Pékin, correspondance
Alors que la flamme olympique a fait son entrée en Chine, mercredi 30 avril, Pékin se prépare dans le plus grand secret à la porter au sommet de l’Everest (8 848 mètres). Le Toit du monde est le point culminant de la Chine, mais aussi du Tibet. Le régime communiste, confronté à des mouvements de protestation dans ses provinces de culture tibétaine, a déployé d’importants moyens pour préserver le parcours de la flamme de toute perturbation lors de cette étape hautement symbolique.
Côté chinois, les expéditions commerciales d’alpinistes ont dû annuler leurs opérations ce printemps. Seuls onze journalistes étrangers (et dix-neuf chinois) sont arrivés, lundi 28 avril, au pied de la montagne, trois jours seulement après avoir quitté Pékin. Il leur a été refusé de s’acclimater comme prévu à Lhassa, toujours interdite aux journalistes depuis les émeutes du 14 mars. La première dépêche de Nick Mulvenney, de l’agence Reuters, traduit la frustration de la presse, assignée dans un camp de mobil-homes, hors de vue d’un camp de base clôturé et gardé par l’armée : « Les températures négatives, le vent perçant et le mal des montagnes sont déjà pénibles, mais le manque d’informations sur le moment où la flamme débutera son ascension de l’Everest rend les journalistes doublement misérables », a-t-il écrit mardi. L’officiel en charge du seul briefing de la journée a précisé qu’il ne cachait rien : « La torche ira au sommet un jour de mai, quand les conditions seront les plus appropriées. »
Lundi, un journaliste japonais qui tentait de s’approcher du camp de base à pied a été refoulé. Mardi midi, des grimpeurs ont été vus à 6 500 mètres d’altitude, sur la chaîne d’information continue de la CCTV. Selon nos informations, les alpinistes sont parvenus à plus de 8 000 mètres. L’équipe de plusieurs dizaines de membres a équipé la montagne de cordes fixes, comme en 2007, quand douze personnes étaient arrivées au sommet et avaient testé une vingtaine de torches.
JOURNALISTE EXPULSÉ
Les grimpeurs attendent désormais le créneau météo qui leur permettra de lancer l’assaut final. Le vent doit être inférieur à 65 km/h et la visibilité suffisante pour obtenir des images de qualité. Selon Yan Giezendanner, routeur météo installé à Chamonix, ces conditions seraient réunies samedi 3 mai : « Pour l’instant, le vent est fort, 80 à 100 km/h. Vendredi, ça baisse mais il y a des nuages. Samedi sera parfait : pas de vent, beau temps. » Le versant népalais de l’Everest est également placé sous un contrôle très strict. A la demande de la Chine, le Népal a interdit les « activités séparatistes » sur la montagne. Le président de la région autonome du Tibet a ainsi déclaré que la Chine avait « la capacité et le pouvoir de contrecarrer toute perturbation et tout sabotage, à l’intérieur et à l’extérieur du pays ». Selon le site d’alpinistes américains mounteverest.net, une semaine avant l’annonce des restrictions à l’Everest le 7 mars, une banque d’Etat chinoise a accordé au Népal 121 millions d’euros pour la construction de deux centrales électriques.
Côté népalais, les alpinistes ont reçu l’ordre de ne pas dépasser 6 500 mètres tant que la torche n’aura pas atteint le sommet. Des soldats armés ont été positionnés à cette altitude. Un alpiniste américain a été refoulé du camp de base, il y a une semaine, après la découverte d’une banderole protibétaine dans son sac à dos. Enfin, lundi, un reporter de la BBC a été expulsé. Il avait été témoin de la visite de l’ambassadeur de Chine au camp de base de l’ascension de l’Everest sur le territoire du Népal.