La répression ne faiblit pas en Tunisie
Après la criminalisation de la contestation pacifique dans le bassin minier de Gafsa (1), le régime despotique tunisien s’attaque à la solidarité des Tunisiens de l’étranger. Essghayer Belkhiri, résidant à Nantes, a été arrêté cet été en Tunisie et a subi des traitements inhumains durant plus d’un mois, avant d’être remis en liberté. Le président de la Fédération des Tunisiens pour une citoyenneté des deux rives (FTCR), Mouhieddine Cherbib, résidant à Paris, a été récemment inculpé par le parquet de Gafsa pour, entre autres, « participation à une entente établie dans le but de préparer ou de commettre un attentat contre des personnes ou des biens ».
Les procès se multiplient. Ils ont vu, entre autres, une enseignante, Zakia Dhifaoui, condamnée à quatre mois de prison ferme pour avoir participé à une manifestation pacifique, organisée par les femmes de la région de Gafsa. Le principal procès aura lieu en octobre et concerne 38 inculpés, dont Adnan Hajj et Mouhieddine Cherbib.
Le pouvoir tente d’imputer aux dirigeants syndicaux la responsabilité des morts et blessés lors des événements du 6 juin. Alors que les prétendus « amis de la Tunisie », à commencer par Nicolas Sarkozy, se taisent sur cette situation, le mouvement unitaire de solidarité avec les habitants de Redeyef et du bassin minier de Gafsa, qui a organisé en France plusieurs rassemblements, dont celui du 23 septembre à Paris, doit s’amplifier pour réclamer l’abandon immédiat des poursuites engagées et la libération de toutes les personnes emprisonnées.
LCR, Rouge
Note
1. Lire Rouge n° 2260 du 10 juillet 2008 et sur ESSF : Tunisie : l’été de tous les dangers
* Paru dans Rouge n° 2268, 02/10/2008 (Au jour le jour).
Pour des droits en Tunisie
Communiqué de la CGT
La CGT est particulièrement préoccupée par les attaques contre les droits humains qui se développent actuellement en Tunisie.
Les associations de défense des droits humains subissent un harcèlement et une répression permanente.
La population de la région de Gafsa vit en état de siège pour avoir revendiqué le droit à une vie décente.
De nombreux syndicalistes de cette région sont victimes de procès et de condamnations arbitraires.
Et des militants associatifs tunisiens vivant en France sont poursuivis pour avoir exprimé leur solidarité.
Nous exigeons la libération de tous les prisonniers et inculpés et l’abandon par les autorités tunisiennes de toutes ces poursuites injustifiées.
Nous demandons au gouvernement français d’intervenir en ce sens auprès des dirigeants tunisiens.
Nous exprimons notre entière solidarité envers tous ces militants qui luttent contre la pauvreté, pour le droit au travail, pour le droit à l’activité syndicale et à la solidarité.
Montreuil le 23 septembre 2008
La répression dans le Sud tunisien ne connaît pas de répit
Tunisie. Plus de 40 syndicalistes et militants du mouvement social du bassin minier de Gafsa sont passibles de lourdes peines de prison. Manifestation de solidarité ce soir à Paris.
Plusieurs partis politiques françai,s dont le PCF et la LCR, et tunisiens, dont Ettajdid-France, le PCOT (Parti communiste ouvrier tunisien), le PDP-France (Parti démocratique progressiste, Tunisie) ainsi que plusieurs ONG dont la FTCR (Fédération des Tunisiens pour une citoyenneté des deux rives), ATTAC, Cedetim, LDH, AMF, AMTF appellent un rassemblement ce mardi à Paris pour dénoncer la répression frappant des syndicalistes, des militants politiques et associatifs ainsi que de simples citoyens en Tunisie, ce mardi à Paris (1).
un mouvement d’une grande ampleur
Les faits. Depuis le début de l’année, le bassin minier de Gafsa (5 000 salariés) dans le Sud tunisien est le théâtre de manifestations populaires contre le chômage frappant cette région (30 %), notamment celui des jeunes diplômés, la flambée des prix, la mal-vie, la corruption et le sous-équipement. Détonateur de cette crise sociale sans précédent, la publication des résultats jugés frauduleux d’un concours d’embauche de la Compagnie des phosphates de Gafsa (CPG). Le siège régional de l’UGTT (syndicat des travailleurs tunisiens) à Redayef est occupé par des jeunes chômeurs en colère, vite rejoints par des mineurs et leurs familles. Le mouvement s’étend à toute la région. De crainte qu’il ne s’étende à d’autres régions de la Tunisie, le gouvernement déploie des centaines de policiers épaulés par des unités militaires. Le bassin minier est pratiquement coupé du reste du pays. Des check- points interdisent l’accès à la région et les journalistes qui essaient d’informer sont sévèrement punis.
C’est le cas de Zakia Dhifaoui, enseignante, qui écrit
à l’occasion pour Mouatinoune, l’organe de son mouvement, le Front démocratique des libertés publiques (FDLP). Elle a été arrêtée le 27 juillet, alors qu’elle couvrait la manifestation des femmes de Redayef réclamant la libération de leurs maris et enfants incarcérés après des affrontements ayant fait une première fois un mort et 28 blessés. Et condamnée en seconde instance le 12 septembre à 4 mois et demi de prison ferme en même temps que quatre syndicalistes (3 mois ferme). Une peine suffisante pour qu’elle soit considérée en abandon de poste en ce début de rentrée scolaire et radiée de la fonction publique !
Un pouvoir toujours répressif
Avec elle, ils sont 41 personnes, sans doute plus si on compte tous ces jeunes condamnés à la prison pour « casse » - dont le porte-parole du mouvement social Adnan Hadji -, en instance de jugement sous l’inculpation d’atteintes à l’ordre public et voies de fait et qui risque de lourdes peines de prison. Cas à part, celui de Mouhieddine Cherbib, président de la FTCR, résidant en France, déclaré « en fuite » par la justice tunisienne et inculpé entre autres par le parquet de Gafsa (tenez-vous bien) d’« appartenance à une bande, participation à une entente établie dans le but de préparer ou de commettre un attentat contre des personnes ou des biens » ! En vertu de la loi antiterroriste, il risque une peine de dix ans d’emprisonnement ! Son seul crime, en réalité, est d’avoir exprimé sa solidarité et pris part à l’organisation de manifestations de soutien aux salariés et leurs familles du bassin minier en butte à une sévère répression.
(1) Le rassemblement a lieu aujourd’hui à 18 heures devant la station de métro Saint-François-Xavier (ligne 13) à proximité de l’ambassade de Tunisie.
Hassane Zerrouky