Le Parlement européen, qui siégeait à Strasbourg, a adopté par 369 voix contre 197 et 106 abstentions (El Pais, 19 juin 2008) la « directive retour » qualifiée par divers médias, pas excessivement subversif, de « directive de la honte ». Le quotidien français Libération fournit un résultat des votes très proches : 367 voix pour, 206 contre et 109 abstentions.
Parmi les abstentionnistes on trouve les membres du Parti démocrate (PD) italien de W. Veltroni, que certains qualifient encore comme étant de « gauche ». Cette abstention ne devrait, pourtant, pas susciter une interrogation. En effet, dès 2005, la discussion sur cette directive a été conduite, pour l’Italie, sous la houlette de Giuliano Amato, qui devint ministre du gouvernement Prodi.
Au sein de la délégation espagnole, 16 sur les 19 représentants du PSOE (parti socialiste) ont voté oui. Les opposants se sont concentrés dans le rang des Verts, de la Gauche unie et d’un secteur des eurodéputés membres des partis socialistes.
La Lettre ouverte d’Evo Morales [1], les prises de positions d’Amnesty International, du Haut-commissaire pour les réfugiés de l’ONU, la Lettre des mères de la Place de Mai (Argentine) ou encore la distribution de photos illustrant les conditions de détention dans les centres de permanence temporaires (CPT) en Italie n’ont pas convaincu les députés européens. On pouvait s’en douter.
D’ailleurs, Filippo Miraglia de l’organisation catholique italienne Arci (Association de promotion sociale) souligne que cette nouvelle directive « Viole les traités et conventions internationales telles la convention pour le droit des enfants. » L’ONG, internationalement reconnue, Save the Children effectue la même analyse.
Ainsi, le Parlement européen donne le feu vert à une politique d’immigration choisie, sélective – appliquée depuis assez longtemps – et à un renforcement d’une orientation sécuritaire et de répression contradictoire avec les principes mêmes de la Convention européenne des droits de l’homme, datant de 1950.
L’eurodéputé Willy Meyer a déclaré à juste titre : « La directive permettra de déporter huit millions d’immigrés qui ne disposent pas de garanties » (El Pais, 19 juin 2008). Certes, les employeurs ont trop besoin de ces immigrés taillables et corvéables à merci, pour tous les expulser. Ce qu’ils veulent : précariser leur situation à l’extrême, afin que le despotisme du capital puisse s’imposer plus aisément. Par cercles concentriques, les effets de ces mesures toucheront des secteurs de salarié·e·s, ceux déjà fragilisés, dans l’ensemble de l’Union Européenne.
L’adoption de cette directive n’empêche pas l’Union Européenne (UE) multiplie les déclarations sur « la libre circulation » au sein de l’Europe. Et cette Union Européenne de la « directive de la honte » reste présentée comme une institution démocratique exemplaire par la social-démocratie helvétique, qui depuis fort longtemps mène une politique strictement bourgeoise.