Notre association mène campagne depuis deux ans en vue d’une régulatio des pistolets à impulsions électriques « Taser X26 », du nom du modèl commercialisé par l’entreprise (SMP Technologies) qui a obtenu le monopol de ces armes sur le marché public, un marché représentant une dizaine d millions d’euros
En 2006, nous avons adressé un rapport au titre provocateur mais particulièrement détaillé et documenté pour attirer votre attention : « Taser : dernière gégène au pays des droits de l’Homme ? » En dépit d’une quinzaine de questions adressées par les parlementaires de tous bords au gouvernement à la suite de cette interpellation en vue d’une restriction de l’usage de cette arme aux unités d’élite de la police et la gendarmerie, la dotation de cet armement dont nous qualifiions déjà l’usage comme pouvant constituer de possibles traitements cruels, inhumains ou dégradants voire de torture, s’est répandu depuis à plus de 3 700 policiers, gendarmes et même gardiens de prison (en test dans un petit nombre de prisons françaises).
Hormis le classement de cette arme adressant une décharge de 50 000 volts en arme de 4e catégorie au même titre que les fusils à pompe et en interdisant par conséquent son achat par les particuliers, nous sommes obligés de reconnaître que notre action de sensibilisation, pourtant résolue, semble se conclure par un échec.
Malgré la rédaction de dizaines de rapports et communiqués de presse, la réalisation de multiples interviews, des contacts entrepris avec le ministère de l’Intérieur, le Conseil des droits de l’Homme de l’ONU, le Comité européen de prévention de la torture, notre action demeure vaine.
En France, une étape vers une société où tout contrevenant peut se voir infliger une douleur extrême ne semble pas poser question. Aucun débat au Parlement. Aucune étude scientifique indépendante.
Seul résultat tangible : un procès qui nous est intenté par l’entreprise commercialisant le Taser en France, la désormais célèbre entreprise SMP Technologies, pour « dépassement des limites de la liberté d’expression » et « dénigrement de l’image et la marque commerciale Taser ». L’audience est prévue au tribunal de grande instance de Paris le 30 juin. L’entreprise réclame pas moins de 50 000 euros de dommages-intérêts, 3 000 euros de frais d’avocat et 8 000 euros de frais de publication, à notre association, soit 60 fois notre budget annuel. Raidh est composée uniquement de bénévoles, des jeunes, qui ont eu l’outrecuidance de défendre les droits de l’Homme dans un pays qui aime encore rappeler l’histoire désormais ancienne de sa fameuse Déclaration.
Nous vous adressons cette lettre parce que madame la ministre de l’Intérieur, Michèle Alliot-Marie, nous a réservé la primeur d’une nouvelle qui fera date : l’autorisation de doter les policiers municipaux de pistolets de type Taser X26. L’électricité ne vaut que si elle est partagée par tous, visiblement. Le bon sens voudrait, qu’à droite, au centre comme à gauche, tout représentant de la souveraineté nationale prenne conscience du saut qualitatif et quantitatif que notre pays est sur le point de faire en abandonnant ses principes fondamentaux, garantissant à chacun le respect de la dignité humaine. Nous ne vous adresserons pas les multiples études, avis de la Commission nationale de déontologie de la sécurité, recommandations du Comité contre la torture de l’ONU, témoignages recueillis, vidéos insoutenables, preuves de conflit d’intérêt manifeste, pétitions signées par des milliers de citoyens, enfin les pressions judiciaires dont les organisations de la société civile ont été victimes. Tous ces documents sont sur le site de notre association (www.raidh.org).
Lassés de ce combat du pot de terre contre le pot de fer, nous ne pouvons que, en dernier recours, vous faire confiance et imaginer qu’un député, un sénateur, un élu du peuple, puisse poursuivre notre engagement en faveur du respect effectif des droits de l’Homme. Serez-vous celui-là ?