BRUXELLES BUREAU EUROPÉEN
La Commission européenne s’est refusée à tout commentaire officiel après l’annonce par Washington, mardi 3 juin, de nouvelles mesures imposées aux voyageurs qui veulent se rendre aux Etats-Unis sans visa. A partir de janvier 2009, ceux-ci devront en effet, trois jours avant leur départ, présenter une demande sur Internet afin d’obtenir une autorisation électronique de voyage, valable deux ans. Ils devront fournir, en remplissant un formulaire, toute une série de renseignements sur eux-mêmes et sur les raisons de leur voyage.
« Plutôt que de compter sur des procédures basées sur des feuilles de papier, ce système utilisera les moyens électroniques du XXIe siècle pour obtenir des informations de base sur ceux qui voyagent aux Etats-Unis sans visa », a précisé Michael Chertoff, secrétaire américain à la sécurité intérieure. Ces dispositions, explique Washington, visent, au nom de la lutte contre le terrorisme, à renforcer les contrôles aux frontières sans remettre en question les programmes d’exemption de visas dont bénéficient notamment quinze des vingt-sept Etats de l’Union européenne.
« Obtenir ces renseignements à l’avance permettra à nos agents de déterminer si le voyageur sans visa représente une menace avant d’embarquer dans un avion ou d’arriver sur nos côtes, a souligné M. Chertoff. C’est un moyen relativement simple et efficace de renforcer notre sécurité et celle des voyageurs internationaux, tout en contribuant à préserver un programme important pour nos principaux alliés. » Les informations demandées porteront notamment sur l’éventuelle implication du voyageur dans des activités terroristes. Le nouveau dispositif ne concernera pas seulement l’Europe, mais aussi l’Australie, la Nouvelle-Zélande, le Japon ou Singapour, qui font partie des vingt-sept pays exemptés de visas.
A Bruxelles, la Commission européenne, chargée de représenter les Etats membres en matière de visas, attend d’en savoir plus avant de fixer sa position. Elle veut se donner le temps d’étudier les documents américains pour s’assurer que les nouvelles mesures ne sont pas une manière déguisée de rétablir l’obligation d’un visa en imposant aux voyageurs des contraintes supplémentaires. Selon les autorités américaines, le formulaire que devront remplir les candidats au voyage ne différera pas de celui qu’ils doivent aujourd’hui remplir, sur papier, à bord de l’avion.
CONTEXTE DE TENSION
Dans l’entourage du commissaire européen Jacques Barrot, chargé du dossier, on se dit prêt à croire que le nouveau dispositif n’est pas contraire aux accords en vigueur mais on préfère s’en remettre aux résultats d’une évaluation à venir. On se demande en particulier s’il sera possible à un voyageur, en cas d’urgence, de partir pour les Etats-Unis sans respecter le délai de trois jours.
L’initiative américaine intervient dans un contexte de tension entre Washington et Bruxelles sur la question des visas. Les Etats-Unis ont choisi de négocier séparément avec chacun des Etats de l’UE qui ne bénéficient pas encore d’exemption de visas. Ils ont déjà signé des protocoles d’accord avec plusieurs d’entre eux auxquels ils ont promis des dispenses de visas si ces Etats acceptent la mise en place du système d’autorisation électronique ainsi que le partage de certaines données.
L’UE considère que ces sujets relèvent de la compétence communautaire, et non de celle des Etats membres. Elle a donné mandat à la Commission d’ouvrir des négociations globales avec Washington afin que tous les Etats membres soient exemptés de visas. Le dialogue a commencé au niveau des experts mais les Européens demandent aux Américains de clarifier leurs positions. Au nom de la réciprocité, ils envisagent par ailleurs de créer un système analogue d’autorisation électronique aux frontières de l’Union.