New Delhi, correspondant
« Nous sommes en guerre. » La formule alarmiste agitée par le quotidien The Time of India dans son éditorial, lundi 15 septembre, résume le désarroi dans lequel est plongée l’Inde après les sanglants attentats ayant frappé, samedi, la capitale New Delhi.
Une série de cinq explosions synchronisées dans trois sites différents – Connaught Place, Karol Bagh et Greater Kailash-1 – ont fait 21 morts, selon la police (les sources hospitalières évoquent 24 tués) et une centaine de blessés.
Les bombes visaient des artères commerciales très fréquentées un samedi après-midi. Trois autres engins explosifs ont été désamorcés à temps par la police.
Un groupe islamiste, les Moudjahidins indiens, a revendiqué les attentats dans un courriel adressé à des stations de télévision. « Les Moudjahidins indiens ont encore frappé pour que vous sentiez les conséquences désastreuses de l’injustice et l’oppression infligées aux musulmans à travers le pays », proclame le message. Le groupe avait également assumé la paternité des attentats de Jaipur dans l’Etat du Rajasthan le 13 mai (au moins 61 morts), de Bangalore dans l’Etat du Karnataka le 25 juillet (2 morts), et d’Ahmedabad dans l’Etat du Gujerat le 26 juillet (58 morts).
Quatre vagues d’attentats en quatre mois : l’Inde prend brutalement conscience que le terrorisme, jusque-là imputé à des manœuvres de déstabilisation du Pakistan, s’enracine désormais au cœur même de la communauté musulmane indienne (environ 150 millions de fidèles, soit 14 % de la population totale) dont une frange s’est radicalisée ces dernières années.
De l’avis des analystes, cette rupture remonte à la flambée de violences antimusulmanes qui a embrasé Ahmedabad en 2002 à l’instigation du Bharatiya Janata Party (BJP), mouvement nationaliste hindou, au pouvoir dans l’Etat du Gujerat. Ces pogroms avaient fait environ 2 000 morts et attisé la soif de vengeance au sein d’une partie de la jeunesse musulmane contaminée par l’idéologie du djihad.
« ECHEC » FACE À LA VIOLENCE
Prenant le contre-pied de journaux comme The Times of India ou Hindustan Times, qui préconisent un durcissement de la législation antiterroriste, The Hindu appelait dans son éditorial de lundi à chercher la source de cette dérive dans « la rage alimentée par l’échec déprimant de l’Inde à agir contre les auteurs de la violence de fondamentalistes hindous ».
Selon les experts en terrorisme cités par la presse indienne, les Moudjahidins indiens, un groupe encore mal connu, recrutent parmi les troupes du Mouvement islamique des étudiants d’Inde (SIMI), interdit par le gouvernement de New Delhi.
Ils recevraient le soutien logistique ou financier de mouvements comme le Lashkar-e-Taiba (LeT), basé au Pakistan et opérant traditionnellement dans le Cachemire indien, et Harakat-ul-Jihad-al-Islami (HuJI), basé au Bangladesh. New Delhi a renforcé les mesures de sécurité dans d’autres métropoles indiennes, comme Calcutta et Bombay.
Frédéric Bobin
* LE MONDE | 15.09.08 | 11h06 • Mis à jour le 15.09.08 | 11h06.
Série d’explosions à New Delhi, revendiquées par un groupe islamiste
Un groupe islamiste, Les Moudjahidins indiens, a revendiqué la série d’explosions qui a frappé la capitale, New Delhi, samedi 13 septembre, faisant entre trois et cinq morts, selon l’agence officielle Press Trust of India. La police avait fait état, plus tôt, de 20 à plus de 40 blessés, et précisé qu’il y avait eu quatre explosions, sans pouvoir dire si elles avaient été causées par des bombes.
Les explosions se sont succédé à quelques minutes d’intervalle dans trois zones commerciales bondées de la capitale de l’Inde. Selon les chaînes de télévision, qui ont diffusé des scènes de panique, elles ont eu lieu sur un marché très fréquenté et dans un parking. Plusieurs centaines de personnes se sont massées sur les lieux, tandis que la police s’efforçait de dresser un cordon de sécurité. Sur les images des télévisions, on pouvait voir des blessés ensanglantés gisant à terre et des sauveteurs les évacuant au milieu de carcasses de véhicules déchiquetés.
Le groupe des Moudjahidins indiens avait revendiqué la série d’explosions qui avait fait au moins 51 morts les 25 et 26 juillet à Bangalore et à Ahmedabad, faisant craindre une reprise des affrontements intercommunautaires entre hindous et musulmans. Ce groupe s’était aussi déclaré responsable d’une série d’attentats qui ont fait 61 morts à Jaipur, la capitale du Rajasthan, en mai. Il regrouperait, au sein d’une alliance disparate, les groupes islamistes du Harkat-ul-Jihad-al-Islami (HUJI) et du Lashkar-i-Taiba, liés à Al-Qaida. Le premier opère à partir du Bangladesh, le second à partir du Pakistan.
En octobre 2005, trois explosions attribuées à des groupes islamistes soutenus par le Pakistan avaient fait 66 morts à New Delhi. En 2001, un attentat contre le siège du Parlement indien, également mis sur le compte d’islamistes, avait tué 14 personnes.
* LEMONDE.FR avec AFP, Reuters et AP | 13.09.08 | 16h12 • Mis à jour le 13.09.08 | 19h00.