Echantillon des mensonges repandus par Trump et ses fans a l’occasion des ouragans Helen et Milton :
– l’organisme fédéral en charge des catastrophes (FEMA) n’a pas les moyens nécessaires, car Kamala Harris les a utilisés pour loger les migrant.e.s et aider l’Ukraine ;
– la FEMA est rendue inefficace par la politique d’inclusion des femmes, des personnes racisées et des LGBTQ ;
– les maisons endommagées sont confisquées ;
– l’aide est plafonnée a 750 dollars ;
– Biden et Harris n’aident pas les Etats à Gouverneur Républicain (démenti par les interessés).
Cerise sur le gateau : selon la fanatique MAGA Marjorie Taylor Green (élue de Georgie au Congrès), les ouragans sont causes artificiellement par les Démocrates pour nuire aux républicains... Trump, lui, pose la question:ne sont-ils pas envoyés par la Chine ?
(Nb : cette absurdité est cohérente avec son affirmation que le changement climatique est un truc inventé par les Chinois pour ruiner l’industrie US.)
Ces déclarations abracadabrantesques ont des effets pratiques : méfiance, voire hostilité des victimes vis-a-vis de la FEMA (il y aurait même eu des entraves a l’aide). Il est évident que Trump mise non seulement sur la confusion mais sur le chaos, car celui-ci serait propice a ses projets de dictature.
Toute bonne démagogie populiste s’appuie sur une réalite. La FEMA n’est pas sans critique, car elle est soumise a l’austérité néolibérale. Ses carences avaient été dénoncées lors de l’ouragan Katrina a New Orleans. Mais c’est a des boucs émissaires que Trump s’attaque, pas a l’austérité néoliberale. Lui même, à la présidence, à d’ailleurs serré la ceinture de la FEMA.
A noter que cette avalanche de mensonges est relayée sur X (ex Twitter) par l’homme le plus riche du monde. Elon Musk colporte aussi le ragot des étrangers bouffeurs de chiens et de chats. Il met toutes ses forces dans le soutien a Trump pour les dèrnieres semaines avant la présidentielle.
Musk incarne ainsi cette frange croissante de la classe capitaliste internationale qui choisit le populisme autoritaire, voyou, machiste et raciste, pour défendre son hégémonie menacée. Pas étonnant que ces gens soutiennent ceux qui sont (jusqu’a présent) les deux plus grands criminels de guerre de ce siècle : Nétanyahou et Poutine... les deux chouchous de Trump, qui souhaitent ouvertement sa victoire.
Il faut voir en face que les Musk et Cie, avec Trump en tête, sont prêts à tout pour garder leurs privilèges (et échapper à la justice, dans leur pays et à l’international). Ils sont prêts y compris a s’appuyer sur les bandes fascistes qui défilent en scandant « Jews won’t replace us » (les Juifs ne nous remplaceront pas).
Car, parenthèse, aux USA, le « grand remplacement » se décline, tenez-vous bien, en affirmant que « les Juifs » organisent l’immigration illégale... pour le compte des Démocrates qui veulent ainsi « remplacer » l’électorat blanc par un électorat d’étrangers criminels, violeurs et assassins (« c’est dans leurs gènes », a dit Trump récemment).
Comme quoi, confirmation : on peut être pro-sioniste et violemment antisémite. A méditer par ceux qui amalgament ces deux notions.
Bref, fin de la parenthèse. Le constat est clair : la décadence de la démocratie bourgeoise est abyssale, et ce n’est qu’un début. Aux USA et ailleurs.
Aux USA, le résultat du vote est très incertain. Tout se jouera dans les swing states.
Harris mise principalement sur la défense du droit des femmes a l’avortement. Elle vise a la fois l’électorat populaire démocrate décu et les Républicains « modérés ». « Modérés » avec guillemets, bien sur, car Dick Cheney et sa fille, et les autres « Republicans for Harris » ne sont pas des « modéres » : ce sont des durs de la ligne traditionnelle de l’impérialisme US, opposés notamment à l’isolationnisme de Trump et à son alliance avec Poutine (selon Bob Woodward, le descendeur de Nixon, Trump à la présidence a filé des documents classifiés à la Russie, et téléphone six fois a Poutine après 2020 !)
Pour gagner les indécis, Harris joue a fond cette carte du rassemblement avec les Républicains anti-Trump. Elle marque des points sur ce terrain. C’est précisement cela qui incite Trump à son escalade de démagogie populiste. Pour gagner, il doit non seulement fanatiser sa base MAGA, mais aussi gagner de nouvelles couches, bien au-dela des indécis. Il vise donc les gens les plus primaires, qui ignorent tout de la politique. En priorite les jeunes hommes blancs (mais pas que !) des milieux virilistes, amateurs de « sports » de combat extreme (MMA).
Dans ce contexte, renvoyer Harris et Trump dos à dos serait une stupidité ultra-gauche gravissime. La gauche, sans semer la moindre illusion sur Harris, doit absolument s’insérer dans la mobilisation pour la défaite de Trump et de son projet néofasciste.
Elle doit le faire sous son propre drapeau anticapitaliste, féministe, écosocialiste. Le débat autour des ouragans, justement, montre la nécessite de cette indépendance absolue de la gauche. En effet, il est frappant que Biden et Harris, dans leur réponse aux mensonges de Trump, ne mettent pas au premier plan la dénonciation de son négationnisme climatique et de son programme pro-fossiles ultra (« I shall drill baby, drill »). En fait, ils n’en parlent pas.
Elle doit le faire en sachant que dans tous les cas, la bataille continuera aprés l’élection. Ce point est important. Si Trump gagne, il amnistiera ceux qu’il appelle les « patriotes martyrs » de l’assaut contre le Capitole (parce qu’il aura besoin de ces fascistes dans la rue, pour la traque aux illégaux, et pour la lute contre les mouvements sociaux - syndicaux, féministes, écologistes). Et si Trump est battu... ses déclarations repétées montrent sans aucun doute qu’il tentera un nouveau coup d’Etat.
Non seulement aux USA, mais en Palestine, en Iran, en Ukraine et partout, il n’est pas abusif de dire que l’avenir du monde, l’avenir des luttes pour l’emancipation, se joue dans les prochaines semaines aux USA.
Daniel Tanuro