Le Sénat américain en session traite « mille sujets », voir son programme sur le Washington Post :
http://projects.washingtonpost.com/...
Dans le point ci-dessous extrait du programme de cette session se cache une aiguille dans une botte de foin, une sous-manière d’aborder les effets et conséquences de l’épandage de l’Agent Orange au Viêt Nam :
House Foreign Affairs (10 a.m.) : Asia, the Pacific, and the Global Environment Subcommittee holds a hearing on ”Burma in the Aftermath of Cyclone Nargis : Death, Displacement, and Humanitarian Aid.” Deputy Assistant Secretary of State Scot Marciel, of the Bureau of East Asian and Pacific Affairs ; Deputy Assistant U.S. Agency for International Development Administrator Greg Gottlieb, of the Bureau of Democracy, Conflict, and Humanitarian Assistance ; and Sein Win, prime minister of the National Coalition Government of the Union of Burma, testify. 2172 Rayburn.
Vous avez bien lu, les mots Agent Orange ne figurent pas dans le programme. Il faut aller chercher des traces de ce fléau dans le Sous-comité chargé de l’Asie, du Pacifique et de l’environnement mondial.
Devant les procès fait à l’Agent Orange sur plusieurs continents, notamment dans des pays alliés aux Etats-Unis d’Amérique et alignés, le fastidieux programme de cette session du Congrès US cache, parmi les innombrables sujets abordés par sa session, un « Sous-sujet » dans un Sous-comité : « les problèmes liés à l’Agent Orange et son contaminant, la dioxine. »
Il ne s’agit donc pas d’un génocide ni d’un crime contre l’humanité ni d’un crime de guerre mais simplement de « problèmes »…
Scot Marciel, Sous-secrétaire du Département d’Etat US pour l’Asie du Sud-est et Pacifique, aborde ce « Sous-sujet » dans un discours diplomatique dans lequel les USA échafaudent une coopération avec le Viêt Nam : « En même temps, les Etats-Unis n’acceptent pas d’être tenus pour responsable de dommages prétendument liés à l’Agent orange. Nous continuons à insister sur le fait que les discussions sur les effets de l’Agent orange doivent être basés sur des recherches scientifiques crédibles menées selon des standards internationaux. » déclare l’Honorable Scot Marciel, devant le Sous-comité chargé de l’Asie, du Pacifique et de l’environnement mondial, Comité des affaires étrangères, Washington, DC, le 15 mai 2008.
Rien n’a changé : « les Etats-Unis n’acceptent pas d’être tenus pour responsable de dommages prétendument liés à l’Agent orange. »
Et qui peut dire ce que sont des « standards internationaux » en matière de science ?
Pourtant, l’Institut médical de l’Académie Nationale des Sciences des Etats-Unis reconnaît une liste de maladies liées à l’Agent Orange ! Seulement pour ses vétérans ?
Scot Marciel n’a probablement pas prêté une oreille attentive aux propos de l’admirable Madame Nguyen Thi Ngoc Phuong, présente et intervenante, obstétricienne et ancienne directrice de la maternité de Tu Du d’Ho Chi Minh-Ville, qui manqua de bocaux pour conserver davantage de preuves des effets tératogène de l’Agent Orange tant il y avait d’enfants mort-nés et difformes.
« Nos liens renforcés (entre les USA et le Vietnam) nous ont permis de progresser dans des domaines allant de la libéralisation du commerce à la protection des libertés religieuses ou à la sécurité nucléaire. » ajoute Scot Marciel sans sourciller.
De la « sécurité nucléaire. » ? Tiens, les Etats-Unis avaient offert des bombes atomiques aux Français pour briser le siège de Dien Bien Phu, écrit Joseph Gerson (membre du Comité International de Soutien aux victimes vietnamiennes de l’Agent Orange et au procès de New York), co-fondateur de l’organisation états-unienne Unis pour la Paix et la Justice qui est la plus importante coalition pacifiste des USA, dans son livre L’Empire et la bombe : comment les USA utilisent les armes nucléaires pour dominer le monde, et Joseph Gerson ajoute : MacNamara, Secrétaire à la défense du Président Johnson, a prévenu que les « inhibitions » des Etats-Unis à utiliser les armes nucléaires au Vietnam « pourraient éventuellement être levées » ; en 1968, le Général Wheeler, précise Joseph Gerson, « a informé les sénateurs que les chefs d’états majors recommandaient l’utilisation d’armes nucléaires tactiques s’ils venaient à croire qu’elles étaient essentielles pour défendre les 6000 Marines assiégés à Khé Sanh ». Que dire alors des stocks de missiles nucléaires US et du non respect du Traité de Non Prolifération (TNP), mais peut-être que Monsieur Scot Marciel faisait simplement référence au nucléaire horizontal, donc à la première future centrale nucléaire vietnamienne en projet à l’horizon 2020.
Dans le discours diplomatico-révisionniste de Scot Marciel visant à minimiser le crime de masse qu’est l’utilisation de l’Agent Orange au Viêt Nam, les Etats-Unis tissent une coopération tous azimuts, mélangeant sida, trafic d’être humains, développement des régions du Centre (qu’ils ont copieusement arrosés d’Agent Orange), grippe aviaire, « pour aider ceux souffrant de handicaps, quelle qu’en soit la cause. », une façon d’oublier les victimes de l’Agent Orange en particulier. De même pour l’environnement : « …et aux autres toxines présentes dans l’environnement » précise Scot Marciel pour éviter une fixation sur la dioxine de l’Agent Orange. Il termine par : « et aiderons le Vietnam dans ses efforts pour promouvoir la qualité des soins prénataux visant à minimiser les handicaps. » Une confession ?
Non, quelques échographes simplement.
Il ressort de ce discours une volonté appuyée des Etats-Unis d’Amérique de diluer les effets et conséquences de l’épandage de l’Agent Orange au Viêt Nam dans une coopération dispersée et à moindre frais visant à gagner du temps –les générations sacrifiées passent- et par-dessus tout à désamorcer une accusation pouvant aboutir à un dédommagement onéreux.
Visiblement, une blessure ne se referme que lorsqu’une autre arrive. En France, celle de l’Indochine s’est « cicatrisée » lorsque celle de l’Algérie arriva. Cette dernière ne se referme donc pas complètement. Aux Etats-Unis, la blessure du Vietnam est encore là et les relations entre les deux pays reprennent quand la blessure de l’Irak, en deux temps, vient la recouvrir doucement. De la même manière, au Viêt Nam, l’ancien ennemi français devint ami quand un nouvel ennemi, l’Américain, prit sa place. Les nations ont les réactions primaires de l’individu.