L’ultime offensive de l’armée Sri Lankais contre les « Tigres » de libération de l’Eelam Tamoule (LTTE), est loin d’avoir permis une résolution du conflit qui oppose la communauté tamoule lankaise au gouvernement nationaliste chauvin cinghalais de Mahinda Rajapaksa.
Entre janvier et mai de cette année, 20 000 civils tamouls ont perdu la vie sous les bombardements incessants de l’armée sri lankaise. Depuis la fin de l’offensive entre 250 000 et 300 000 civils ont été retenus captifs dans des camps d’internement, sans possibilité de mouvement, ni même de regroupement familial. Cela a permis au gouvernement de tenter de repérer et de capturer les membres et soutiens supposés des LTTE au sein de la population civile des camps.
Les ONG telles que la Croix Rouge n’ont pas été autorisées à apporter aide et soutien aux tamouls enfermés dans ces camps où les besoins les plus élémentaires font cruellement défauts. A tel point qu’Amnesty international a alerté la communauté internationale d’un risque de catastrophe sanitaire majeure.
Récemment, Mahinda Rajapaksa a décidé d’anticiper les élections présidentielles début 2010 afin, espère-t-il, de capitaliser sa victoire contre les Tigres. Depuis cette annonce, les camps ont été ouverts et les tamouls internés sont progressivement relâchés. Ils sont autorisés à retourner dans les zones qu’ils habitaient précédemment y compris dans le Nord durement touché par les combats. Le gouvernement a même annoncé la fermeture définitive des camps au plus tard fin janvier 2010.
La décision d’autoriser la liberté de mouvements des civils enfermés dans ces camps est un pas important pour soulager le fardeau des centaines de milliers de civils tamouls, victimes de la guerre. Mais le retour chez elles des personnes déplacées ne pourra se faire que si elles y sont réellement aidées. Les besoins dans le nord de la péninsule sont immenses. Il faut déminer les terrains, reconstruire les zones dévastées par la guerre, construire des maisons pour les populations qui n’ont pas ou plus de lieu d’accueil, ni de moyens financiers, mettre en place des services de bases, apporter soins et nourritures aux civils démunis. Or, selon les organisations humanitaires sur place, la situation ne sera pas viable partout fin janvier 2010. C’est pourquoi, il est nécessaire que le gouvernement sri lankais favorise une nette amélioration des conditions de vie dans les camps afin d’assister les personnes qui ne sont pas en mesure de retourner immédiatement sur leur lieu d’habitation.
La situation actuelle des tamouls affectés par la guerre nécessite d’autant plus d’être améliorée que des centaines de réfugiés tamouls risquent leur vie en s’embarquant sur des bateaux de fortune afin d’obtenir l’asile politique dans des pays voisins. Depuis maintenant plusieurs semaines, plus de 250 tamouls, y compris des enfants, sont retenus sur un bateau dans des conditions extrêmement précaires dans le port de Merak et 68 réfugiés tamouls sont internés sur un bateau des douanes australiennes dans le port de Tanjung Penang en Indonésie. La Malaisie n’est pas plus accueillante : 207 réfugiés sont retenus au centre de détention des immigrés de l’aéroport international de Kuala Lumpur tandis que 108 réfugiés sont détenus dans un centre similaire à Johor. Le 1er novembre, un bateau de réfugiés tamouls a coulé près des Coco Islands, un territoire australien dans l’océan indien et 12 réfugiés ont disparu.
Les gouvernements malaisien, indonésien et australien refusent d’accepter cette nouvelle vague de réfugiés qui ont fuit la guerre et l’oppression et au contraire les traitent comme de simples criminels. Leur objectif est de renvoyer les réfugiés tamouls dans leur pays d’origine au mépris des risques encourus et des droits humains des réfugiés.
Alors même que la défaite militaire des Tigres était totale, le gouvernement sri lankais a augmenté le budget de l’armée de 20%, lui faisant atteindre un record de 1,6 milliard de dollars. Cela n’a pas empêché le FMI d’accorder un prêt de 2,6 milliards de dollars sur 20 mois pour aider à la reconstruction de l’économie.
Le gouvernement ne montre aucune volonté politique de favoriser l’autonomie dans les régions à majorité non cinghalaise.
Aucune paix durable ne sera possible sans la reconnaissance du droit à l’autodétermination du peuple tamoul. L’autonomie doit être accordée aux régions à majorité non cingalaise et l’égalité entre les citoyens doit être garantie, seul moyen d’obtenir la paix et la démocratie dans un état multiracial et multi-culturel.
Une telle paix ne pourra être établie que si sont jugés les responsables des crimes de guerre et des nombreux assassinats extra judiciaires, des disparitions et des détentions arbitraires dont ont été victimes les minorités mais aussi les journalistes