Début décembre 2012, l’USTKE (Union syndicale des travailleurs kanaks et des exploités) a tenu son XIVe congrès à Nouméa avec plus de 300 militantEs. Deuxième organisation syndicale du pays, l’USTKE poursuit sa lutte pour l’indépendance Kanak socialiste depuis sa fondation en 1981.
Ce congrès était le premier depuis la scission de 2010 et le départ de son ancien président Gérard Jodar. Le débat avait porté à l’époque sur la stratégie d’affrontement avec l’État colonial dans des conflits jusqu’au-boutistes qui, sans rapport de forces suffisant, avaient conduit 75 militants derrière les barreaux de la pire prison française, le Camp Est.
Depuis 2 ans, le syndicat a donc repris sa place dans les instances paritaires, rompant avec la politique de la chaise vide, et fait avancer des dossiers dans le cadre du dialogue social. Ce congrès a été l’occasion de faire le bilan de cette stratégie. Si des déléguéEs ont regretté que parfois une certaine inertie se manifeste, la présidente Marie-Pierre Goyetche a rappelé que près de 25 % des conflits ont été impulsés par le syndicat et que les bâches bleues des piquets de grève n’ont pas disparu. Aujourd’hui le syndicat a retrouvé une implantation équivalente à celle d’avant la scission.
En direction de l’emploi et de la jeunesse
Beaucoup de conflits ont porté sur l’emploi local, les mesures de protection prévues pourtant dans l’accord de Nouméa de 1998 sont minimes et très souvent ignorées par le patronat qui préfère embaucher des métropolitains fraîchement débarqués plutôt que des enfants du territoire. Le congrès a donc décidé de relancer dès cette année une campagne pour la mise en place effective de la citoyenneté qui permette aux jeunes Kanaks d’avoir un vrai droit au travail. Même des emplois peu qualifiés leurs sont refusés, et actuellement 2/3 des cadres ne sont pas néEs sur le territoire. La majorité des employeurs refuse d’appliquer la loi sur la promotion interne, maintenant ainsi les Kanaks dans les emplois les moins qualifiés, et l’urgence est à la mise en œuvre de mesures contraignantes pour la formation professionnelle tout au long de la vie.
Parallèlement le syndicat va poursuivre sa campagne pour la mise en place d’une vraie formation scolaire, universitaire et technique à destination des jeunes Kanaks dont 13 % sont encore illettréEs. L’Ustke exige aussi que les Kanaks aient la priorité pour les formations d’enseignantEs et de cadres de l’enseignement et la nomination d’un recteur kanak.
La souveraineté comme horizon
Enfin ce congrès était le dernier avant l’échéance des élections provinciales de 2014. Pour rappel, c’est le congrès du territoire élu à cette occasion qui aura la charge d’organiser d’ici 2018 le référendum d’autodétermination prévu par l’Accord de Nouméa.
Le syndicat a créé fin 2007 le Parti travailliste (PT) pour avoir un relais au niveau des institutions politiques (nous reviendrons dans le prochain numéro sur son IVe congrès qui s’est tenu également en décembre). Le syndicat s’est engagé à tout faire pour favoriser l’unité des indépendantistes et permettre que la majorité des élus au congrès soit indépendantiste en 2014. Notons que l’intervention du FLNKS, invité à la soirée internationale, a été chaleureusement accueillie et que l’engagement a été pris de faire du sommet des Pays du groupe du Fer de lance mélanésien en juin 2013 en Kanaky un temps fort de la lutte pour l’accession à la souveraineté.
Bernard Alleton
Sur le site internet www.ustke.org des informations sur les conflits significatifs et les motions adoptées à ce congrès
Voir aussi sur ESSF (article 27358), Kanaky : retour sur le XIVe congrès du syndicat USTKE