De Varsovie,
Le 20 juin, le maire de Kielce (sud-est du pays) signait un accord avec l’entreprise française Veolia Transport Polska, concernant la vente de 85 % du service d’autobus de la municipalité. Veolia a déjà acheté quinze entreprises municipales d’autobus en Pologne et s’intéresse aussi au marché des chemins de fer. La grève, la plus importante depuis des années dans les transports polonais, a démarré le 14 août. Les conducteurs revendiquaient une augmentation de salaires - ils gagnent entre 300 et 400 euros par
mois - et un « paquet social » en cas de privatisation.
Il faut savoir que Solidarnosc, qui a organisé la grève, a, lors les élections municipales, activement soutenu le maire de la ville. C’est un des exemples de la politique suicidaire menée par ce syndicat, qui soutient le gouvernement de droite polonais. Solidarnosc était favorable à la privatisation des bus de Kielce, mais demandait en échange que soit négocié un « paquet social ». Solidarnosc a construit un comité de grève régional et a annoncé la grande manifestation de soutien des conducteurs.
Pour imposer un service minimum, les autorités de la ville ont fait venir, des autres villes, des autobus gérés par Veolia. Les travailleurs qui ne voulaient pas briser la grève ont été menacés de licenciement. Dans la nuit de 28 au 29 août, des employés de sociétés de gardiennage ont attaqué le dépôt de bus occupé par les grévistes. Ils ont tiré des conducteurs hors de leurs bus et les ont battus. Des grévistes d’un autre dépôt, arrivés en renfort, ont contre-attaqué et mis les gardiens en fuite. Les conducteurs ont reçu des messages de soutien de toute la Pologne. Le groupe de mineurs du syndicat Août 80 est venu les soutenir.
Le gouvernement de Loi et justice - le parti de frères Kaczynski - est intervenu, en se présentant comme défenseur d’une « Pologne solidaire ». Le Premier ministre, Jaroslaw Kaczynski, a participé au congrès national de Solidarnosc, qui s’est ouvert le 29 août. Il a besoin du soutien du syndicat pour les prochaines élections législatives. La direction de Solidarnosc a bloqué, au congrès, toute discussion concernant les événements de Kielce. Pour elle, il s’agissait clairement de finir cette grève.
Le 31 août, un accord a été signé, avec participation de l’évêque régional. Veolia ne peut donc pas racheter l’entreprise. Elle sera transformée en « société ouvrière ». Ce joli nom ne doit pas cacher qu’il s’agit, malgré tout, d’un premier pas en direction de la privatisation, car les travailleurs n’auront pas voix au chapître dans cette nouvelle société. De plus, rien n’a été obtenu concernant les salaires. Cependant, les conducteurs ont pu montrer leur force, et Solidarnosc, comme toujours, a préféré le camp des politiciens à celui des travailleurs.
Le chantier de Gdansk menacé
Les chantiers navals de Gdansk - berceau de Solidarnosc en 1980 - sont menacés d’une restructuration drastique. La Commission européenne a averti l’État polonais, actionnaire majoritaire, que les aides versées devront être remboursées si un plan de restructuration, consistant à fermer deux tiers des bassins, n’est pas présenté. Une centaine d’ouvriers des chantiers ont manifesté à Bruxelles, le 31 août, pour montrer leur mécontentement.
« Le nouveau chantier doit être plus petit, mais plus fort », a dit le commissaire européen Charlie McCreevy. Les chantiers, qui employaient 18 000 ouvriers dans les années 1980, n’en emploient plus que 3 000 aujourd’hui. La restructuration des chantiers paraît décidée, mais les politiciens polonais - responsables de la situation de cette entreprise symbolique - peuvent maintenant en rejeter la responsabilité sur Bruxelles. Encore un exemple d’une entreprise condamnée par des administrateurs néolibéraux, autrefois liés à Solidarnosc.