Je suis entrée chez les Verts en pensant que la démarche écologiste regrouperait forcément des individus critiques à l’égard du capitalisme et de sa logique de profit, insoutenable pour notre planète. Comme le dit Kenneth Boulding : « Celui qui croit qu’une croissance exponentielle peut continuer indéfiniment dans un monde fini est un fou, ou un économiste. » Or, il y a urgence : le capitalisme est entré dans une phase de son histoire particulièrement destructrice, aussi bien en termes sociaux qu’environnementaux. Ces deux questions ne sauraient d’ailleurs être disjointes, tant les dégradations écologiques (pollution, pressions sur l’eau potable, migrations forcées, etc.) touchent en premier lieu les plus démunis.
Or, que font nos forces de « gauche » face à cela ? Le social-libéralisme s’accommode fort bien de cette situation qu’il agrémente de petites touches sociales, destinées à mieux « faire passer la pilule ». Les discours récents « antigauchistes » des « jeunes lionceaux » montrent que cette position ne va faire que s’accentuer : la « réforme » socialiste sera centriste. Rien, donc, à attendre de ce côté-ci. Qu’en est-il du côté de l’écologie ? Pendant la campagne présidentielle, les comités Bové ne sont pas parvenus à tenir des positions écologiques claires (notamment sur la question du nucléaire) en raison de leur trop grande connivence avec des membres du PCF. Avouons, il est vrai, qu’en termes d’écologie, on fait mieux que le PCF...
Nous avons échappé au candidat écologiste de droite qui proposait dix gestes pour sauver la planète. Nul, cependant, ne peut être dupe du discours de Nicolas Hulot, prompt à responsabiliser (à « culpabiliser ») les individus, afin de laisser ses employeurs (Bouygues, notamment) agir en toute liberté. Comment peut-on décemment se proclamer écolo, faire de la pub pour les 4x4, travailler pour TF1 et flirter avec la famille Chirac ? Pourtant, la propagande médiatique a permis une telle confusion.
Et puis, bien sûr, il y a eu la candidate de mon parti, « Dominique Voynet, la révolution écologique » : voilà une formule qui résume pleinement la contradiction des Verts. Contradiction qui consiste à vouloir concilier l’inconciliable : la prise de conscience de l’état d’urgence et l’édulcoration du discours électoraliste ; le désir de révolution et la voie réformiste (qui n’est autre que la continuation de la contre-réforme libérale, comme vous le savez, et sans doute mieux que quiconque). Exit, du coup, les mots qui fâchent (la « décroissance ») ; exit les discours alarmistes, qui font trop « gauchos ». Comme le PS, ils en viennent à proposer de simples aménagements, qui n’assombriront pas radicalement l’avenir du capitalisme.
Or, le besoin de radicalité n’a jamais été aussi pressant qu’aujourd’hui. La nouvelle donne par rapport aux luttes anciennes réside dans le fait que le capitalisme actuel ne conduit pas « seulement » à l’oppression et à l’appauvrissement (pris aussi au sens intellectuel) des masses : il met en danger la survie même de l’humanité. Jamais, il n’a été aussi prédateur, aussi totalitaire et aussi dangereux. Il faut donc une force de résistance à la hauteur du danger qu’il représente.
En ce sens, la proposition de la LCR de construire un grand parti révolutionnaire constitue à mes yeux une immense source d’espoir. La perspective de réunir tous ceux qui désirent un changement radical de société, tous ceux qui désirent redevenir sujets de leur histoire, quel que soit leur horizon (écolo, guevariste, etc.), constitue même le seul horizon d’espoir de notre champ politique actuel. Seule la LCR pouvait lancer une telle proposition, audible par tous les « radicaux » de gauche hostiles aux compromissions avec le PS. On vous a souvent reproché votre « pureté », eh bien, c’est par elle que le ciel s’éclaircira. Oui à l’ouverture de la LCR ! Et vite, car il y a urgence !