La poursuite de Joseph Kony et la protection des enfants ougandais ne sont qu’un écran de fumée, un prétexte pour une « intervention humanitaire » dans une région où les « guerres civiles » soutenues par les États-Unis (Soudan, Rwanda, République démocratique du Congo, Somalie, Éthiopie) ont fait plus de huit millions de morts au cours des 20 dernières années.
Selon Nile Bowie, « dans une autre manœuvre visant à atteindre l’hégémonie régionale et surpasser la Chine, les États-Unis cherchent à prendre pied par le biais d’AFRICOM dans le bloc incroyablement riche en ressources qu’est l’Afrique centrale. La République démocratique du Congo (RDC) constitue l’une des plus grandes régions du monde privée d’un véritable gouvernement. Elle contient de vastes gisements de diamant, de cobalt, de cuivre, d’uranium, de magnésium et d’étain, en plus de produire plus d’un milliard de dollars d’or annuellement. Il est tout à fait possible pour les États-Unis d’accroître considérablement leur présence en RDC en invoquant le prétexte de vouloir capturer Joseph Kony. » [1].
Récemment, le Pentagone a confirmé l’envoi de Forces spéciales appartenant au Corps des Marines, pour former des troupes ougandaises non seulement dans la lutte contre Joseph Kony et l’Armée de résistance du Seigneur, mais aussi contre Al-Shabaab en Somalie. Joseph Kony sert de prétexte pour intervenir militairement dans cinq pays africains.
Une intervention pour le maintien de la paix ?
Ainsi, selon un communiqué de presse du Corps des Marines « jusqu’à maintenant, l’unité opérationnelle a déployé de petites équipes dans cinq pays africains, dont certains sont menacés par le groupe terroriste Al-Qaïda au Maghreb islamique ». [2]
Officiellement, selon le même communiqué, cette intervention se fait dans le cadre du « maintien de la paix », lequel implique des « opérations de contre-terrorisme » appuyées par les États-Unis. L’objectif annoncé est de transformer les soldats ougandais en « ingénieurs du contre-terrorisme », à savoir en Forces spéciales supervisées par les États-Unis, « lesquelles seront ensuite déployées en Somalie en appui aux bataillons d’infanterie ».
L’envoi des Marines étasuniens serait lié à la nouvelle Unité opérationnelle 12 aérienne et terrestre à but spécifique du Corps des Marines, située à Sigonella en Sicile. L’unité déploiera de petites équipes de Marines à travers tout le continent africain. L’initiative a été lancée en 2011 dans le cadre d’un effort visant à préparer les armées africaines à mener des opérations de « contre-terrorisme » sous la direction des États-Unis.
Cette initiative signifie par ailleurs l’implication directe de troupes et de forces spéciales ougandaises dans la guerre civile en Somalie. Ainsi le major Charles Baker, porte-parole pour la mission de la Marine, a déclaré dans un communiqué de presse publié par l’ambassade des Etats-Unis à Kampala : « La genèse de cette mission comprenait des opérations à Mogadiscio en Somalie, où les soldats du maintien de la paix de l’Union africaine ont fait face à des EEI (engins explosifs improvisés) et à d’autres obstacles complexes les exposant à des embuscades d’Al-Shabaab ».
Et Richard C. Wakayinja, lieutenant-colonel de la Force de défense du peuple ougandais de renchérir : « Les soldats en formation utiliseront leurs connaissances en Somalie, un pays déchiré par la guerre, et dans la poursuite du commandant de la LRA Joseph Kony, où qu’il soit » » [3]
Michel Chossudovsky