Ce dimanche 4 septembre, sous la pluie, a eu lieu une action non-violente de « sit-in » et de blocus du chantier de l’antique centrale nucléaire de Mühleberg exploitée par les Forces motrices bernoises (FMB)… ContrAtom y était. Nous avons interviewé à chaud Anne-Cécile Reimann – présidente de l’association antinucléaire genevoise – et Olivier de Marcellus, militant historique de celle-ci, qui faisaient partie du contingent d’opposant·e·s romands à l’atome ayant participé à l’action…
Quel sens avait cette action ?
ACR : Il faut en finir avec la centrale de Mühleberg, arrêtée depuis fin juin, en faisant tout pour qu’elle ne soit jamais remise en marche. Depuis sa mise en service il y a 40 ans, la liste de ses défauts n’en finit plus de s’allonger : le manteau est fissuré et des avaries ont laissé échapper des matières radioactives. Malgré ça, les autorités ont à plusieurs reprises, renouvelé son permis d’exploitation…
OdM : D’autres défaillances ont eu lieu depuis la catastrophe de Fukushima : plusieurs systèmes de sécurité ne répondent pas aux exigences antisismiques et, fin juillet, les FMB ont précipitamment arrêté la centrale suite à un rapport de l’EPFZ qui a montré que le refroidissement ne pourrait être garanti en cas d’inondation...
ACR : On exige donc la fermeture définitive de cette vieille casserole à plutonium, d’autant que chaque sou dépensé pour la rafistoler est soustrait à la promotion des énergies renouvelables et des économies d’énergie. ContrAtom a toujours été convaincue que l’action politique institutionnelle et l’action juridique doivent s’appuyer sur la pression des citoyen·ne·s dans la rue...
OdM : Le mouvement antinucléaire allemand a prouvé que des actions de désobéissance civile sont un moyen efficace pour influencer les décisions politiques. Plus les participant·e·s sont nombreux et déterminés, plus l’effet est grand !
Comment ça s’est-il passé ?
ACR : L’action reposait sur des formes d’organisation démocratique et non-violente. Avec un système nouveau pour moi de petits groupes, représentés par un porte-parole, qui discutaient sur le terrain de ce qu’on allait faire… des méthodes dont nous pourrions nous inspirer chez nous également. (Voir ci-dessous)
OdM : Des préparations au sit-in non-violent avaient déjà eu lieu la veille et le blocus a démarré à 4 heures du matin sur l’une des routes d’accès de la centrale...
ACR : Sur place on a décidé également de bloquer un deuxième accès… alors que le premier blocage était toléré et prévu par la police, le deuxième ne l’était pas tant… Ça a fini en arrestation en fin d’après-midi d’une trentaine de militant·e·s qui se sont fait embarquer pacifiquement par la police, sans résistance autre que non-violente...
Quel a été l’apport de ContrAtom ?
ACR : Nous n’étions que quelques uns, mais avec notre élan, nos panneaux jaunes et nos chansons antinucléaires et anti-Mühleberg, qui ont été reprises jusque dans les geôles de la police bernoise, on a amené un élément important pour le dynamisme de cette action...
OdM : Dans l’autre sens, la composition des participant·e·s, avec notamment de nombreux jeunes et une perspective sur la manière d’aller « plus loin » et autrement que la routine des signatures d’initiatives ou des manifestations traditionnelles nous apporte une perspective et des débouchés pour faire avancer le rapport des forces dans le sens d’une vraie sortie rapide du nucléaire…
ACR : C’est vrai ! Une manif comme celle à Beznau ce printemps était un peu trop conçue comme une simple occasion de compter les 50 000 antinucléaires, qui sont venus et repartis, mais sans leur permettre de s’engager vraiment et de se sentir membres d’un mouvement…
Mais seuls quelques dizaines de manifestant·e·s ont participé à l’action. Cela modifie-t-il vraiment le rapport des forces ?
ODM : Oui parce que cette action était un signal, le début de quelque chose. Evidemment il faudra recommencer dans le même sens en étant plus nombreux·euses encore.
ACR : Ce n’est qu’un début… le combat continue ! On a démontré dimanche qu’on pouvait pratiquer la désobéissance civile non-violente. D’autres nous rejoindront. Et c’est un combat pour la vie qu’on va gagner !
Principes de l’action…
publiés sur www.aussitzen.ch
Nous allons barrer l’accès à la centrale nucléaire de Mühleberg. Nous voulons encourager d’autres personnes à rejoindre notre action et à s’engager activement pour la mise hors service de Mühleberg et pour la sortie du nucléaire.
Notre « sit-in » est un acte de désobéissance civile. Nous ne respecterons pas les lois et prescriptions qui ont pour but de garantir l’exploitation quotidienne de la centrale. Nous ne quitterons pas les routes d’accès parce que nous estimons notre action légitime et nécessaire face au risque nucléaire et face aux défauts de sécurité irrésolus.
Nous nous engageons pour la vie et un avenir sans nucléaire. C’est ce vers quoi nous orientons nos actions. Nous ne blesserons personne. Notre préoccupation est de traiter tout le monde avec respect et sincérité. Et nous resterons ouverts au dialogue.
Nous nous ne laisserons pas décourager par des interdictions de manifester ou des répressions juridiques. Dans le cas d’une expulsion policière nous agirons prudemment et sans violence. Nous adopterons un comportement respectueux envers la police et les employés de la centrale qui ne sont pas nos adversaires même si nous n’approuverons pas leurs actes.
Notre action n’est pas basée sur un fonctionnement hiérarchique. Nous prenons nos décisions sur la base d’un consensus entre les militants. Non-violents et déterminés, nous troublerons l’exécution des travaux de révision et de montage ultérieur.