Le « paquet fiscal » [1] prévoyait la présentation au Parlement, en octobre prochain, d’un rapport du gouvernement sur l’instauration d’un impôt plancher. En fixant un montant minimum d’impôt, il s’agirait d’éviter que l’impôt sur le revenu ne soit trop réduit par l’utilisation des niches fiscales.
Au-delà des modalités techniques qui ne sont pas encore connues, cet impôt minimum, inspiré d’un dispositif existant aux États-Unis, tend à accréditer l’idée que le gouvernement reprendrait aux riches d’une main ce qu’il a donné de l’autre, avec l’augmentation du bouclier fiscal limitant les impôts des 93 000 contribuables les plus riches à 50 % du total de leur revenu (contre 60 % antérieurement).
Or, la question essentielle est celle des niches fiscales qui permettent à certains hauts revenus de réduire, voire d’annuler, l’impôt sur le revenu en profitant, par exemple, des réductions pour l’emploi d’un salarié à domicile, en investissant dans des fonds de placement, ou en achetant des logements en vue de les louer, etc.
On dénombre 185 niches pour le seul impôt sur le revenu, auxquelles il convient d’ajouter les 65 niches communes à ce dernier et à l’impôt sur les sociétés. Leur coût budgétaire respectif est de 32 et 3,5 milliards (données 2007, chiffres communiqués par le Syndicat national unifié des impôts). Lorsqu’on sait que l’impôt sur le revenu devrait rapporter, l’an prochain, 57 milliards, on mesure combien sont particulièrement coûteuses ces déductions qui amputent d’autant les recettes de l’État pour une efficacité économique très faible, soulignée le Conseil des impôts.
L’instauration d’un impôt minimum, après celle d’un impôt maximum (bouclier fiscal) et des années de recul de l’imposition progressive des revenus (baisse des taux, réduction du nombre des tranches du barème) va rendre encore moins lisible l’impôt sur le revenu qui est, dans son principe, le plus juste socialement puisque taxant plus fortement les revenus les plus élevés.
On est loin d’une réforme progressiste et on peut craindre que cette nouvelle usine à gaz ne soit qu’une étape supplémentaire dans l’entreprise de démolition de l’impôt sur le revenu. Au même moment, le gouvernement continue de plancher sur la TVA dite sociale, qui ferait financer la protection sociale par les consommateurs via un impôt injuste, compte tenu de son absence de progressivité, tout en réduisant le salaire indirect des salariés (baisse des cotisations sociales) afin d’abaisser le « coût du travail » réclamé par le Medef.
Le programme électoral de Sarkozy mettait en avant le projet d’une « France de propriétaires » et, dans ce but, était promise la déduction des intérêts d’emprunt (niche fiscale supplémentaire !). Après divers cafouillages, la loi Tepa a introduit un crédit d’impôt égal à 20 % des intérêts d’emprunt immobilier pour l’achat d’une résidence principale effectué au cours des cinq années ayant précédé l’élection présidentielle.
Mais cette mesure a été retoquée, cet été, par le Conseil constitutionnel en raison de son caractère rétroactif. Du coup, elle ne sera applicable que pour les résidences acquises depuis le 6 mai, sous forme d’une déduction de 40 % des intérêts la première année, puis de 20 % les quatre suivantes.
Les 3,2 millions de personnes mal logées apprécieront, comme celles qui n’ont pas les moyens d’emprunter.
Au-delà des gesticulations médiatiques et des effets d’annonce, c’est bien un véritable programme de redistribution vers les plus riches qui continue à se mettre en place.