La mort d’Hugo Chávez Frías, président de la République Bolivarienne du Venezuela, est un moment historique de la plus haute importance, un deuil qui dépasse les frontières de cette nation sœur. En effet, rarement un chef d’État ne s’était autant engagé dans la lutte face à l’impérialisme nord-américain. Il a su, avec courage, s’emparer en retour des ressources du territoire qu’il gouvernait, donner à la formation sociale de son pays un dynamisme qui favorisait toute mobilisation, assurer la souveraineté de ses orientations et décisions, inviter les peuples de l’Amérique Latine et du monde entier à croire en la possibilité de RÉSISTER, par delà le poids des puissances impériales, de celui des classes dirigeantes locales les plus réactionnaires et face à tous les idéologues qui ne croient qu’en les « vertus », biaisées, négatives et sanguinaires s’il en est, du « marché » et de la « modernité », masques officiels de la domination la plus abjecte.
En effet, tant à Cuba qu’à Haïti même, parmi d’autres, le gouvernement bolivarien a toujours su octroyer une solidarité à tous les niveaux, d’égal à égal, ouverte et tendue vers une utilisation populaire. Avec Chávez, le principe bolivarien s’étendait jusqu’à sa mesure complète : panaméricanisme ouvert sur le futur et réellement porteur face à la balkanisation qu’essayent par tous les moyens de nous imposer les impérialistes dominateurs. Ainsi, ce fut un des rares gouvernements latino-américains qui se refusa à participer de l’ignoble occupation de notre pays, Haïti. Ceux du fameux Alba, ne peuvent s’en défendre autant.
Maintes fois il fut vilipendé par les plus attardés de la réaction droitière mondiale. Sans sourciller et par des mobilisations populaires fortes et effectives, il réagit avec succès. Le peuple bolivarien l’accompagnait. Car la grandeur d’un chef d’État n’est que celle du peuple et du mouvement social qui le portent. En ce sens, sa contribution à la lutte anti-impérialiste au niveau mondial est inestimable. D’une solidarité sans limite, celle sans laquelle nous, les damnés de la terre, ne pourront que continuer à nous engloutir dans ce capitalisme broyeur d’hommes. Hugo Chávez : Presente !
Toute analyse lucide, cependant, révèlera les contradictions populistes du dirigeant latino-américain qui donnèrent lieux à des positionnements bourgeois et répressifs contre les ouvriers, petits paysans et autres travailleurs qui, malheureusement, croyaient pouvoir, avec lui, avancer dans leurs luttes de classe. Nous déplorons aussi fortement son attachement à mettre ensemble et la finance vénézuélienne, et la bourgeoisie industrielle, et la bourgeoisie bureaucratique d’État (les rojos-rojitos) qui s’est fortement formée (et continue de le faire)… dans un même et unique « Parti », alors à la tête des ouvriers, petits paysans, travailleurs de toutes catégories et du peuple en général. Ou, enfin, à continuer de donner son appui aux gouvernements les plus réactionnaires de la région, comme chez nous en particulier. La lutte des peuples, pour leur réelle émancipation, demande bien plus de précision et une plus certaine autonomie d’organisation de classe.
Dans l’espoir que le peuple vénézuélien, les travailleurs et en particulier les ouvriers, auxquels à eux tous nous apportons notre solidarité la plus entière, sauront, d’un côté, rallier toutes les forces progressistes à leur cause et objectifs historiques et, de l’autre, ce faisant, y garantir leur propre direction, en vue d’une émancipation réelle et définitive de l’humanité, alors vraiment supra-nationale.
Les réactionnaires tant vénézuéliens qu’internationaux vont tenter par tous les moyens de faire rétrocéder ce qui, pour nous et pour tous les progressistes du monde entier, représentait une réelle ouverture dans le cadre de nos luttes concrètes et précises. A nous tous donc d’en assurer la pérennité et, surtout, le dépassement.
Batay Ouvriye, Port-au-Prince HAÏTI - 6 mars 2013