Début octobre 2013, un front de plusieurs organisations syndicales s’est constitué et a programmé une grève nationale les 1er et 2 novembre. Ce mouvement a été précédé par différentes actions ouvrières, s’étalant du 28 au 30 octobre, dans toute l’Indonésie.
Selon les syndicats, cette grève de deux jours aurait réuni 2 millions d’ouvriers, du textile à l’électronique et a affecté les zones industrielles du pays dans 20 provinces sur 34.
Les revendications sont, entre autres, la fin de la politique de bas salaires et l’abolition de la politique des contrats temporaires (outsourcing). Les salaires minimum sont fixés de manière tripartite au niveau régional par le gouvernement, le patronat et les syndicats . Les travailleurs se battent pour un salaire minimum qui leur permette un pouvoir d’achat décent, pour constituer un foyer et envoyer leurs enfants à l’école.
La croissance a été de 6% cette année dans un environnement économique incertain. A Jakarta, les augmentations de salaire ont été de 44% cette année. Mais il faut dire que l’inflation, notamment due à l’augmentation des prix du pétrole, ronge les revenus. Elle a été de plus de 8% en septembre. Les travailleurs ne peuvent plus payer leurs loyers et doivent aller vivre sous les ponts. La revendication nationale est une augmentation des salaires minimums de 50%.
Alors qu’un législateur indiquait qu’une augmentation des salaires minimum ne contribuerait pas à augmenter l’inflation. Dita Sari, responsable au sein du ministère du travail et de l’immigration, exhorte les ouvriers à ne pas revendiquer en manifestant mais en négociant Elle insiste sur le fait que tous les patrons n’ont pas les mêmes capacités à payer des salaires aussi hauts. Il faut rappeler qu’elle est une ancienne dirigeante ouvrière des années 90 qui ont mis fin à la dictature de Suharto, engagée et victime des prisons de l’Ordre Nouveau pour avoir défendu le droits des ouvriers à s’organiser.
A Jakarta, là où les ouvriers demandent que le salaire minimum provincial augmente de 50%, soit 3.7 million de roupies indonésiennes ($325). Le gouvernement n’a accepté que de le passer 2.44 million ($214). Les travailleurs ne sont pas satisfaits de cette augmentation.
A KBN Cakung, là où plus de 71 usines textiles existent, presque toutes les usines ont arrêtés leur production vendredi 1er novembre. Les propriétaires des usines textiles menacent de délocaliser leurs opérations si le climat social n’est pas favorable.
Dans le Sud de Sulawesi, à Makassar, les travailleurs se sont répandus dans chaque usine pour faire débrayer les auttes. 300 travailleurs ont bloqué la route qui arrive au centre de la ville de Macassar, menaçant de recommencer à plus nombreux si leur revendication d’augmentation du salaire minimum n’était pas satisfaite par le gouvernement régional.
A Semarang, sur la côte Nord de l’Ile de Java, la route principale a également été bloquée malgré les efforts de la police, seuls quelques camions ont pu passer.
Dans l’Est de Java, c’est le siège du gouvernement de la province qui a été occupé avec la menace d’occupations de tous les bâtiments. Leurs revendications : salaires minimum à 3 million de roupies, la fin des contrats de travail temporaire (outsourcing) et la révision des éléments de calcul de l’indice du coût de la vie.
A Bekasi, toujours dans la région de Jakarta, 500 voyous de l’organisation paramilitaire des Jeunesses Patriotes (Pemuda Pancasilah) ont attaqué brutalement 15 000 ouvriers en grève de l’usine Schneider et blessé huit d’entre eux. A Batam, la même organisation est intervenue physiquement dans certaines zones industrielles. Il s’agit d’une région où 1000 usines sont détenues par des patrons et des capitaux étrangers, Il semblerait que des ouvriers se soient vu offerts une journée de congé s’il ne participait pas à la grève. Les grévistes n’ont pas réussi à bloquer les ports et l’aéroport international.
Il faut savoir que très récemment dans la banlieue de Jogjakarta lors d’une réunion publique des familles des victimes de la répression de 1965 ont été attaqués physiquement par le Front Anti-Communiste (FAKI), accusés de « vouloir refonder le communisme en Indonésie ».
Le 3/11/2013
Christine Schneider