Le gouvernement a décidé de procéder à l’extension de l’accord Bino en Guadeloupe en l’amputant, d’une part de son préambule « considérant que la situation économique et sociale existant en Guadeloupe résulte de la pérennisation du modèle de l’économie de plantation » ; d’autre part, de son article 5 prévoyant la prise en charge des augmentations de salaires par les employeurs au-delà des aides des collectivités (12 mois) et de l’Etat (36 mois).
Concrètement, cela signifie, comme le souligne le LKP, que « la décision du gouvernement instaure une disparité salariale et donc une injustice sociale « légale », au détriment des 30000 travailleurs concernés par l’extension amputée de l’article 5. » Aujourd’hui, en effet, 50000 travailleurs sur les 80000 que compte la Guadeloupe sont couverts par l’accord Bino initial, garantissant le maintien des augmentations de salaire au-delà de trois ans. Pour le gouvernement, dans les deux cas, il s’agit d’accéder aux demandes essentielles du Medef. En même temps, « il crée, selon le porte-parole du LKP, Elie Domota, les conditions pour le développement d’une véritable guérilla sociale dans les semaines, mois et années à venir ».
C’est dans ce contexte que vont donc s’ouvrir, dans les prochains jours, les premiers ateliers pour les « états généraux de l’Outre-mer », dont le moindre détail a été fixé depuis Paris : le coordinateur central, les personnalités référentes, les ateliers, les thèmes, les responsables d’atelier, le calendrier, etc. Et, comme s’il fallait encore prouver que ces états généraux n’ont été convoqués que pour tenter d’éteindre l’incendie et de diviser le mouvement, le Parlement a adopté en vitesse un texte qui traînait depuis deux ans sur le « développement économique des outre-mers » (un pluriel significatif). A noter que seules les députées de Guyane, Christiane Taubira et Chantal Berthelot, ont voté contre, l’ensemble de la gauche s’étant abstenue. Le député socialiste de la Guadeloupe Victorin Lurel a jugé « le bilan bon » et sera membre de la commission mixte paritaire (avec le Sénat) en vue de l’adoption définitive de la loi, début mai.
Légitimement, le collectif LKP a décidé de ne pas participer à cette parodie. Ces états généraux n’ont aucun avenir, même avec le concours des élus de droite comme de gauche, discrets durant la grève générale. Les tenants de la perpétuation du système colonial croient le moment venu de redresser la tête. Ils n’ont pas compris qu’ils ne pouvaient plus continuer à exploiter et à opprimer comme avant, et ils n’ont pas mesuré l’ampleur de la prise de conscience.
Le LKP, lui, « entend concevoir avec le peuple en mouvement de nouveaux rapports économiques et sociaux, pour passer d’une économie de plantation d’import-distribution à une économie de production tournée prioritairement vers la satisfaction des besoins du peuple guadeloupéen. Une Guadeloupe avec des femmes et des hommes capables d’inventer une nouvelle société ». Les combats des peuples encore colonisés par l’impérialisme français sont entrés dans une période de haute intensité. Une solidarité constante est plus que jamais nécessaire.