Dans la nuit d’hier, du 15 au 16 août 2010, les affrontements ont repris entre les
forces de police et les habitants de Ben Gardane à la frontière entre la Tunisie et
la Libye, dans les régions de Jamila Elkadima (Zekra), Nahdha et Jalal, les plus
violents ayant lieu dans cette dernière.
Assabilonline a appris par ses sources que les locaux sécuritaires de Ben
Gardane s’étaient remplis de personnes arrêtées qui avaient été transférés
immédiatement à Médenine. Par ailleurs, on a fait état de deux jeunes victimes de
fractures dans la région de Jalal. […]
Des proches des gardés à vue ont pris contact avec le poste de Ben Gardane
pour avoir des nouvelles de leurs enfants. On leur a dit n’avoir aucune information
sur ces noms et on les a dirigés sur la prison de Médenine. Là l’administration
de la prison leur a dit ne rien savoir sur leurs enfants et qu’ils n’y avaient pas été
écroués. Les familles ont fait part de leur profonde préoccupation quant au sort
réservé à leurs proches.
Nos sources ont fait état d’incendie de pneus, de bris de vitrines de commerces
et d’affrontements entre forces de police et citoyens chaque nuit à Ben Gardane,
avec des blessés des deux côtés. Il a été remarqué que les brigades de
recherches et « spéciale » avaient diminué leurs mouvements à bord des
véhicule de type Mitsubichi et se déplaçaient à bord de taxis dont elles assuraient
la conduite, ainsi que de voitures banalisées. Elles avaient notoirement recours à
des indicateurs et les brigades d’intervention et « anti émeutes » avaient du mal à
nourrir leurs troupes car les restaurants refusaient de les servir, un seul acceptant
de collaborer avec elles en face de l’usine de lait sur la route de Ras Jdir à trois
ou quatre kilomètres du centre de la délégation.
Des sources ont affirmé à Assabilonline que les forces de police avaient fait
des descentes aux domiciles des citoyens et fait usage de la violence, de
la terreur, des insultes, injures et mots triviaux, insistant sur le fait que les
méthodes barbares utilisées par la police avaient attisé de façon inquiétante la
recrudescence de la violence. […]
Une des victimes des dépassements policiers est monsieur Tahar Bennaiel, un
homme d’une cinquantaine d’années, qui avait ordonné à sa famille, alors que
les affrontements se rapprochaient de son domicile de Zekra à côté du bureau
de poste, de rentrer à la maison. Il était sur le seuil de la porte, interdisant à
quiconque de pénétrer chez lui, mais les forces de police ont investi la maison,
l’ont violenté, ainsi que sa femmes et ses filles et un jeune d’une quinzaine d’années. Des témoins ont entendu les appels au secours venant de chez lui.
Parmi les personnes détenues, il y a Abdelwahab Chaouat, qui a été enlevé
devant un magasin. Lorsque sa famille lui a rendu visite à la prison civile de
Harboub pour lui apporter de quoi rompre le jeûne du Ramadan, ils ne l’ont
reconnu qu’au timbre de sa voix, tant il avait été torturé en prison.
Des observateurs disent que les services de police utilisent la stratégie de la
torture des personnes arrêtées dans leurs véhicules et des coups dans les rues
pour terroriser les autres citoyens, profitant de l’obscurité de la nuit, des boutiques
fermées, la plupart des événements ayant lieu la nuit.
[…]
Assabilonline , Ben Gardane, (Tunisie) Spécial
17-08-2010
Ben Gardane est le théâtre d’événements sans précédent
La population réclame « Ras Jdir »
La nuit du 13 août, les affrontements entre les habitants et les forces de police
ont repris dans la région de Ben Gardane, frontalière avec la Libye. Il s’agit
de protestations contre la fermeture par les autorités tunisiennes du point de
passage frontalier de Ras Jdir, qui a vu des échauffourées que les sources d’
Assabilonline décrivent comme violentes, dans quatre régions différentes de la
délégation de Ben Gardane.
Ces affrontements qui ont commencé après la prière de la veillée du Ramadan,
se sont poursuivis jusqu’à trois heures du matin.
Nos sources affirment que les arrestations ont survenu soudainement, contre
toute personne se trouvant par hasard sur les lieux des événements et elles ont
concerné aussi des enfants et des mineurs qui n’avaient pas pu prendre la fuite
face à l’attaque de la police.
Pour rappel, nombre de citoyens qui avaient été arrêtés le 10 août dernier au
début des événements n’ont pas été remis en liberté et ont été conduits à la
prison de Harboub, à cinq kilomètres du gouvernorat de Médenine, sur la route
reliant Médenine et Tataouine dans l’attente de leur procès probablement.
Les autorités libyennes ont affirmé que la décision de fermer Ras Jdir a été prise
à la demande et suite aux pressions des autorités tunisiennes.
Nos sources confirment que la sécurité libyenne est postée près de la frontière
tuniso-libyenne de crainte que les affrontements ne se propagent sur le territoire
libyen, dans la mesure où les commerçants libyens ont été lésés eux aussi par la
fermeture du point de passage frontalier.
Elles ont affirmé à Assabilonline que les affrontements ont commencé après la
prière de la veillée du Ramadan vers onze heures et demie du soir (heure de
Tunis) dans la région sise entre Jalal et le centre de la délégation distant de deux
kilomètres du centre ville où passe la route reliant Médenine et Ben Gardane,
plus exactement au carrefour dit « du chameau », (en raison d’une statue de
chameau au milieu du croisement).
Une manifestation pacifique a commencé qui s’est poursuivie jusqu’au niveau du
poste de police situé au début de la route de Médenine, distant d’un kilomètre
et demi du centre du gouvernorat où a été organisé un arrêt en signe de
protestation, juste l’explosion des affrontements. A la suite des échauffourées,
les manifestants se sont rendus au centre de la municipalité au carrefour
de « Moungala », puis à celui du « Maghreb Arabe » face au poste de la police
de la circulation qui ne se trouve qu’à trente mètres. Puis les événements se sont
propagés aux régions de Nahdha et Zékra, desservies par la route menant à Ras
Jdir, respectivement à deux kilomètres et cinq kilomètres.
Selon nos sources, la violence s’est concentrée dans les lieux suivants :
— La région de Jelal, à trois kilomètres de la route reliant Médenine et Ben
Gardane
— La région de Jamila Elkadima, dite « Zekra » à cinq kilomètres du centre de le
délégation, desservie par la route menant à Ras Jdir et la frontière libyenne.
— La région de Nahdha, à deux kilomètres du centre de la municipalité,
desservie également par la route de Ras Jdir
— Au centre de la délégation de Ben Gardane au niveau du croisement du
Maghreb arabe et croisement dit d’ »El Moungala » (L’horloge).
Des dizaines de pneus ont brûlé, ainsi que deux voitures, dont l’une appartient
à une personne suspectée par les manifestants d’être un indicateur de la police.
Des voitures de la police de la circulation ont été détruites. Des témoins oculaires
ont dit à Assabilonline que plusieurs véhicules de la brigade d’intervention avaient
subi des dégâts partiels suite à des jets de pierres. La région de Zekra a été
le théâtre d’affrontements et d’incendies de nombreux pneus, de destruction
partielle de voitures de la brigade d’intervention, de la brigade d’investigation et
de la brigade spéciale.
La région de Nahdha a connu des affrontements similaires, y compris au centre
de la délégation et l’horloge qui se trouve au croisement d’El Moungala a été
partiellement brisée.
Toutes les régions où ont eu lieu les affrontements avaient vu des mobilisations
pacifiques de protestation exigeant l’ouverture du point de passage de Ras Jdir,
condamnant le chômage, la corruption municipale et administrative au sein de la
délégation. Les unités d’intervention et « anti émeutes » ont réprimé ces sit in et
ces manifestations pacifiques, ce qui a déclenché les affrontements.
Les protestataires ont été pourchassés dans les rues environ 150 jeunes ont été
conduits à Médenine tandis que d’autres ont été remis en liberté au terme d’une
nuit de coups et de torture dans les locaux de la sécurité et dans les véhicules
d’« intervention ».
Nos informateurs ont recensé la présence de près de 40 véhicules de la brigade
d’intervention et de plus d’un millier de policiers des unités « anti émeutes » qui
se sont déployés dans tous les lieux à Ben Gardane, venus en renfort de Tozeur,
Gafsa, Gabès et Médenine.
On a noté aussi cinq cars « Toyota » de police et trois
acheminant des forces de police. Ces forces de police ont utilisé les lycées
d’enseignement pour se reposer à la fin des affrontements tout comme la grand
place de l’auberge sur la côte de Bouhaïra Elbiban à titre de bases.
[…]
Aux toutes premières heures du dimanche 15 août, les affrontements ont repris
plus violemment encore, la situation semblant échapper à tout contrôle […]
Les forces de police ont fait usage de gaz lacrymogènes et de balles de
caoutchouc, de grenades sonores pour disperser la foule. Nos sources affirment
qu’il y a des dizaines de blessés parmi les jeunes. […]
Plus de cinquante véhicules des brigades d’intervention ont pénétré dans les
quartiers populaires et ont kidnappé des jeunes à leurs domiciles sous les yeux
de leurs proches. Ces descentes et ces arrestations se concentrent dans les
régions de Jalal et Jamila Elkadima (Zekra). Les arrestations, le déploiement
sécuritaire et la violence policières à l’encontre des citoyens jusque chez eux
dépassent l’entendement selon nos sources.
Assabilonline , Tunisie, reportage spécial
15-08-2010