Depuis des décennies, des organisations, telle Amnistie internationale, font état des pires violations de droits de la personne en Iran. Il est souvent question de crimes contre l’humanité. Cela a été le cas en 2022. Ce sera encore le cas en 2023.
Les autorités et les fonctionnaires iraniens font preuve d’une cruauté sans nom, sans limites. Les arrestations arbitraires, les comédies de procès, les condamnations iniques se comptent par milliers, voire par dizaines de milliers, en une seule année. La justice condamne allègrement à l’amputation, à l’aveuglement, à la pendaison publique… Des actes d’une barbarie qui n’a d’égale que la sinistre volonté des autorités iraniennes de se maintenir au pouvoir, quitte à assassiner son peuple, à anéantir sa jeunesse.
Les minorités culturelles et religieuses sont prises pour cible, inlassablement harcelées. Il en va de même pour les personnes LGBTQ2+, pour les défenseurs des droits de la personne, pour les avocats, les journalistes, les dissidents politiques, les écologistes, les écrivains, les artistes, les musiciens, les étudiants et les écoliers. Seulement au cours des quelques semaines ayant suivi la mort en détention de Mahsa Amini, les autorités iraniennes avaient annoncé avoir arrêté entre 15 000 et 16 000 personnes : hommes, femmes et enfants.
Depuis un an, les Iraniennes et les Iraniens manifestent, au péril de leur vie, leur ras-le-bol, leur soif de liberté. On parle de révolution féministe, parce que ce sont les femmes qui sont à l’avant-garde et que le régime est misogyne. Sans vergogne, il intensifie l’oppression des femmes et des filles, mettant à profit l’intelligence artificielle pour mieux les traquer et les violenter.
Amnistie a examiné les décisions récentes rendues contre six femmes accusées de ne pas avoir porté le voile. Les peines sont dégradantes. Elles sont obligées d’assister à des séances de conseil sur le « trouble de la personnalité antisociale », elles sont haineusement qualifiées de « virus », de « maladie sociale », de « troubles » ou associées à la « dépravation sexuelle ». En mai, un projet de loi, dont la version révisée en juillet n’a pas été rendue publique, « visant à soutenir la culture de la chasteté et du hidjab » a été présenté au Parlement.
Les autorités s’en prennent à leurs familles, mettant tout en œuvre pour qu’elles ne puissent réclamer ni justice, ni vérité, ni réparation. Même fleurir les tombes de leurs proches leur est refusé.
C’est le cas de la famille de Mahsa Amini, dont la tombe, devenue un lieu de recueillement pour toutes les familles des victimes des manifestations, subit des dégradations répétées. Les autorités ont ourdi un projet de construction pour en restreindre l’accès. Le 5 septembre, un oncle de Mahsa Amini, Safa Aeli, a à son tour été arrêté et est détenu dans un lieu inconnu. Il est âgé de 30 ans.
Appel à la solidarité
La culture de l’impunité systémique qui sévit en Iran doit être fermement condamnée par la communauté internationale, qui doit impérativement prendre le parti des femmes et des filles, comme vient de le déclarer la secrétaire générale d’Amnistie internationale, Agnès Callamard : « La communauté internationale ne doit pas se contenter d’observer sans rien dire alors que les autorités iraniennes intensifient l’oppression à laquelle elles soumettent les femmes et les filles. »
Les États, poursuit-elle, « devraient réagir non seulement avec des déclarations publiques et des interventions diplomatiques énergiques, mais aussi en actionnant les recours juridiques permettant de mettre en cause la responsabilité des dirigeants iraniens qui ont ordonné, planifié et commis des violations généralisées et systématiques des droits fondamentaux des femmes et des filles avec […] l’obligation du port du voile. Les gouvernements doivent faire tout ce qui est en leur pouvoir afin d’aider les femmes et les filles à fuir la persécution […], veiller à ce qu’elles puissent accéder rapidement et en toute sécurité à la procédure de demande d’asile, et à ce qu’elles ne soient en aucun cas renvoyées de force en Iran ».
Les autorités iraniennes doivent comprendre, sans équivoque, que le monde ne se contentera pas d’observer pendant qu’elles intensifient leur recours à la peine de mort, qu’elles oppressent cruellement les femmes et les filles.
Certes, le Canada n’a plus de relations diplomatiques avec l’Iran. Cela ne l’empêche pas de prendre le parti des femmes et des filles et d’envoyer un message clair aux autorités et aux fonctionnaires iraniens soupçonnés de violations de droits de la personne, sinon de crimes contre l’humanité, en Iran, depuis 45 ans, et de s’assurer qu’ils soient traduits en justice. Ce qui inclut, entre autres, les Gardiens de la Révolution.
Nimâ Machouf est militante féministe d’origine iranienne, membre du collectif Femme Vie Liberté de Montréal
France-Isabelle Langlois directrice générale d’Amnistie internationale Canada francophone.
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