Une grève générale a également été déclenchée dans le gouvernorat, avec la fermeture forcée de toutes les institutions de l’État, à l’exclusion de celles classées comme services essentiels. D’autres villes et régions sous le contrôle du régime syrien, notamment les gouvernorats de Deraa et de la campagne de Damas, ont également été témoins de formes de protestations, quoique à une échelle bien moindre.
Des revendications politiques et économiques
Bien que le déclencheur des dernières manifestations soit lié aux décisions économiques prises par le gouvernement syrien qui ont provoqué une nouvelle détérioration des conditions de vie des classes populaires, c’est bien tout le régime syrien qui est remis en cause. Cela est symbolisé par le slogan devenu historique scandé par les manifestantEs — « Le peuple veut la chute du régime » — et la destruction de grandes banderoles et des portraits du dictateur syrien Bashar al-Assad.
Si la résilience et le courage des manifestantEs de Soueïda sont à saluer, seule une extension du mouvement de contestation à d’autres régions peut lui permettre de se poursuivre et de représenter un véritable défi pour le régime. Des campagnes d’arrestations ont eu lieu dans différentes villes, comme Lattaquié et Alep, depuis le début des manifestations à Soueïda. Les services de sécurité du régime craignent en effet que le mouvement de protestation ne s’étende.
Salaire minimal à 100 dollars, libération des prisonnierEs politiques
Si la mobilisation reste limitée au gouvernorat de Soueïda, le régime misera très probablement sur un enlisement, la fatigue des manifestantEs et les difficultés économiques résultant de la fermeture des activités économiques. La région dépend du régime en termes de fourniture de nourriture, de carburant et de services.
Des tentatives de création de nouveaux collectifs politiques ont eu lieu ces dernières semaines également, par exemple le Mouvement du 10 août. Son objectif principal, comme indiqué dans sa déclaration initiale, est de remédier aux souffrances socio-économiques et politiques de la population syrienne tout en mettant l’accent sur la résistance pacifique et non-confessionnelle. Il réclame aussi, entre autres, une augmentation du salaire minimum à 100 dollars par mois, la libération de toutes et tous les prisonnierEs politiques, le départ de toutes les forces d’occupation étrangères et la mise en œuvre de la résolution 2 254 de l’ONU, etc. Ce nouveau collectif revendique des milliers de membres, principalement jeunes, dans les zones contrôlées par le régime, et s’organise de manière décentralisée et en ligne. Ce mouvement s’est toutefois jusqu’ici abstenu d’appeler à des manifestations, attendant d’atteindre une masse critique de soutien populaire et par crainte d’une violente répression.
Ces nouveaux groupes restent cependant assez restreints et ne représentent pas encore un défi pour le régime au niveau national. La capacité des classes populaires à s’auto-organiser et à agir collectivement est encore très limitée par l’État.
Néanmoins, ce souffle de résistance populaire, qui rappelle à tous et toutes le soulèvement de 2011, montre que le processus révolutionnaire est toujours ouvert, envers et contre tout.
Joseph Daher