Du GATT à l’OMC
Le GATT
La reconstruction d’après-guerre, orchestrée par les Nations Unies et les Etats-Unis, prend deux directions principales : la création d’un ordre monétaire représenté par le FMI et la Banque mondiale et celle d’un ordre commercial international, avec la tentative de mise en place d’une Organisation internationale du Commerce (OIC). Mais cette organisation spécialisée de l’ONU ne verra jamais le jour.
En 1947, 23 Etats décident de détacher le chapitre du projet avorté relatif aux échanges de produits facturés et d’en faire l’Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT).A sa naissance, le GATT ne s’appliquait qu’au commerce des marchandises. Il sera, jusqu’en 1994, le seul instrument multilatéral régissant le commerce mondial. Son objectif prioritaire vise à abaisser les barrières tarifaires, les droits de douane sur le commerce des marchandises. C’est ainsi que, en liaison avec une série de « rounds » ou cycles de conférences commerciales multilatérales, organisés périodiquement à partir de 1947, les droits de douane, appliqués à des milliers d’articles, auront été ramenés en moyenne de 40% à moins de 5%. La diminution des tarifs douaniers s’opère surtout sur les produits exportés au Sud par les ETN et les Etats du Nord.
EN 1986, se tient la Conférence ministérielle de Punta del Este en Uruguay. Elle lance le 8e Round (1986-1993). Ce cycle opère un tournant dans les négociations commerciales : il intègre quatre nouveaux secteurs : l’agriculture, les services, la propriété intellectuelle et les investissements. A la suite de huit années de difficiles négociations, les accords de l’Uruguay Round sont signés à Marrakech, le 15 avril 1994 : 123 pays entérinent ce dernier cycle du GATT et donnent le coup d’envoi à l’Organisation mondiale du commerce (OMC), qui succède officiellement au GATT, le 1er janvier 1995.
Servant de cadre institutionnel commun, l’OMC a d’abord pour fonction d’administrer l’ensemble des accords de Marrakech. Son ambition est de relancer un nouveau cycle de négociations, pour développer le libre-échange sur l’ensemble de la planète, seul moyen, de son point de vue, de garantir la stabilité et le développement du commerce mondial.
Le fonctionnement de l’OMC
L’OMC est une organisation politique (comme le FMI et la Banque mondiale). Elle comptait, début 2002, 144 Etats membres. La Conférence ministérielle (assemblée générale) est en principe l’organe décisif de l’OMC. Elle regroupe les représentant(e)s de tous les pays membres et se réunit au moins une fois tous les deux ans (Singapour en 1996, Genève en 1998, Seattle en 1999, Doha en 2001, Cancún en 2003).
Le véritable pouvoir de l’OMC se situe dans le Conseil général, composé des ambassadeurs des pays membres, accrédités auprès de l’OMC, à son siège central de Genève. Les Etats qui en ont les moyens nomment un ambassadeur spécial. Une quarantaine de pays en développement n’ont pas les moyens de suivre les travaux au sein du Conseil général. Certains réussissent seulement à s’offrir un ambassadeur commun à plusieurs pays.
Le Conseil général est encadré de deux organes majeurs et complémentaires : l’Organe de règlements des différends (ORD) et l’Organe d’évaluation des politiques commerciales (OEPC), dans lequel on retrouve, aux côtés de l’OMC, le FMI et la Banque mondiale. Pour l’administration et la mise en œuvre des accords, le Conseil général de l’OMC est assisté de conseils et comités permanents, dotés d’une large autonomie. Ces derniers peuvent à leur tour créer des organes subsidiaires qui établissent leurs règlements intérieurs respectifs.
L’OMC a, à sa tête, un Directeur général. Ce poste fut d’abord occupé jusqu’en 1999 par l’Italien Renato Ruggiero, ancien grand manager de la Fiat à Turin. Après sa démission, une guerre de succession éclata. Finalement, un armistice fut conclu, un compromis trouvé : le mandat fut coupé en deux. Le Néo-Zélandais, Mike Moore, fut nommé Directeur jusqu’au 1er septembre 2002, le Thaïlandais, Supachai Panitchapakdi lui succéda à cette date.
L’OMC : le pouvoir invisible
Entre l’OMC et le GATT, il existe une différence fondamentale.
Le GATT était une simple union douanière. Il mettait en jeu des règles commerciales s’appliquant pour l’essentiel à un champ délimité, celui des barrières tarifaires et de certaines restrictions quantitatives aux échanges de biens et de marchandises. Les questions commerciales étaient traitées en lien direct avec les secteurs économiques concernés, sans interférence avec le reste de la société.
Avec l’OMC, les règles commerciales s’étendent à un champ considérable de nouveaux domaines : les services, la propriété intellectuelle, les investissements, les services financiers, les marchés publics, les télécommunications, les transports, etc.
Nombre des 29 Accords sectoriels de l’OMC font entrer dans la juridiction de l’OMC des secteurs sans rapport avec le commerce, simplement en ajoutant la périphrase « lié au commerce ». En rendant commercialisable tout bien ou service, ils transfèrent à des entreprises privées, n’assumant aucune responsabilité face à la société, des secteurs relevant traditionnellement de politiques publiques.
En fait, l’objectif fondamental de l’OMC est de mettre en compétition toutes les économies du monde et de livrer des pans entiers de celles-ci à l’appétit des entreprises transnationales.
A la différence du GATT, l’OMC est une organisation inter-étatique, avec un pouvoir de coercition et de sanctions étendu. L’OMC est une institution qui cumule les trois fonctions : législative, exécutive et judiciaire. L’OMC entend régenter l’ensemble des activités humaines, faisant prévaloir ses règles du « libre échange » sur toute autre considération, qu’elle soit sociale, environnementale, culturelle...Non seulement, les règles de l’OMS s’appliquent l’échelle nationale, mais les accords obligent les pays membres à les faire respecter à tous les niveaux « subterritoriaux ». C’est à travers l’Organe de règlements des différends (ORD) que l’OMC exerce sa fonction exécutive et judiciaire. A l’occasion d’une plainte d’un des pays membres, l’OMC peut déclarer contraires à la « liberté du commerce » les législations internes aux Etats, en matière de droit au travail, d’environnement, de santé publique et en demander la mise en sommeil ou l’abrogation. Et s’il le fait, l’OMC peut donner le feu vert à des représailles commerciales.
Les trois règles de base de l’OMC
Pour imposer le « libre-échange », c’est-à-dire la loi des plus forts, l’OMC a mis en place, avec l’accord des Etats membres, trois mécanismes de base : « la clause de la nation la plus favorisée », « la clause du traitement national » et « l’organe de règlement des différends ».
La clause de la nation la plus favorisée
Ce principe requiert qu’un pays membre de l’OMC, qui accorde un traitement favorable à un autre pays signataire en matière d’importation et d’exportations de services, accorde le même traitement à tous les autres pays signataires.
La « non discrimination » est un principe fondateur du GATT et de l’OMC. Si une faveur est accordée à un partenaire, les autres membres doivent en bénéficier.
Ceci rend par exemple caduque les Accords de Yaoundé, puis de Lomé, qui caractérisaient, de 1963 à 1995, le système de relations commerciales préférentielles non réciproques avec les pays ACP (d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique). L’Accord de Cotonou, en 2002 (qui s’inspire des traités fondateurs de l’OMC) remplace les mécanismes et les politiques de solidarité par la compétition économique et commerciale.
L’article 34,4 de l’Accord est limpide à cet égard, quand il stipule que « le but ultime de la coopération économique et commerciale est la transition vers l’économie mondiale libéralisée ».
C’est au nom de la clause de la nation la plus favorisée que l’OMC a déjà condamné à deux reprises (en 1997 et 1999), par l’intermédiaire de son organe de règlement des différends l’Union européenne pour son système préférentiel d’importation de bananes des pays ACP et autorisé les Etats-Unis à appliquer des sanctions commerciales contre l’UE pour son attitude discriminatoire dans le commerce de la banane. En vertu des Accords de Lomé, certains produits (dont la banane), en provenance des pays ACP, sont payés aux petits producteurs locaux à un prix supérieur au marché mondial. De plus, plusieurs pays européens limitent les importations de « bananes dollars », en provenance des grandes exploitations d’Amérique centrale et latine, appartenant aux grandes multinationales américaines (Chiquita, Dole, Del Monte). La plainte fut introduite par ces multinationales auprès du gouvernement des Etats-Unis, qui l’a introduite à son tour auprès de l’ORD de l’OMC. Celui-ci a autorisé les Etats-Unis à imposer des sanctions commerciales contre l’UE, d’une valeur annuelle de 191 millions de dollars. Les sanctions se sont traduites notamment par l’augmentation de 100% des droits de douane américains sur certains produits provenant des pays de l’UE. Les deux parties (Etats-Unis et Union européenne) sont parvenues à un accord en avril 2001. Celui-ci prévoit que le 1er janvier 2006, les importations ne seront plus soumises à des quotas. Autrement dit, les pays ACP n’auront plus de quantité réservée. Ce sera la libéralisation du marché européen de la banane. Dans l’immédiat, les pays ACP se voient réserver un quota de 750 000 tonnes sur le marché européen, sans droits de douane.
Il faut toutefois souligner que les accords préférentiels entre l’UE et les pays ACP ne relèvent pas de la philanthropie : 60% à 80% de l’aide à destination des pays ACP reviennent dans l’union européenne sous la forme d’acquisition d’équipements, de services ou d’honoraires somptueux versés à des experts qui en sont issus.
La clause du traitement national
Ce principe stipule que les entreprises étrangères, présentes sur le marché d’un pays donné, bénéficiant d’un traitement au moins aussi favorable que les entreprises nationales, oeuvrant sur ce même marché.
Ainsi, les firmes transnationales, qui s’installent dans un pays membre de l’OMC, doivent être mises sur le même pied que les producteurs locaux. Ceci implique que le même accès à tous les secteurs d’activité leur soit garanti et que les aides et avantages octroyés aux entreprises nationales ou locales leur soient également accordés. Déjà, des aides et exonérations fiscales sont octroyées, de manière préférentielle, aux ETN.
Ces deux règles implacables touchent aujourd’hui les secteurs stratégiques, inclus dans les accords du GATT et de l’OMC : l’agriculture, les services, la propriété intellectuelle, les investissements...
L’Accord du GATTT-OMC sur l’agriculture, avec l’ouverture forcée des frontières dans les pays du Sud et leur mise en concurrence directe, a déjà ruiné des millions de paysans. L’Accord général sur le commerce des services (AGCS/ GATS) a déjà provoqué la privatisation de nombreux services publics et menace aujourd’hui des secteurs comme l’éducation et la santé. L’Accord sur les droits de propriété intellectuelle liés au commerce (ADPIC/TRIPS) transforme le patrimoine génétique de l’humanité en marchandise et permet son accaparement par les ETN.
L’organe de règlement des différends (ORD)
Nulle part n’apparaissent les mots « juges », « tribunal », « jugements » ou « cour ». L’OMC maintient la fiction d’une pure organisation commerciale, alors que dans l’une de ses dimensions essentielles, elle est une machine judiciaire aux pouvoirs de coercition étendus.
C’est précisément l’Organe de règlement des différends (ORD) qui renferme le mécanisme judiciaire. C’est ce qui confère à l’OMC une importance qu’aucune autre institution internationale n’égale (sauf le Conseil de Sécurité de l’ONU, lorsqu’il se met d’accord pour appliquer le chapitre VII de la Charte des Nations unies.
L’ORD est le tribunal du commerce international au service des firmes transnationales ; c’est une cour de justice internationale permettant à l’OMC d’imposer le respect, par les pays signataires, des obligations multilatérales, dans le cadre du « libre-échange ».
Les plaintes sont, pour l’essentiel, introduites par des firmes transnationales dont les Etats se font les interprètes auprès de l’OMC. L’ORD établit des groupes spéciaux (panels), constitués chacun de trois juges, experts privés qualifiés en droit international. Ces groupes spéciaux se réunissent en « séance privée », délibèrent à huis clos. Leurs verdicts sont assortis de représailles commerciales. C’est au pays plaignant, qui a gain de cause, de mettre en œuvre ces mesures de représailles, équivalentes aux dommages estimés, subis par son économie.
Les principales critiques faites au système de l’ORD sont les suivantes :
Une des garanties éprouvées pour empêcher l’arbitraire, c’est la séparation des pouvoirs. Or, l’OMC concentre en son sein des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire, concentration qui en fait une institution d’autant plus puissante qu’elle n’est soumise à aucun contrôle. Cette organisation est la seule, au niveau mondial, qui soit en mesure d’ignorer la souveraineté des Etats et de leur imposer de modifier leurs normes nationales et locales.
Les Etats, dont la mission première est de protéger l’intérêt général de leurs citoyens, sont transformés en avocats obligés des acteurs économiques privés. Déjà fortement soumis aux pressions des entreprises privées, nationales et multinationales, les Etats se voient investis d’un rôle qui accroît leur dépendance par rapport à ces intérêts particuliers.
L’ORD est un mécanisme de facto réservé aux pays industrialisés. On voit mal, en effet, des pays en développement, dépendants politiquement, financièrement et économiquement, par exemple, de leur ancienne métropole, introduire des actions contre celle-ci. Le recours à des mesures de rétorsion est hors de la portée des pays en développement. Par contre, elles peuvent être gravement dommageables si elles sont utilisées contre ces pays par les pays industrialisés. Enfin, l’engagement d’une plainte requiert des ressources humaines et financières considérables qui font souvent défaut dans les pays les plus pauvres. L’examen des différends, soumis à l’ORD depuis sa création, montre que les principaux utilisateurs de ce mécanisme sont, d’une manière écrasante, les pays industrialisés.
Le caractère confidentiel des délibérations des groupes spéciaux et de l’organe d’appel constitue un autre manquement aux principes généraux du droit. La publicité des débats est une des garanties d’une justice équitable. Elle n’existe pas à l’ORD. Des experts sans légitimité démocratique, dont l’indépendance est susceptible d’être questionnée, peuvent, dans le plus grand secret, remettre en cause la souveraineté d’un Etat et exiger l’abrogation de normes nationales voire locales dans le domaine, par exemple, des droits humains, de la santé, de l’environnement, des services, au motif qu’elles constituent des « obstacles au commerce ».
Lorsqu’une de ses lois est attaquée par le tribunal de l’OMC (et cela en référence avec les règles fondamentales de l’Organisation et ses différents Accords), un pays a trois options : abroger ou amender la loi en question, s’arranger pour verser une compensation financière au pays plaignant ou s’exposer à des sanctions commerciales.
Les firmes transnationales et l’OMC
La Sous-Commission de la promotion et de la protection des droits de l’Homme de l’ONU a chargé deux experts, lez professeur ougandais Oloka Onyango et sa collègue, Deepika Udagama, de mener une enquête sur l’influence des firmes multinationales au sein de l’OMC. Leur rapport fut publié le 15 juin 2000, sous le titre « Le contexte institutionnel du commerce international, de l’investissement international et de la finance internationale ».
Les conclusions de cette enquête sont résumées, dans le Rapport, par la phrase suivante : « L’OMC est presque totalement entre les mains des sociétés transcontinentales privées ». Il s’agit désormais d’un document officiel des Nations unies (sous la référence : E/CN4/Sub.2/2000/13).
Fait hautement symbolique, à la troisième Conférence de l’OMC à Seattle (novembre-décembre 1999), le président américain, Bill Clinton, était entouré, pour la circonstance, des PDG de deux firmes transnationales parmi les plus puissantes de la planète : Bill Gates pou r Microsoft et le directeur de Boeing. Ces deux firmes ont leur maison-mère à Seattle.
Avant cette même Conférence, Mme Charlotte Barshefsky, représentante spéciale du président Clinton pour le commerce, a demandé à la Coalition des Industries de Services de préciser ses desiderata pour pouvoir les soutenir dans les négociations internationales. La réponse de la dite Coalition a valeur de programme : « Encourager l’extension de privatisations, promouvoir la réforme des réglementations dans un sens qui favorise la concurrence, obtenir l’accès aux marchés et le traitement national permettant la fourniture transfrontalière de tous les services de santé, faire admettre le droit de propriété privée étrangère majoritaire dans les établissements de service de santé ».
Les Accords ADPIC, sur les droits de propriété intellectuelle, ont en fait été formalisés par les principales firmes transnationales, issues des secteurs de la chimie, de la pharmacie, de l’informatique, du divertissement et du logiciel (Bristol-Meyers, CBS, Du Pont, General Electric, General Motors, Hewlett-Packard, IBM, Johnson et Johnson, Merck, Monsanto, Pfzizer, etc.)
Les experts de la firme transnationale agro-chimique, Monsanto, ont été jusqu’à écrire eux-mêmes la proposition de traité concernant les brevets sur les OGM (organismes génétiquement modifiés), un élément clé de la stratégie commerciale du secteur des biotechnologies. C’est James Enyart, un cadre de Monsanto, qui l’a raconté. « Nous sommes allés à Genève présenter notre document au secrétariat du GATT, l’ancêtre de l’OMC. Ce que je vous dis là est tout à fait inédit dans l’histoire du GATT. L’industrie a identifié un problème majeur lié au commerce international. Elle a proposé une solution, l’a transformée en proposition concrète et l’a vendue à notre gouvernement et aux autres gouvernements ».
Au sein de l’ORD (organe de règlement des différends de l’OMC), les plaintes sont, pour l’essentiel, introduites par des firmes transnationales, dont les Etats se font les interprètes auprès de l’OMC.
Le « Comité 133 », lié à la Commission européenne, est composé de hauts fonctionnaires nationaux et de représentants de la Commission. C’est le lieu où s’échangent les informations, où les Etats membres et la Commission prennent des décisions, à partir de propositions rédigées par la Commission en concertation avec le secteur privé.
Organisés à chaque échelon, du national au mondial, et focalisés sur des secteurs et des domaines diversifiés, les groupes de lobbying des entreprises utilisent un large éventail de discours et de méthodes en vue d’influencer les décideurs politiques à tous les niveaux.
Réformer, soumettre ou démettre l’OMC
C’est le titre d’un Appel international, dit « Appel de Boston ».
« Le moment est venu, souligne l’Appel, de reconnaître que le commerce international et son institution principale, l’OMC, sont en crise. Il est temps de remplacer ce système caduc, inique et oppresseur par un cadre d’échange équitable et durable pour le 21e siècle ».
« La déclaration des membres de la société civile internationale s’opposant aux négociations de commerce du cycle du millénaire », recueillait, avant la Conférence de Seattle, quelque 1200 signatures de 87 pays. Le message était le suivant : « Nous nous opposons à toutes négociations allant dans le sens d’une plus grande libéralisation, spécialement celles qui visent à introduire de nouveaux secteurs sous la tutelle de l’OMC, tels que l’investissement, la concurrence et les marchés publics (...). Nous appelons à un moratoire sur toutes les négociations qui étendent la portée et le pouvoir de l’OMC. Au cours de ce moratoire, une révision et une évaluation complètes et approfondies des accords existants doivent être menées ».
Les multiples appels participent tous d’une même démarche d’ensemble, d’une critique de l’ordre néolibéral. Ils mettent, de façon complémentaire, l’accent sur trois exigences.
La première consiste à subordonner la loi marchande qu’incarne l’OMC au respect de la Déclaration universelle des Droits de l’homme et des conventions internationales qui en découlent et relatives aux questions sociales, environnementales, sanitaires, etc.
La deuxième réaffirme la primauté du politique sur l’économique et, par conséquent, le contrôle citoyen sur l’OMC et ses activités.
La troisième, qui conditionne en quelque sorte les deux premières, refuse l’acceptation du fait accompli de l’OMC et implique un moratoire sur toutes les négociations visant à renforcer encore le pouvoir de l’OMC.
L’Appel de Boston estime que les droits sociaux et les besoins vitaux (alimentation, eau, services publics, santé, éducation, préservation des espèces vivantes, etc.) ne peuvent passer sous le contrôle de l’OMC.
Il estime également que « l’ORD, tribunal de l’OMC, est inacceptable. Il opère dans le secret, selon des procédures antidémocratiques. Ses verdicts contraignent à l’application d’un ensemble de règles injustes. Il usurpe par ailleurs les fonctions législatives et réglementaires des Etats souverains et des collectivités territoriales ».
Plusieurs coordinations anti-OMC avancent la création d’une Cour de justice économique internationale, composée de juristes professionnels et indépendants de l’OMC. Ses règles seraient soumises aux textes fondamentaux : la Déclaration universelle des Droits de l’homme, les pactes et conventions de l’ONU ou encore les normes fondamentales de l’Organisation internationale du travail (OIT et BIT).