A Pessac (Gironde), la droite, quasi inexistante et partageant l’essentiel de la politique de la mairie socialiste, n’a pas grand-chose à dire. Quant aux élus PCF et Verts, liés par une solidarité presque sans faille, ils sont rarement intervenus dans les séances du conseil municipal, s’aventurant au mieux à signer, sur proposition de la LCR, une pétition en faveur de la régularisation de sans-papiers ou contre la répression syndicale. Ce qui n’est pas contradictoire avec le fait que nous avons gagné une incontestable estime parmi certains élus de la majorité…
Ces sept années ont permis une expérience collective pour le groupe local LCR. Nous avons pu vérifier que notre intervention dans le conseil, sans illusion, mais en se faisant le relais de la révolte et des aspirations des plus démunis, des exploités, pouvait exercer une pression politique. Il en est de même des comptes rendus des conseils et de notre bulletin municipal diffusés sur les marchés et dans les boîtes aux lettres des cités.
Cette activité municipale nous a permis d’élargir notre intervention, d’associer de nouveaux camarades, de mener le débat avec les militants syndicaux, associatifs, politiques de la commune et des alentours. Nous avons essayé de mettre le petit écho que peut avoir un élu au service des résistances et des luttes : contre les licenciements à l’usine Solectron-Flextronics ; pour les salaires, lors des grèves des municipaux ou de la Scaso Leclerc ; contre la répression syndicale des postiers de Bègles ou l’intervention des CRS à la Monnaie ; ou encore en soutien aux luttes de sans-papiers comme dernièrement pour Kébé, militant du collectif de Montreuil emprisonné au centre de rétention administrative de Bordeaux, et finalement relâché.
Cela a été une aide pour populariser nos idées et regrouper ceux qui veulent agir, peser sur le cours des choses, faire de la politique. Cette année, 45 personnes, dont certaines sont partie prenante de la construction du nouveau parti, sont candidates de la liste « Pessac anticapitaliste et solidaire ».
PESSAC
57 000 habitants.
Principale entreprise : l’hôpital Sud du CHU, 4 000 salariés.
Depuis 2001, une élue LCR siège au conseil municipal sur 45 membres.
Les trois listes présentes en 2001 :
LCR 100 % à gauche (6,5 %, 1 159 voix, 1 élue), PS-PC-Verts (70,73 %, 33 élus PS, 3 Verts, 3 PCF), droite (22,77 %, 5 élus).
En 2001, la liste de la gauche plurielle était menée par Alain Rousset, contraint de laisser la place de maire à son ex-premier adjoint, Pierre Auger, afin de conserver celle de président de la région Aquitaine (et président des présidents de région) et de briguer celle de président de la communauté urbaine de Bordeaux (CUB). Alors que ce poste lui semblait acquis, deux voix PS lui ont préféré Juppé dans l’anonymat de l’isoloir… Il faut dire qu’un contrat de cogestion lie la droite et la gauche depuis plus de 40 ans à la CUB, sans autre « accroc » que ce ralliement avant l’heure. Ce n’est que grâce aux vacances forcées de Juppé au Canada que Rousset a récupéré le poste. Élu, l’an dernier, député de la 7e circonscription de Gironde, il a dû, depuis, démissionner de la CUB. Il brigue aujourd’hui la mairie de Bordeaux face à Alain Juppé : un semblant de duel après un long duo...
RELAYER LES LUTTES AU CONSEIL MUNICIPAL
A Pessac, comme dans toutes les communes un peu importantes, le conseil municipal n’est, la plupart du temps, qu’une chambre d’enregistrement. Tout est décidé à l’avance au sein de la majorité, plus exactement entre le maire, le président de la communauté urbaine de Bordeaux (CUB) ou de la région, quelques adjoints, les chefs de cabinet et le secrétaire général de la mairie. En conséquence, même si, officiellement, les séances sont ouvertes à tous, les bancs du public sont souvent vides. Non seulement il est impossible au public d’intervenir dans les débats, mais les débats eux-mêmes sont rares. Au cours des sept années écoulées, la LCR a été pratiquement seule à relayer, au sein du conseil municipal, les problèmes rencontrés par la population des quartiers et le monde du travail.
Cela a été le cas lors de la grève des agents municipaux de la commune pour « 150 euros pour tous », il y a un an, où j’ai été la seule élue partie prenante du mouvement. Le fait d’être présente au conseil a été un point d’appui pour la lutte. La séance du conseil municipal, à laquelle s’étaient invités plus de 150 agents, a laissé un souvenir cuisant à la majorité municipale, égratignant quelque peu son image « sociale » et « démocratique ». Le personnel était venu en nombre dire son désaccord avec la délibération soumise au vote concernant le régime indemnitaire, un système complexe de primes. Le maire refusant (au nom du règlement…) de donner la parole aux agents, j’ai lu en tant qu’élue la déclaration préparée avec les grévistes. Ils exigeaient 150 euros net mensuels pour les plus basses catégories et l’ensemble des précaires, soit la grande majorité du personnel. Les applaudissements des grévistes (un foulard sur la bouche pour dénoncer la censure), les réactions face à la fin de non-recevoir du maire, ont créé un certain émoi dans le conseil, relayé le lendemain avec sympathie par la presse. Une première démonstration réussie pour les grévistes. Il a néanmoins fallu quinze jours de débrayages quotidiens, des interventions auprès des parents d’élèves, la diffusion de tracts sur le marché rendant publics les salaires, pour que le maire cède, l’opinion publique prenant fait et cause pour les grévistes.
Une victoire qui a fait des petits, après que les militants l’ont fait connaître hors de la commune… Quelques mois plus tard, une grève identique éclatait dans la ville voisine de Cestas, là aussi avec le seul soutien actif de l’élu LCR de la commune. Il a fallu sept jours de grève totale et massive pour faire plier le député maire socialiste et obtenir 100 euros net de plus pour tous. Depuis quelques jours, c’est dans une autre commune voisine, à Bègles, que les agents municipaux sont en grève pour contester leur régime indemnitaire et revendiquer 200 euros minimum. Des militants CGT de Pessac ont été dans les assemblées générales raconter comment ils s’y étaient pris. Pour le moment, le maire, un certain Noël Mamère, crie à la « démagogie » et répond qu’il ne cédera pas « au chantage », comme ses homologues de Pessac ou de Cestas au début du mouvement…