1. Le soulèvement étudiant et sa place dans dans l’histoire : un moment fort d’affrontement de classes
Le soulèvement du 5 août ne fut pas un simple événement spontané, mais l’aboutissement d’années de colère et de résistance accumulées parmi les travailleurs, les paysans et les étudiants. Le régime de Sheikh Hasina, à la solde de la classe capitaliste au pouvoir, avait atteint son paroxysme dans le pillage des ressources de l’État, l’accaparement des terres, la flambée des prix et la répression politique. Ce sont ces conditions qui ont donné corps au soulèvement.
2. Les gains pour la nation – réalité et illusion
a) La chute du fascisme – un résultat politique :
La chute de Sheikh Hasina a marqué l’effondrement d’un appareil d’État fasciste et d’un régime dynastique. Il s’agit indéniablement d’une victoire importante pour les classes opprimées. Cependant, la chute du régime n’a pas automatiquement garanti la libération du peuple, elle a marqué le début d’une nouvelle phase de lutte.
b) Suspension temporaire de la répression :
Grâce à la mobilisation massive et aux sacrifices des étudiant·e·s, les emprisonnements politiques, les disparitions forcées, les exécutions extrajudiciaires et les lois draconiennes telles que la loi sur la sécurité numérique ont été temporairement suspendus. Le peuple a gagné un peu de répit.
c) Vide du pouvoir et montée des forces du centre :
Cependant, la chute du fascisme n’a pas conduit à l’établissement d’un pouvoir populaire enraciné dans la classe ouvrière et la paysannerie.
Au contraire, les forces du centre – capitalistes et élites soutenues par l’étranger – ont saisi cette occasion pour former un « gouvernement intérimaire ». En réalité, une autre fraction de la classe dirigeante a pris le contrôle du pouvoir d’État.
3. Les pertes pour la nation – Une révolution inachevée
a) Le pouvoir d’État reste entre les mains de l’ennemi de classe :
Malgré le changement de régime, l’appareil d’État – ce qui comprend l’armée, la bureaucratie et le système judiciaire – reste sous le contrôle de la vieille classe capitaliste. Le peuple n’a jamais acquis de pouvoir réel. Cela signifie que l’État reste au service de la classe dominante et sert les intérêts des élites au pouvoir.
b) L’insuffisante contribution des paysans et des travailleurs :
Si les étudiants ont mené le soulèvement, la force indépendante des paysans et de la classe ouvrière ne s’est pas suffisamment manifestée. Cela a constitué une faiblesse stratégique dans le déroulement de cette lutte des classes.
c) Absence d’un parti révolutionnaire :
Il n’y avait pas de parti communiste révolutionnaire unifié et doté d’un programme représentant les classes opprimées. En conséquence, malgré son succès initial, le soulèvement étudiant n’a pas réussi à assurer un transfert durable du pouvoir aux masses.
4. État actuel de la lutte des classes et voie à suivre
Un an après, le pays est confronté à deux choix :
(a) Revenir à un système « démocratique » gouverné « au centre », où c’est la même classe capitaliste qui règne derrière de nouveaux visages.
(b) Organiser la force réelle des paysans, des travailleurs et des étudiants pour faire avancer la lutte pour le pouvoir populaire.
La voie choisie dépendra de la présence ou de l’absence de conscience et d’organisation révolutionnaire.
Conclusion : l’histoire offre des possibilités, mais pas de garanties
Le soulèvement étudiant du 5 août a créé une opportunité historique : la possibilité de construire une société libre de toute exploitation à la suite de l’effondrement d’un régime fasciste. Pour réaliser ce potentiel, la lutte des classes doit s’intensifier. Ce que le peuple a gagné peut être perdu si c’est une autre fraction de la classe dirigeante qui reste au pouvoir. D’un autre côté, l’occasion perdue peut être rattrapée si l’on parvient à développer une conscience révolutionnaire et une organisation.
Et donc, faisons en sorte que le 5 août reste dans les mémoires non seulement comme le jour de la chute du fascisme, mais aussi comme l’aube d’une lutte des classes renouvelée, où les étudiants, les paysans et les travailleurs ne se contentent pas de résister, mais luttent pour construire un nouvel État populaire.
Badrul Alam
5 août 2025
Dhaka
Europe Solidaire Sans Frontières


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