Les Républicains ont fait de la quasi-élimination du droit à l’avortement le fer de lance de leurs campagnes politiques, de leur programme législatif et de leurs batailles judiciaires. Tous les candidats et hommes politiques républicains font de la restriction de l’avortement un élément important de leur programme et un slogan de leur campagne. L’attaque contre le droit des femmes à l’avortement est une attaque contre la santé des femmes, contre leur organisation familiale, contre leur carrière et leurs revenus, et contre leur pleine égalité dans la société. Et il y a aussi la question de savoir si les tribunaux seront guidés par la science ou par la religion et la politique.
Offensive républicaine
Cependant, la stratégie républicaine pourrait finalement s’avérer une erreur, car elle a conduit les femmes, les indépendants et les Démocrates à voter en plus grand nombre contre eux et a créé une nouvelle génération de jeunes activistes féministes.
De récentes décisions contradictoires sur l’utilisation de la mifépristone, la pilule abortive, rendues par deux juges fédéraux, l’un au Texas et l’autre dans l’État de Washington, ont porté cette question devant la Cour suprême, dominée par les Républicains et hostile à l’avortement. La mifépristone représente aujourd’hui plus de la moitié des avortements et son élimination aurait un impact particulièrement dévastateur sur les femmes qui vivent dans les 13 États qui ont interdit l’avortement et qui peuvent désormais se procurer illégalement la pilule par correspondance, mais sans l’aide d’un médecin local. Les interdictions et les restrictions en matière d’avortement ont le plus grand impact sur les femmes noires, latinos et blanches à faible revenu qui n’ont pas les moyens de se rendre dans d’autres États pour obtenir des services d’avortement.
Pendant ce temps, en Floride, le corps législatif dominé par les Républicains a adopté une interdiction des avortements après six semaines de grossesse, signée par le gouverneur Ron DeSantis, une date à laquelle de nombreuses femmes ne se rendent pas encore compte qu’elles sont enceintes. Candidat à l’investiture républicaine pour l’élection présidentielle, DeSantis a désormais établi la norme de la législation républicaine en matière d’avortement.
Le poids des chrétiens évangéliques
Les sondages montrent toutefois que 61 % (sondage Pew) à 85 % (sondage Gallup) des ÉtatsunienEs soutiennent le droit des femmes à l’avortement, bien que nombre d’entre elles et eux pensent qu’il devrait y avoir des restrictions à l’avortement tardif. Lors des référendums organisés dans les États lors des élections de novembre 2022, le Kentucky a rejeté de nouvelles restrictions à l’avortement, le Vermont a rétabli le droit à l’avortement, le Michigan a fait de l’avortement un droit constitutionnel, tout comme la Californie. Le Kansas a rejeté les restrictions à l’avortement en août 2022.
Les chrétiens évangéliques sont la force motrice de la question de l’avortement. L’Association évangélique nationale (AEN) a déclaré que « l’avortement sur demande pour des raisons de convenance personnelle, d’ajustement social ou d’avantage économique est moralement mauvais, et [l’AEN] exprime sa ferme opposition à toute législation visant à rendre l’avortement possible pour ces raisons ».
Certains législateurs fédéraux et d’État, dont quelques-uns sont des prédicateurs évangéliques, ont demandé que l’avortement soit considéré comme un crime. « La suppression d’une vie est un meurtre, et c’est illégal », a déclaré Danny McCormick, représentant de l’État de Louisiane.
« Droit fondamental à la vie »
La question de l’avortement est fondamentalement liée au patriarcat, à la préservation de la suprématie masculine et de l’infériorité féminine. Les Républicains, défenseurs des « familles traditionnelles » et des « valeurs familiales », ne sont pas seulement opposés à l’avortement, ils sont également opposés à la contraception, comme l’a montré le vote de juillet 2022 sur la loi relative au droit à la contraception, auquel 195 Républicains se sont opposés.
La position des Démocrates et des Républicains ne pourrait être plus différente. Le programme du Parti républicain affirme que « l’enfant à naître a un droit fondamental à la vie qui ne peut être enfreint », tandis que les Démocrates soutiennent l’accès à « l’avortement sûr et légal ». Les Socialistes démocrates d’Amérique (DSA) soutiennent le droit des femmes à l’avortement et a fait campagne pour le défendre. Les féministes d’extrême gauche aux États-Unis ont historiquement brandi le slogan « Avortement gratuit sur demande ». Au-delà de la question immédiate, la décision de la Cour suprême pourrait créer un dangereux précédent si les politiques de santé sont déterminées non pas par les scientifiques et les médecins, mais par la politique et la religion.
Dan La Botz