« La police a le feu vert pour tuer les Noirs et les Arabes »... Ces propos récents du réalisateur des Misérables, Ladj Ly, reflète le sentiment assez largement répandu dans les quartiers populaires sur l’impunité policière. Une impunité qui s’est accrue avec l’article L435-1 du Code de la sécurité intérieure voté en 2017 (qui autorise notamment les forces de l’ordre à faire usage de leur arme lors d’un contrôle routier). Car les quelques réponses judiciaires (ainsi le récent renvoi en correctionnelle de deux membres de la Brav-M pour des faits de violences et des menaces sur Souleymane, étudiant tchadien, en marge d’une manifestation en mars dernier à Paris) n’effacent pas le quotidien. En particulier celui des jeunes raciséEs habitant des quartiers populaires, comme Hedi, jeune marseillais de 22 ans gravement blessé à la tête suite à un tir de LBD par un membre de la BAC Sud, à cette heure remis en liberté sous contrôle judiciaire…
Un pouvoir plus senſible aux mobiliſations de policiers en soutien à leur collègue (avec fin juillet une vague d’arrêts de travail de protestation) qu’au sort des catégories populaires. C’est aussi pour cette raison que le nouveau ministre de l’Éducation nationale Attal et le gouvernement ont décidé, sur le terrain de l’extrême droite la plus rance, de placer au cœur de cette rentrée scolaire la polémique sur l’abaya, avec une circulaire pondue en trois jours. Une grande campagne médiatique dégueulasse qui, dans un même mouvement, vise à cibler les musulmanEs, créer une diversion sur l’absence de moyens humains dans les écoles et sur les difficultés financières des familles, tout en suscitant (malheureusement) des divisions au sein de la gauche sociale et politique.
Une riposte inédite
Ce n’est pas toujours simple, ça peut tanguer, mais ça tient bon. L’arc réunissant militantEs et collectifs des quartiers populaires, syndicats, associations et forces politiques (à l’exception notable du PS et du PCF) a consolidé son cadre de travail avec un nouvel appel sorti en plein cœur de l’été. La construction des manifestations/marches du samedi 23 septembre est à la fois un premier test sur la capacité à résister ensemble et proposer des initiatives de mobilisation aux premierEs concernéEs et que l’on ne voit pas suffisamment dans la routine des manifestations du mouvement social, du mouvement ouvrier. À cette heure, une quarantaine de manifestations sont d’ores et déjà recensées sur le site unitaire1.
Les enjeux sont importants, à la hauteur des attaques brutales dont fait preuve le pouvoir macroniste, mais aussi de la pression que fait peser l’extrême droite sur cette rentrée. Travailler la convergence entre les collectifs et familles de victimes issus des quartiers populaires et la gauche sociale et politique est la condition pour créer une riposte massive qui contribue à changer l’air du temps, assez nauséabond ces dernières semaines. Cela passe à cette étape par mettre toutes nos forces dans la réussite du 23 septembre.
Manu Bichindaritz