ÉTUDIANTS : « Amplifier la mobilisation »
Alors que le bras de fer se poursuit entre le gouvernement et les étudiants, qui réclament le retrait de la loi Pécresse sur l’autonomie des universités, « Rouge » s’est entretenu avec Hegoa, porte-parole de la coordination nationale étudiante.
• Comment a commencé la mobilisation sur la fac du Mirail à Toulouse ?
Hegoa – On a commencé la mobilisation contre la loi Pécresse avec des assemblées générales (AG) qui réunissaient 400 étudiants, et nous avons fait du travail d’information pendant plusieurs semaines. Depuis trois semaines, l’université est bloquée par des piquets de grève, et on fait des AG deux fois par semaine, avec 1 200 étudiants environ. Le conseil d’administration du Mirail s’est positionné contre la loi Pécresse. Les enseignants et les personnels sont en grève. Tous les jours, on organise des débats et des projections de films dans les locaux de la fac.
• Pourquoi utiliser le blocage comme mode d’action ?
Hegoa – Dans les assemblées générales du Mirail, le blocage, que nous appelons piquet de grève, a permis de massifier le mouvement. Les étudiants n’ont pas la possibilité de déposer des préavis de grève comme peuvent le faire les salariés. Les cours à la fac sont obligatoires, il y a un risque, pour les étudiants grévistes, de ne pas pouvoir passer leurs partiels. Les étudiants boursiers, à partir de trois absences en cours, perdent leur bourse. C’est pourquoi aujourd’hui les blocages sont indispensables pour permettre à l’ensemble des étudiants de se mettre en grève.
• Que penses-tu du départ de l’Unef de la coordination nationale ?
Hegoa – Il faut savoir que l’Unef avait envoyé, à la coordination de Lille, des délégués qui n’étaient pas mandatés par des assemblées générales, nous avons donc voté pour que ces délégations ne puissent pas participer à la coordination. En retirant l’ensemble de ses délégués, l’Unef joue la division. Nous regrettons cette division qui affaiblit le mouvement. C’est pourquoi la coordination nationale appelle à l’unité du mouvement et demande à la direction de l’Unef de ne pas négocier avec le gouvernement et de se positionner pour l’abrogation de la LRU [loi sur les libertés et responsabilités des universités, dite l’autonomie des universités, NDLR].
• Comment vois-tu la suite de la mobilisation ?
Hegoa – Aujourd’hui, le mouvement continue de s’amplifier. Ce mouvement n’est pas minoritaire, les jeunes sont largement contre cette loi instaurant la privatisation des universités. La journée de grève du 20 novembre a montré que de nombreux salariés en avaient assez de leur situation. Dans plusieurs secteurs, la question de la grève reconductible se discute sérieusement. Même si les cheminots suspendent, pour le moment, leur grève, le gouvernement est encore loin d’avoir gagné la bataille. Nous, on pense qu’il faut continuer à se battre, amplifier la mobilisation et entraîner d’autres salariés dans la grève. La coordination étudiante appelle à une journée d’action interprofessionnelle, le mardi 4 décembre, pour que, tous ensemble, nous fassions reculer le gouvernement.
Propos recueillis par Nina Lacpe
LYCÉENS : Gagner, tous ensemble
Les lycéens ont tout intérêt à se mobiliser contre la loi Pécresse (présélection, hausse des frais d’inscription à la fac…) et pour améliorer leurs conditions d’étude.
Depuis le 20 novembre, cela commence à bouger dans les lycées. Pour cette journé de grève dans la fonction publique, une quarantaine de lycées a été bloquée et on débrayé pour partir en manifestation. Dans toutes les villes, les cortèges lycéens son venus grossir les cortèges des étudiants mobilisés. Le 22 novembre, lors de la journé d’action en direction des lycées, votée par la coordination nationale, ce sont plus de 5 lycées qui ont été bloqués
Les lycéens l’ont bien compris, la loi Pécresse sur l’autonomie des universités les concerne tout autant que les étudiants. Ce sont eux qui feront les frais de la mesure d’orientation active, une présélection à peine déguisée, qui pourra empêcher certains lycéens de s’inscrire à la fac. Ce sont eux aussi qui seront victimes de la hausse des frais d’inscription dans quelques années. Tout comme les étudiants, ce qui se joue avec cette loi, ce sont les futures conditions de travail des lycéens et la valeur de leurs diplômes sur le marché du travail.
Sans attendre la fac, les lycéens ont déjà des raisons de se mobiliser. Il suffit de regarder leurs conditions d’études : classes surchargées, disparitions d’options, bivalence des professeurs… Sans parler de la discipline, qui se durcit à vue d’œil : contrôle systématique des cartes de lycéens, pressions des administrations, coups de fil aux parents quand un lycéen se met en grève… Les lycéens ont toute leur place à prendre dans la lutte : contre la loi Pécresse, pour plus de moyens et de professeurs dans les lycées, et pour plus de droits pour les lycéens !
Comme le dit le slogan dans les manifestations : « Étudiants, lycéens, chômeurs et salariés : c’est tous ensemble qu’on va gagner ! » Face au gouvernement Sarkozy, on sait qu’il faudra un mouvement encore plus grand que celui contre le CPE pour le faire céder. L’enjeu de cette semaine est donc d’élargir la mobilisation. Il faut qu’un maximum de lycéens entre dans la bataille. Pour cela, il faut essayer de réunir des assemblées générales dans le maximum de lycées : pour discuter, échanger des arguments pour se convaincre, expliquer les dangers de cette loi. Il faut aussi tenter de bloquer. Seul le blocage permet à tous de se mobiliser sans être pénalisés par la tenue des cours.
Même si les cheminots ont suspendu leur grève, ils ont montré leur détermination et leur capacité de résistance. Leur combat n’est pas terminé. La grève du 20 novembre a prouvé que beaucoup de salariés en avaient assez de leur situation. Le gouvernement est encore loin d’avoir gagné. C’est le moment, pour continuer à nous mobiliser en cherchant à entraîner toujours plus de jeunes et de salariés.
Juliette Stein
VIOLENCES. Des commandos d’extrême droite sont entrés, lundi 26 novembre, à Tolbiac, avec la bénédiction de la présidence de l’université, et s’en sont pris aux étudiants du piquet de grève sous les applaudissements de membres de l’équipe présidentielle, certains d’entre eux participant même aux violences. Les grévistes ayant résisté et repoussé les commandos, le président de Paris 1 a fait appel aux CRS, qui sont intervenus avec une extrême violence, blessant plusieurs étudiants. Toutes les organisations étudiantes dénoncent l’attitude du président et de ses sbires. L’exigence de sa démission est à l’ordre du jour.