE NATIONALE
Face à ce qui s’apparente à la pire calamité ayant jamais frappé le pays, l’état de catastrophe nationale a été déclaré, alors que la majorité des rescapés n’ont plus ni eau, ni nourriture, ni médicaments, et les opérations des sauveteurs sont rendues d’autant plus difficiles que les routes, les aéroports et les ponts ont été détruits par la tempête ou sont recouverts de débris. Et pour rendre la situation plus compliquée, le pays se préparait, mardi, à l’arrivée d’une dépression tropicale.
Face à l’ampleur du cataclysme, en plus des Etats-Unis, plusieurs pays et organisations, dont l’Union européenne et l’ONU, ont proposé leur aide financière ou matérielle, qui pourrait être nécessaire pendant des années. Les humanitaires, dont plusieurs organisations ont appelé aux dons, espèrent une meilleure coopération que lors du tsunami en 2004. Plusieurs ONG, comme la Croix-Rouge britannique, avaient alors déploré la concurrence entre agences ou ONG, l’acheminement d’équipement ou de denrées inutiles et la difficulté à gérer les dotations financières.
* Le Monde.fr avec AFP, AP et Reuters | 11.11.2013 à 20h59 • Mis à jour le 12.11.2013 à 10h01.
Philippines : les secours peinent à atteindre les victimes du typhon
Les secours peinent encore à rejoindre, lundi 11 novembre, les villes et villages du centre des Philippines dévastés et inondés après le passage du supertyphon Haiyan, qui aurait fait plus de 10 000 morts. Des soldats ont été déployés pour prévenir les pillages à Tacloban, ville de 220 000 habitants qui a subi les plus gros dégâts.
Les Nations unies ont prévenu qu’il fallait « s’attendre au pire » pour le bilan final. John Ging, directeur des opérations du bureau de la coordination des affaires humanitaires de l’ONU, a également précisé que 660 000 personnes avaient dû quitter leur maison en raison de la tempête.
Trois jours après le passage dévastateur du typhon, les rescapés n’ont plus eau, ni nourriture, ni médicaments, et les opérations des sauveteurs sont rendues d’autant plus difficiles que les routes, les aéroports et les ponts ont été détruits par la tempête ou sont recouverts de débris.
Lundi, les Etats-Unis ont dépêché 90 militaires en renfort pour évaluer les besoins en matière d’aide d’urgence. Le corps des marines a également annoncé l’arrivée de quatre MV-22 Osprey, des appareils hybrides permettant de décoller comme un hélicoptère et d’atteindre, ainsi, des zones difficiles. Quatre avions de transport ont également décollé de la base des marines de Futenma, sur l’île d’Okinawa au Japon, à destination des zones sinistrées.
LES « PILLARDS DE LA FAIM »
Le journaliste d’Al-Jazira Wayne Hay a été l’un des premiers à se rendre sur place. Il a raconté que « les gens cherchent inlassablement leurs proches disparus et se mettent en quête de nourriture et d’eau, difficiles à trouver ». L’envoyé spécial de France Info rapporte qu’il « n’y a plus de toits, chaque maison un peu volumineuse a implosé de l’intérieur, il n’y a plus un arbre ». Celui de la BBC parle « d’un nombre très important de morts un peu partout, beaucoup de destruction ».
« Je n’ai jamais rien traqué de tel, a pour sa part raconté James Reynolds, un chasseur de tempêtes qui était sur place au moment de l’arrivée d’Haiyan. C’est absolument hors catégorie à la fois en raison de la puissance de la tempête et de l’étendue de la tragédie humaine. »
La ville est livrée aux « pillards de la faim » qui ont dévalisé les magasins d’alimentation et attaqué un convoi de la Croix-Rouge. Des rescapés ont également vu des bandes piller des boutiques d’électroménager. Un journaliste de Reuters a pu recueillir des témoignages d’habitants, dimanche. « Les gens marchent comme des zombies à la recherche de nourriture », explique Jenny Chu, un étudiant en médecine, « c’est comme dans un film ».
Le porte-parole de la défense civile, Reynaldo Balido, a indiqué à la chaîne de télévision ABS-CBN que la restauration de l’ordre à Tacloban était « l’une des priorités » des autorités. 469 policiers ont été dépêchés sur place et le porte-parole de l’armée, Ramon Zagala, a confirmé l’envoi de 100 soldats pour des missions de maintien de l’ordre à Tacloban
TEST POUR LE PRÉSIDENT BENIGNO AQUINO
Confronté à l’une des ses plus graves crises depuis son arrivée au pouvoir, il y a trois ans, le président philippin Benigno Aquino a exprimé « l’inquiétude majeure » de son gouvernement face à ces pillages alors que seuls 20 des 390 membres de la police de la ville avaient pu prendre leur service. « Les policiers locaux font partie des victimes, a expliqué le porte-parole de la police nationale, Reuben Sindac. Certains d’entre eux ont aussi des familles affectées [par la catastrophe]. Nous ne savons même pas combien [de policiers] sont morts », a-t-il souligné.
Pour leur part, les humanitaires espèrent une meilleure coopération que lors du tsunami en 2004. Plusieurs ONG, comme la Croix-Rouge britannique, avaient alors déploré la concurrence entre agences ou ONG, l’acheminement d’équipement ou de denrées inutiles et la difficulté à gérer les dotations financières.
* Le Monde.fr avec AFP et Reuters | 11.11.2013 à 09h20 • Mis à jour le 11.11.2013 à 20h12.