Pour répondre à l’hostilité grandissante de l’opinion américaine, Barack Obama a déclaré que sa stratégie en Afghanistan cherchant à préparer le retrait américain pour juillet 2011 n’avait pas « échoué pour l’instant ». Optimisme de façade contredit par les faits. Obama se fait l’écho des déclarations du général Pétraeus, le commandant des forces de l’Otan, qui dit avoir « repris l’offensive » en engageant l’opération « frappe du dragon » par la bataille de Kandahar, dans la région patchoune du sud du pays. Cette offensive aurait dû débuter au printemps et son report est l’expression d’une situation instable qui échappe de plus en plus à l’Otan comme au gouvernement fantoche de Karzaï.
Les résultats des élections législatives du 18 septembre, qui se voulaient une démonstration, sinon de l’autorité du pouvoir, au moins de sa volonté démocratique, ne seront pas connus avant le 31 octobre. Elles ont été dominées une fois encore par la fraude, la corruption. Sous la pression des talibans, elles ont été largement boycottées. Le chiffre de 40 % de participation semble largement surestimé.
Dans le souci de donner de la crédibilité à la politique américaine qui prétend passer la main à l’armée et la police afghane, Karzaï vient de fermer huit sociétés privées étrangères, sur les 52 qui opèrent sur le territoire à l’ombre des armées d’occupation. Il a aussi procédé à la nomination des 68 membres d’un Haut Conseil pour la paix, chargé de négocier les ralliements de talibans au nom de la « réconciliation nationale ». Autant de gestes politiques qui ne peuvent masquer le fait que l’escalade guerrière de plus en plus meurtrière plonge le pays dans le chaos. La population civile paye un tribut de plus en plus lourd et les pertes américaines en 2010 ont été les pires de toute la guerre. Et cela dans un des pays les plus pauvres du monde avec le taux d’alphabétisation et l’espérance de vie les plus bas.
La situation dans toute la région se dégrade. La multiplication des attaques meurtrières des drones de la CIA contre les bastions des talibans dans la région pakistanaise frontalière du Nord-Waziristan aggrave les tensions. Une instabilité croissante et meurtrière qui nourrit la haine contre les puissances impérialistes dont l’aide face au drame des inondations est, à l’opposé, dramatiquement faible. Les talibans tirent bénéfice de cette situation.
La stratégie impérialiste est tout autre que les faux-semblants politiques. Le secrétaire général de l’Otan, Rasmussen, l’a souligné, dans une interview au journal espagnol ABC : les troupes de l’Otan resteront « le temps qu’il faudra pour finir le travail » et « la défaite n’est pas une option, nous vaincrons », quel qu’en soit le coût humain et financier. Chaque jour, la seule participation française à la guerre coûte près de 1, 3 million d’euros.
Assez de cette sale guerre, hors d’Afghanistan les troupes impérialistes !
Yvan Lemaitre
* Paru dans Hebdo TEAN 72 (07/10/10).
AFGHANISTAN : LE BOURBIER PRÉVISIBLE
La guerre sans fin en Afghanistan provoque une crise au sein même de l’armée américaine, poussant Obama à remplacer un général trop critique envers son administration.
Le 23 juin, Obama limoge le général Stanley McChrystal, commandant de la Force internationale d’assistance à la sécurité (Fias), sous l’égide de l’Otan. Celui-ci avait donné une interview dans laquelle lui et ses soldats attaquaient l’administration américaine, notamment Obama et son vice-président Joe Biden.
Ce qui est frappant dans cette interview, c’est la description qu’ils font de l’occupation de l’Afghanistan :
« En juin, le nombre de soldats américains morts est passé à 1 000, et le nombre d’engins explosifs improvisés a doublé. Les dépenses de centaines de milliards de dollars dans le cinquième pays le plus pauvre de la planète n’ont pas réussi à rallier la population civile, dont l’attitude envers les troupes américaines varie de l’intense méfiance à l’hostilité ouverte. »
« La plus grande opération militaire de l’année – une offensive féroce qui a commencé en février pour reprendre la ville méridionale de Marjah – continue de traîner en longueur », comparable à « un ulcère qui saigne ».
« En juin, l’Afghanistan a officiellement dépassé le Vietnam comme la plus longue guerre de l’histoire américaine [...]. Le Président se retrouve coincé dans quelque chose d’encore plus fou qu’un bourbier [...] ».
Le calendrier de retrait des troupes est ainsi en train de devenir une source croissante de conflits entre Obama et l’armée. Obama a remplacé McChrystal par son supérieur immédiat, le général David Petraeus. Ce dernier est le théoricien principal de la guerre anti-insurrectionnelle, ce que McChrystal a tenté en vain de mettre en œuvre. C’est donc sans surprise que quelques jours avant sa nomination, Petraeus a lui aussi clairement indiqué son scepticisme sur le calendrier d’Obama.
Lors de sa campagne électorale, sous la pression de l’opinion publique, Obama s’était engagé à commencer à retirer les troupes d’ici l’été 2011. C’est aussi la raison pour laquelle en décembre 2009, malgré les pressions de l’armée qui réclamait des renforts, Obama décidait d’envoyer deux fois moins d’hommes que demandé, soit 30 000 soldats.
À ce conflit entre l’armée et l’administration s’ajoute celui entre les administrations américaine et afghane. Dans le sud et l’est, les talibans contrôlent la plupart des villages, dans l’ouest et au nord, le gouvernement afghan a commencé à perdre le contrôle. Dans cette situation, Hamid Karzaï se désolidarise de plus en plus des États-Unis et il est actuellement en négociation avec les talibans dans la perspective de former un gouvernement de coalition. Dès juillet 2008, quand les bombardiers américains ont tué 80 Afghans, des femmes et des enfants pour la plupart, Karzaï avait déclaré à la presse que les forces de l’Otan ne devraient jamais être autorisées à bombarder à nouveau sans avoir clarifié les objectifs avec son gouvernement. Depuis, chaque massacre important de civils est décrié par un ministre du gouvernement à la télévision, et les Américains ont à rendre des comptes.
Le dénouement de ces divisions dépend d’une force dont les intérêts sont différents : le mouvement de solidarité internationale des populations.
En France, alors que le gouvernement martèle la nécessité de mesures d’austéritésbudgétaire contre les déficits publics, il s’entête dans une guerre en Afghanistan qui coûte un million d’euros chaque jour. Or, selon un sondage BVA réalisé au début de l’année, 56 % de la population souhaite un retrait des troupes, et 85 % pensent que la situation en Afghanistan se détériore.
Nous devons amplifier les mobilisations pour exiger le retrait immédiat des troupes d’Afghanistan.
Vanina Guidicelli
* Paru dans Hebdo TEAN 63 (08/07/10).
UNE BAVURE DE L’ARMÉE FRANÇAISE EN AFGHANISTAN
COMMUNIQUÉ DU NPA
Le ministre de la Défense, Hervé Morin, a regretté la morts de 4 jeunes afghans intervenus le 6 avril tués par un missile antichar, au cours d’un combat contre des talibans, dans la vallée Bedraou, province de Kapisa.
Mais il s’empresse d’indiquer que toutes les procédures ont été respectées par les militaires français et de dédouaner l’armée française en indiquant qu’elle n’avai pas commis de faute.
Ce ’est pas la première fois que les troupes de l’OTAN, engagées en Afghanistan, font des victimes civiles, soit au cours de combats, soit en les attaquant directement sous divers prétextes. Au cours de l’année 2009, 2412 civils ont été tués, officiellement, à la suite de diverses bavures. La responsabilité de l’armée américaine, en particulier, est engagée dans plusieurs cas.
Bavure c’est le terme qui, malheureusement, convient pour la mort de ces 4 jeunes afghans. C’est la logique infernale d’une guerre sans issue.
C’est pourquoi, le NPA réaffirme son exigence d’un retrait total des troupes de l’OTAN d’Afghanistan.
Le 30 avril 2010.