Les grévistes de la faim font reculer la direction de PSA à Poissy
Il aura donc fallu 44 longs jours pour obtenir de PSA une prise en compte des revendications essentielles :
Des postes stables à leur niveau de compétence pour les grévistes, ce qui revient à avouer que tel n’était pas le cas.
Aucune sanction ni pour les grévistes, ni pour ceux qui ont eu le courage de se montrer en leur présence et qui pour certains avaient subi intimidation et menaces.
L’inspection du travail est missionnée pour une évaluation de l’égalité des moyens que l’entreprise met à la disposition des différents syndicats.
Une autre enquête portera sur les outils et moyens de la médecine du travail dans la détection de la souffrance au travail et les risques psycho-sociaux. Quel qu’en soit le résultat, c’est là encore une reconnaissance de fait de situations que les grévistes et leur syndicat SUD dénonçaient.
L’obtention de 3 mois de congés maladie maximum, payés à 100% à partir de ce jour, est une reconnaissance des souffrances qu’ils ont endurées.
Enfin le paiement de presque tous les jours de grève constitue un autre succès important.
Malgré ses réserves sur cette forme de lutte, le NPA a participé activement au comité de soutien aux grévistes de la faim qui se sont battus le dos au mur. En ne lâchant rien, ils ont contribué à lever le voile sur l’oppressante gestion PSA des « ressources humaines ». Leur lutte déterminée contribuera à donner du courage à toutes celles et tous ceux, quelque soit leur syndicat, qui auront maintenant à faire face ensemble aux conséquences du récent accord anti-social.
NPA, Montreuil, le 30 octobre 2013
PSA Dongfeng : l’État doit payer ?
La crise est le système de régulation du capitalisme mais c’est le régime normal de l’industrie automobile. La vente ou non de tel ou tel modèle étant imprévisible, les firmes vont en effet de boom en krach permanents. GM et Chrysler ont fait faillite en 2009.
Après avoir licencié massivement, diminué drastiquement salaires et protections sociales et fait éponger leurs dettes par l’État US, ils distribuent aujourd’hui, tout comme Ford hier en difficulté, des dividendes à leurs actionnaires. Mais la ville de Detroit, elle, reste en faillite tout comme ses salariés. Volkswagen a fait le plongeon deux fois en 35 ans, licencié ses salariés par dizaines de milliers, mais parade aujourd’hui au sommet de la profitabilité.
Peugeot a failli disparaître dans les années 60. Sauvé par l’État en 1966, il a alors construit l’usine de Mulhouse en 1971, Charleville en 1977, Trémery et Valenciennes en 1980, racheté Citroën en 1974 avec le financement de l’État, racheté Chrysler Europe en 1978, et devint le premier constructeur européen en 1980. Avant de replonger en 1981... Il licencie alors 98 000 salariés de 1984 à 1986, avec le financement de l’État. Il augmente la durée d’utilisation des usines à partir de 1984, met en place le flux tendu, allonge les horaires, et embauche CDD et intérimaires en 1987 et 1988. Il organise à Poissy une journée de travail de 10 heures en deux équipes dans une semaine de quatre jours avec un jour de travail glissant. L’usine tourne 20 heures d’affilée et 96 heures par semaine au lieu de 77 heures précédemment : la productivité de Peugeot augmente de 50 % entre 1985 et 1989...
Dividende maximum
Aujourd’hui ces fluctuations sont amplifiées du fait que les ventes d’automobiles battent tous les records au niveau mondial, en particulier en Chine, mais ont atteint un plafond en Europe, principal marché de la planète qui n’est plus que de renouvellement. Cette situation exacerbe la concurrence et pousse à se défaire d’entreprises ici pour en reconstruire d’autres là. Ainsi, Peugeot investit au Brésil, en Russie et en Chine, des marchés en pleine progression, et réduit ses capacités en Europe.
Mais en même temps, la profitabilité est moindre à court terme pour les firmes en restructuration. Or les groupes automobiles sont avant tout des holdings industriels et financiers qui cherchent à attirer les actionnaires en leur distribuant un dividende maximum. Ils privilégient alors la diversification dans les secteurs qui rapportent plus.
Peugeot, c’est aussi des autoroutes, maisons de retraites, cliniques, supermarchés, immobilier, assurance, nettoyage, électroménager, parkings, collectes de déchets, d’eaux usées, etc. Dès lors, ces firmes n’ont plus les liquidités pour leurs investissements automobiles. Du coup, elles vendent, filialisent (les équipementiers faisaient 25 % d’un véhicule en 1970, 70 % en 2009), s’allient avec d’autres pour se protéger, investir de nouveaux marchés ou faire des économies d’échelles avec plateformes et achats communs.
Peugeot a vendu Gefco, fermé Aulnay, poussé le gouvernement à faire l’ANI, s’est associé à GM et maintenant veut faire de même avec Dongfeng (comme hier Renault avec Nissan ou Dacia, Fiat avec Chrysler, etc.). Pour cela, Peugeot demande 1, 5 milliard d’euros à l’État mais a distribué 6 milliards de bénéfices aux actionnaires ces 12 dernières années. Il est vraiment temps de poser la question de l’intrusion des salariés dans la toute puissance du capital.
Jacques Chastaing
* Publié dans : Hebdo L’Anticapitaliste - 215 (31/10/2013). http://www.npa2009.org/
PSA : battre le patron et le gouvernement sur l’ANI
Ces dernières semaines ont été marquées par des mobilisations répétées dans le groupe PSA contre la mise en place de l’accord de compétitivité. Pour comprendre et évaluer la signification des débrayages chez Peugeot, il faut les replacer dans un double contexte.
D’une part, l’accord de compétitivité (ANI), passé dans la loi le 14 juin, représente un recul social extrêmement important, une véritable casse du code du travail. Il donne toutes facilités à la baisse des salaires, à la flexibilité, la mobilité interne, les licenciements sans limites, aux pires dégradations des conditions de travail, en cas de « difficultés conjoncturelles », comprenez : tout le temps. C’est même, selon le Conseil constitutionnel, contraire à la « Déclaration des droits de l’homme et du citoyen » de 1789. Pas moins !
D’autre part, cette attaque sans précédent a été approuvée par CFDT, CFTC et CGC en janvier 2013. Malgré cette loi scélérate, malgré les luttes des ouvriers de Renault, il y a eu une absence de mobilisation réelle des confédérations FO et CGT hostiles, en parole, à ce projet. La CGT a même déclaré qu’il était inutile de mobiliser les salariés, décrétant à l’avance qu’ils ne bougeraient pas et qu’il fallait seulement s’adresser aux députés pour qu’ils ne votent pas le texte. Il n’y a même pas eu d’information sérieuse sur l’ANI.
Mobiliser, c’est possible !
L’argument de la démoralisation des travailleurs pour justifier cette inertie ne tient pas quand on regarde ce qui s’est passé à l’usine de Peugeot Mulhouse et ses conséquences pour le groupe PSA. La CGT de l’usine a mené une intense campagne d’information sur les dangers de l’ANI (tout comme le NPA de son côté). Un tract par semaine pendant un an avec prises de parole dans les cafétérias. En mars 2013, lors de la première manifestation nationale contre l’ANI, les militants CGT de Peugeot Mulhouse ont forcé le barrage physique et moral de l’inertie des UL et UD qui ne voulaient pas manifester, pour entraîner les présents dans une manifestation « sauvage » et enthousiasmante pour tous les participants.
Cela a créé un climat propice au débrayage « surprise » de 900 salariés de Peugeot Mulhouse le 11 septembre et, par suite, de tout le groupe. Les salariés du groupe ont vu dans le débrayage de Mulhouse le signal qu’il y avait du monde pour bouger contre l’ANI, que c’était possible, montrant à leur tour par les mobilisations qui ont suivi et qui continuent, que si les confédérations l’avaient voulu, il y aurait eu du répondant.
Pour les salariés de Peugeot, débrayer seuls alors qu’il faudrait mener une lutte nationale et pas seulement contre son propre patron, et alors que les confédérations syndicales signent ou ne font aucun effort sérieux de mobilisation, cela n’aide pas. Pourtant ils continuent à se mobiliser, sur une pente certes déclinante pour le moment dans la plupart des usines, sauf à Rennes. Là, se combinant au plan de 1 400 licenciements, le mouvement est au contraire ascendant, montrant ce qui peut se combiner, avant une possible nouvelle action sur le groupe PSA autour du CCE du 24 octobre.
Rien n’est donc fini. L’ANI va provoquer une avalanche de plans « sociaux », et de nombreuses luttes — comme à Michelin Joué-lès-Tours et ses 480 salariés mutés sur 14 sites — montrent une nouvelle fois que ce ne sont pas les salariés qui sont démoralisés mais les états-majors qui sont complices. Cela révèle aussi que la poudre pour une explosion généralisée est en train de s’accumuler et que l’étincelle pourrait bien être l’application pratique de l’ANI, chez PSA ou ailleurs, se cumulant avec d’autres colères souterraines.
Jacques Chastaing et Bertrand Dubs
A PSA Poissy
Les 7 grévistes SUD de Poissy ne lâchent pas contre le système PSA ! Depuis 35 jours de grève de la faim, avec leur comité de soutien unitaire, ils multiplient les initiatives pour briser l’omerta des médias, aller à la rencontre des salariéEs et de la population. Ils appellent à la solidarité face à la discrimination syndicale, au harcèlement moral subi et pour dénoncer l’accord scélérat de compétitivité signé par des syndicats minoritaires à la botte de PSA. Le NPA les soutient au quotidien pour que PSA les écoute enfin et évite ainsi une catastrophe sociale et humaine.
* Publié dans : Hebdo L’Anticapitaliste - 214 (24/10/2013). http://www.npa2009.org/
PSA : mobilisations à la vitesse supérieure
Après la réussite du plan Varin de liquidation de milliers d’emplois notamment par la fermeture du site d’Aulnay, la direction de PSA pensait pouvoir mettre en place son accord de compétitivité sans difficultés.
Malgré l’ambiance plombée par les licenciements et l’aggravation des conditions de travail, la mobilisation contre l’accord de compétitivité antisocial continue. Ainsi, jeudi 3 octobre, il y eut 2 300 grévistes sur le groupe contre 2 500 le 18 septembre. Deux points chauds lors de cette journée : Sochaux, 800 dont 70 techniciens de Belchamps et Rennes, 650. Dans les autres usines, la mobilisation se maintient : Poissy 310, Mulhouse 130, Borny 130, Saint-Ouen 86, Valenciennes 45, Vesoul 40, Caen 20, Sept-Fons 10...
Et ce n’est pas fini !
À Sochaux, la CGT a décidé d’appeler à un débrayage le 10 octobre, jour de la prochaine session de négociations sur l’accord de compétitivité qui devrait durer deux jours. Cet appel de Sochaux a été voté en fin de débrayages par les grévistes. À Saint-Ouen, une pétition dénonçant l’accord est massivement signée et l’initiative pourrait être reprise à Mulhouse. Les reculs concédés par la direction donnent confiance aux salariéEs et parfois même des idées aux syndicats lèche-bottes.
Varin pourrait rapidement ne pas avoir comme seul souci les 500 000 d’euros « récupérés » à son domicile (vol de bijoux...). Les salariéEs de PSA pourraient lui envoyer une note plus salée.
Correspondants
* Publié dans : Hebdo L’Anticapitaliste - 212 (10/10/2013). http://www.npa2009.org/
Joué-les-Tours (37) : c’est Michelin qu’il faut licencier
En juin, la direction de Michelin annonce la suppression de 726 emplois à Joué-lès-Tours (sur 930), alors que rien qu’en 2012, les bénéfices ont augmenté de 7, 4 % ! Face au mépris, la colère ouvrière.
Mardi 8 octobre, c’est plus de 1 500 personnes qui ont manifesté dans les rues de la ville à l’occasion d’une réunion du comité central d’entreprise. Dès 1 heure du matin, l’usine était à l’arrêt. La grève est massive et l’usine bloquée. Devant la tournure prise par les discussions avec la direction, les manifestantEs investissent la salle où se déroule la réunion de négociation. Les négociateurs patronaux doivent se sauver par une petite porte, protégés par quelques gros bras au service de la direction.
En colère !
Depuis, l’entrée principale du site est bloquée, empêchant les camions de s’approvisionner en pièces, ce qui se fait sentir sur d’autres sites du groupe (Roanne, Troyes et Cholet qui sont fournis en produits semi-finis par l’usine jocondienne). Tout ce qui symbolise Michelin a été brûlé (drapeaux, bonhomme Michelin...) et un tas de pneus brûle en quasi continu. La rocade de l’agglo, toute proche, est régulièrement coupée aux heures de pointe.
La colère et la détermination se font sentir. Colère face au mépris de Michelin. Colère face à de tels licenciements sous un gouvernement qui se dit de gauche. Les élus locaux, tous au PS, se disent solidaires mais ne font rien pour dire à Michelin qu’on ne peut pas sacrifier la vie de 726 familles !
Pour l’instant, les équipes syndicales SUD (majoritaire sur le site) et CGT mènent la bagarre sur la négociation du « plan social » et pas contre la fermeture du site. Beaucoup expliquent qu’ils ne veulent pas se retrouver sans rien s’ils s’arcboutent sur cette revendication. Tous sont surtout conscients de la nécessité de se battre maintenant et de construire un rapport de forces pour faire plier Michelin.
Le NPA est totalement solidaire de la lutte des salariéEs de Michelin. Aujourd’hui cette solidarité doit s’organiser avec celles et ceux qui luttent pour ne pas accepter les diktats patronaux. À Michelin comme ailleurs !
Correspondant
* Publié dans : Hebdo L’Anticapitaliste - 213 (17/10/2013). http://www.npa2009.org/